Le principe de départ de Caïd est bon : faire une sorte de série en found-footage (bien que le genre soit aujourd’hui un peu usé) sur le monde de la drogue dans les quartiers chauds de Marseille. Ajoutez à cela la mouvance rap qui est aujourd’hui importante en France et vous avez un produit qui a du potentiel. L’avantage du found-footage est qu’il permet normalement de nous plonger directement au coeur du sujet mais Caïd se mélange dans tellement de références que la série s’égare. Notamment dans ces références directes à REC le film d’horreur espagnol sur le principe de ne jamais « arrêter de filmer ». Avec un format inédit pour une série française sur Netflix (10 épisodes de 10 minutes), les scénaristes auraient pu faire quelque chose de réellement percutant mais à s’enfoncer dans tous les poncifs et clichés des quartiers chauds, on se retrouve avec quelque chose qui manque cruellement d’âme. Nicolas Lopez et Ange Basterga ont mis leurs économies pour écrire, réaliser et auto-productrice Caïd en 2017. C’est de ce film que ressort Caïd la série. La caméra embarqué est un genre qui m’a toujours fasciné car il permet de créer à la base une ambiance documentaire sauf que dans Caïd c’est ici une sorte d’astuce narrative et pas vraiment un personnage à part entière qui permet de donner corps aux personnages et au récit.
Un réalisateur et son caméraman sont envoyés tourner un clip de rap au cœur des cités du sud de la France, et se retrouvent embarqués malgré eux dans une guerre des gangs.
Il y a tout de même de bonnes idées dans cette première saison de Caïd et notamment l’épisode du barbecue qui permet d’apporter un peu de lueur à un récit qui n’a de cesse de taper sur les quartiers. On est très loin d’un Gomorra car malgré l’humanisation de la série par la visite à la mère de Moussa par exemple, cela manque cruellement de sentiment d’appartenance. A vouloir tomber dans tous les clichés, Caïd s’égare et ne parvient pas vraiment à raconter quoi que ce soit. Les moyens de Netflix ont probablement été l’une des raisons de l’échec de Caïd en série. En effet, la série veut utiliser tout ce qu’elle peut utiliser, perdant l’âme du film d’origine. Cela donne parfois l’impression que l’on sort complètement du récit à la caméra embarquée amateur. Dès que la série entre en action, on sent que les réalisateurs veulent trop en faire, de ces petits effets de style qui n’ont pas l’âme d’origine du projet.
Au delà du fait que Caïd échoue parfois dans sa mise en scène à créer un vrai moment d’immersion, le casting a lui aussi ses limites. J’apprécie l’engagement des créateurs de vouloir prendre des gens qui vivent dans ces quartiers afin de coller au plus près à la réalité mais l’on sent rapidement les limites de ce casting. Les dialogues ne sont pas toujours fluides et cela donne parfois cette mauvaise impression que tout est surjoué. L’utilisation du décor (les quartiers chauds de l’agglomération de Marseille) est là aussi assez mauvaise. On ne ressent pas toujours ce qu’un quartier peut donner en vrai : notamment ce côté labyrinthique qui est complètement oublié. Sauf à certains moments où les réalisateurs se souviennent qu’ils peuvent faire ça et l’on perd forcément le fil de ce que Caïd veut réellement être et faire.
La bande son est quant à elle plutôt bonne et permet notamment à Naps de délivrer un titre inédit et puis « Sadio Maness » de Soso Maness fait toujours son petit effet. Ainsi, je ne conseille pas forcément Caïd bien que la série soit courte et que le temps passe assez rapidement. C’est trop médiocre pour réellement donner l’impression que le projet fonctionne alors que sur le papier c’était plus qu’intéressant.
Note : 3.5/10. En bref, si le film Caïd était un projet intéressant, son adaptation en série perd toute la substance originelle malgré quelques jolis moments réussis.
Disponible sur Netflix