"Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 16 août 2016 par lequel le maire de Blauvac a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de l'édification d'une construction individuelle, ensemble la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire sur son recours gracieux tendant au retrait de cette décision.
Par le jugement n° 1700363 du 18 septembre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 19 novembre 2018 et par des mémoires complémentaires enregistrés les 25 novembre 2019, 8 février et 16 juin 2020, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 18 septembre 2018 du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 août 2016 du maire de la commune de Blauvac ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Blauvac, à titre principal de lui délivrer le permis de construire sollicité dans un délai de 8 jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard passé ce délai, à titre subsidiaire, de réinstruire sa demande de permis de construire sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Blauvac la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la note en délibéré produite pour Mme C... n'est pas visée dans le jugement attaqué en méconnaissance de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;
- le motif du refus de construire en litige tiré de ce que le projet méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme eu égard au risque incendie est infondé ;
- le motif tiré de ce que l'accès au projet en servitude présente un risque important pour la circulation automobile et les usagers de la route départementale 150 au regard de la forte pente et de la largeur de la voie de desserte en méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ne peut pas fonder le refus en litige ;
- en tout état de cause, le maire aurait dû lui délivrer le permis de construire sous réserve de prescriptions en ce sens ;
- le motif tiré de ce que la constructibilité du terrain d'assiette du projet serait incompatible avec le SCoT Comtat-Ventoux au motif que ce terrain est situé en limite de l'enveloppe d'urbanisation préférentielle fixée par le document graphique du DOG n'est pas non plus fondé ;
- le projet ne porte pas atteinte au site ;
- le refus litigieux est entaché de détournement de pouvoir et de procédure ;
- sa requête ne présente pas de caractère abusif ;
- la substitution de motifs demandée par la commune ne peut pas non plus fonder la décision en litige.
Par des mémoires en défense enregistrés les 26 septembre, 19 décembre 2019, 1er avril et 31 juillet 2020, la commune de Blauvac, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête, à ce que soit mise à la charge de la requérante la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et qu'elle soit condamnée à verser une amende de 10 000 euros pour recours abusif sur le fondement de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- le jugement est régulier ;
- le moyen nouveau en appel tiré du détournement de pouvoir est irrecevable ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- elle demande la substitution du motif tiré de ce que le projet se situe en dehors de la partie urbanisée de la commune au sens de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, de nature à fonder également la décision en litige.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me B... représentant Mme C... et Me A... représentant la commune de Blauvac.
Une note en délibéré présentée pour Mme C... a été enregistrée le 3 novembre 2020.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... a déposé le 23 juin 2016 auprès du service instructeur de la commune de Blauvac une demande de permis de construire afin d'édifier une maison individuelle d'une surface de plancher créée de 145,54 m² sur la parcelle cadastrée A 284 d'une superficie de 13 560 m² située route de Mazan, lieudit Le Coudray. Par arrêté en litige du 16 août 2016, le maire de la commune de Blauvac a refusé à Mme C... la délivrance de ce permis de construire. Mme C... relève appel du jugement du 18 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 10 du code de justice administrative : " Les jugements sont publics (...) ". L'article R. 741-1 du code de justice administrative dispose que : " Réserve faite des dispositions applicables aux ordonnances, la décision est prononcée en audience publique ". Il résulte de ces dispositions que les décisions juridictionnelles auxquelles elles s'appliquent sont rendues publiques par une lecture en audience publique. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique (...). Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires (...). Mention est également faite de la production d'une note en délibéré. / La décision fait apparaître la date de l'audience et la date à laquelle elle a été prononcée. ". Le juge administratif peut être valablement saisi d'une note en délibéré adressée dès lors qu'elle est enregistrée au plus tard la veille de la date de lecture de la décision.
3. La minute du jugement attaqué du tribunal administratif de Nîmes, qui indique que l'audience s'est tenue le 4 septembre 2018 et que la lecture du jugement est intervenue le 18 septembre 2018, porte la mention "lu en séance publique", qui fait foi jusqu'à la preuve du contraire, laquelle n'est pas rapportée en l'espèce. Par suite, la note en délibéré produite par la requérante le 18 septembre 2018 à 16h20, ainsi que l'atteste le dossier de première instance, soit postérieurement à la veille de la date de la lecture du jugement, ne devait pas être visée dans ce jugement. Dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait irrégulier pour ce motif.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Pour prendre l'arrêté de refus de permis de construire en litige, le maire s'est fondé sur quatre motifs, tirés de ce que le projet porte atteinte à la sécurité publique en méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme eu égard à sa situation au regard du risque incendie, qu'il méconnaît l'article R. 111-5 de ce code eu égard à la desserte et à l'accès du projet et du risque important présentée par la voie d'accès de ravinement de dépôt de grave naturelle sur la route départementale 150 située sous le projet, de ce qu'il porte atteinte au caractère des paysages naturels environnants (Notre Dame des Anges) en méconnaissance de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et de ce que la constructibilité du terrain d'assiette est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale de l'Arc Comtat Ventoux eu égard à sa situation en limite d'enveloppe d'urbanisation préférentielle. Les premiers juges ont estimé que le premier motif de cette décision tiré du risque d'incendie de forêt affectant le projet était à lui seul de nature à fonder le refus en litige.
5. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". En vertu de cet article, lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect. Il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.
6. Il ressort des pièces du dossier que le maire pour prendre la décision en litige s'est fondé sur l'avis défavorable du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de Vaucluse rendu le 27 juillet 2016 après une visite des lieux, dans le cadre de l'instruction du dossier de demande du présent permis. Cet avis mentionne, comme risques particuliers, que le terrain d'assiette est situé au nord d'une zone déjà urbanisée composée de constructions individuelles et qu'il est constitué par un ancien verger abandonné ainsi que le confirme la requérante elle-même et qu'il est ceinturé par une zone boisée sensible aux feux de forêt (chênes, pins, friches) hautement combustible, très inflammable et particulièrement dense à fort dénivelé. Il précise qu'à la suite de l'étude de l'aléa feux de forêts réalisée par les services de la direction départementale du territoire (DDT) et du SDIS approuvée le 23 février 2004, la zone ouest, nord et est ceinturant le projet a été classée en aléa fort, ce qui représente un risque particulièrement favorable à l'éclosion et à la propagation d'un incendie de forêt et que l'habitation projetée se situe à 16 m de la forêt et à 150 m de l'entrée de la parcelle. La requérante ne conteste pas utilement ces constatations du SDIS en soutenant que sa parcelle terrain d'assiette du projet n'est elle-même ni cartographiée par l'étude susmentionnée comme soumise à un aléa au titre du risque incendie, ni située dans la forêt et que les quelques arbres fruitiers isolés restant sur cette parcelle régulièrement débroussaillée ne comportent pas d'essence de haute combustibilité, dès lors que la vulnérabilité du terrain d'assiette du projet à ce risque doit être appréciée de manière globale en tenant compte de son environnement boisé. Si la requérante soutient que sa demande de permis de construire prévoit une voie d'accès élargie à 5 m par acquisition judiciaire d'une servitude de passage avec un rayon de courbure intérieur et sur une sur-largeur conforme aux préconisations du SDIS, ce dernier ajoute que l'accessibilité par la voie de desserte, dont l'élargissement projeté exigerait la démolition, au demeurant non prévue dans le dossier de demande, de murs de certaines propriétés bordant cette voie, ne permet ni le croisement des véhicules ni leur retournement. L'avis mentionne enfin que la défense extérieure contre l'incendie est inexistante à proximité du projet, dès lors que la réserve d'eau prévue de 120 m3 est située au-delà de l'habitation à 30 m, ainsi que l'indique le plan de masse du projet, ce qui rend difficile la lutte contre un incendie. Dans ces conditions, alors même que le SDIS lors de précédents avis datés de 2007 et 2008 a indiqué dans le cadre de précédentes demandes de permis de construire sur la même parcelle que cette dernière n'était alors pas soumise à l'aléa feu de forêt, la requérante n'établit pas l'absence de probabilité du risque d'incendie sur le terrain d'assiette du projet. Au regard de l'augmentation induite par le projet du risque incendie dans cette zone urbanisée, et alors même qu'aucun incendie n'aurait été recensé sur le territoire de la commune depuis le 1er janvier 2000, le maire de la commune de Blauvac n'a pas méconnu les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en estimant que le projet est de nature à porter atteinte à la sécurité publique du fait de sa situation et de ses caractéristiques.
7. Il ne ressort pas des pièces du dossier que des modifications susceptibles de faire l'objet de prescriptions auraient permis d'assurer la conformité du projet aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur. En outre, Mme C... ne conteste pas utilement les affirmations de la commune selon lesquelles l'aménagement d'une partie plane côté route départementale pour éviter un risque pour les usagers de la voie publique ne serait pas réalisable à défaut de la maîtrise foncière par la requérante de cette plate-forme. Par suite, contrairement à ce que soutient la requérante, le maire n'a pas méconnu l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en refusant le permis de construire litigieux sans l'assortir de prescriptions spéciales.
8. Il résulte de l'instruction que le maire aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur le seul motif tiré de la méconnaissance par le projet de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Par suite, il n'y a pas lieu pour la Cour de se prononcer sur les trois autres motifs de la décision en litige mentionnés au point 4 du présent arrêt.
9. En second lieu, dès lors que le refus de permis de construire en litige est fondé légalement sur le risque d'atteinte à la sécurité publique ainsi qu'il a été dit au point 7 du présent arrêt, le moyen recevable tiré d'un détournement de pouvoir allégué par Mme C... doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la demande de substitution de motif de la commune, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'enjoindre à la commune à titre principal de lui délivrer le permis de construire sollicité, à titre subsidiaire, de réinstruire sa demande de permis de construire sous condition de délai et d'astreinte doivent être rejetées.
Sur l'amende pour recours abusif :
11. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ". La faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de la commune de Blauvac tendant à ce que la requérante soit condamnée à une telle amende ne sont pas recevables et doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une quelconque somme soit mise à la charge de la commune de Blauvac qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... la somme de 500 euros à verser à la commune de Blauvac au titre des frais qu'elle a exposés dans la présente instance et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Mme C... versera la somme de 500 euros à la commune de Blauvac sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Blauvac est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C... et à la commune de Blauvac."