Le cabinet Gartner en fait, depuis (au moins) 2013, un pilier de sa vision des technologies émergentes incontournables, évoluant même plus tard vers un concept d'expériences immersives (à partir de 2017). Pourtant, les innombrables tentatives d'exploitation se sont jusqu'à maintenant avérées décevantes. Ces déboires n'empêchent pas Bank of America de reprendre aujourd'hui le flambeau de la réalité virtuelle.
C'est dans le domaine de la formation interne que l'établissement engage une politique désormais agressive : à l'issue d'une période de test auprès de 400 collaborateurs, la solution du spécialiste Strivr – qui couvre l'ensemble de la chaîne de valeur, du matériel à la production des contenus – va être généralisée à l'ensemble des effectifs, soit plus de 45 000 salariés aux États-Unis. Des milliers de casques de réalité virtuelle seront déployés dans ce but, y compris dans les agences, aux quatre coins du territoire.
Le promoteur du projet au sein de la banque se veut résolument optimiste. Il affirme avoir une multitude d'idées de domaines dans lesquels la technologie pourrait être mise à profit, tout en privilégiant une approche par essais rapides. Dans le cadre de « The Academy », le programme éducatif d'entreprise, une série de cursus a ainsi déjà été développée et proposée aux employés sur diverses thématiques, pour l'instant toutes très opérationnelles, depuis les services notariaux jusqu'à la détection de la fraude.
Au-delà des apprentissages de base, focalisés sur les métiers de la finance, un autre niveau d'ambition se profile à l'horizon. Il s'agirait notamment d'accompagner les conseillers à la clientèle dans leur pratique de l'empathie avec leurs interlocuteurs, par exemple lorsqu'il sont confrontés à une personne qui vient de perdre un proche (et doit mettre de l'ordre dans ses affaires). Ce cas rappelle d'ailleurs une initiative (ancienne) de Fidelity, autre institution utilisatrice des produits de Strivr, dans un registre similaire.
Le principal bénéfice pédagogique de la réalité virtuelle est, naturellement, sa capacité à capter et conserver l'attention de l'élève sur une durée longue, ce qui représente un défi critique pour l'enseignement à distance et prend donc une dimension nouvelle dans le contexte actuel où il est difficile d'organiser des cours en « présentiel ». En revanche, et en se gardant d'y percevoir une solution magique, Bank of America estime avoir encore d'énormes progrès à accomplir pour maximiser l'efficacité des usages.
Après presque une décennie d'investissements parfois colossaux, de promesses non tenues, d'implémentations frustrantes…, la réalité virtuelle a-t-elle enfin une chance de décoller ? Pour certains observateurs, la clé du succès tenait d'abord à la maturité de la technologie et il paraît raisonnable de considérer que cet objectif est atteint. Un autre facteur déterminant est la mise au point d'applications et de contenus adaptés à un média sans équivalent : l'expérience acquise à ce stade sera-t-elle suffisante ?