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Conservatisme en péril

Publié le 12 juin 2008 par Jbernard
Le conservatisme n’a plus le vent en poupe aux Etats-Unis. Après avoir dominé pendant quarante ans la politique américaine, le mouvement idéologique porté par les présidents républicains Richard Nixon, Ronald Reagan, George Bush père et fils est arrivé au stade de l’épuisement. C’est le thème développé par le journaliste George Packer dans l’excellent article publié récemment dans le magazine New Yorker (http://www.newyorker.com/reporting/2008/05/26/080526fa_fact_packer?currentPage=all). Vu d’Europe, la politique américaine apparaissait tellement orientée à droite ces dernières décennies que la plupart des responsables politiques européens conservateurs soutenaient souvent des politiques considérées comme « de gauche » aux Etats-Unis. Etre « de gauche » (liberal en anglais) était, et est toujours, quasiment un gros mot aux Etats-Unis et les responsables politiques démocrates font en sorte d’éviter cette étiquette. Mais les cycles idéologiques ont toujours une fin et c’est ce qui arrive au conservatisme. Il est temps sans doute pour les républicains de retourner dans l’opposition. « Chez les républicains, il n’y a aucune énergie, aucune réflexion neuve, aucune capacité à saisir les inquiétudes et sentiments de millions de gens », écrit Packer.
Que le candidat républicain à l’élection présidentielle John McCain ait été choisi pour porter les couleurs du conservatisme en 2008 est assez révélateur de l’état de déliquescence du mouvement. D’abord, McCain est âgé (71 ans) et une idéologie qui a le vent en poupe est rarement portée par un responsable politique en fin de parcours. Et puis McCain est le candidat républicain le moins conservateur parmi ceux qui ont fait campagne lors des primaires. Sa candidature a suscité les réticences de la frange la plus conservatrice chez les républicains, mais comme le mouvement est affaibli , McCain a pu se faire accepter sans une trop grande résistance.
Il est frappant de constater que McCain propose les mêmes recettes économiques, estampillées « politiquement correct » chez les conservateurs, utilisées par George W. Bush et qui ont montré leurs limites : l’effroi quasiment maladif à l’égard de tout ce qui ressemble de près ou de loin à une augmentation des dépenses publiques (à l’exception de l’armée et des équipements militaires), une certitude aveugle dans le bienfait des réductions d’impôts. Sur les questions de société, McCain est partisan d’un monde immuable. La différence avec Bush est qu’il ne brandit pas sa foi religieuse (il est considéré comme peu porté sur la religion). Concernant l’Irak, il assure que c’est ce qu’il fallait faire. Mais c’est sans doute dans le domaine de la politique étrangère, qu’il connaît le mieux, qu’il se distingue le plus de Bush, dont il ne partage pas la vision messianique néo-conservatrice.
Tout cela ne ressemble guère au changement auquel aspirent les Américains selon les sondages. Les idées de la gauche américaine sont de retour sur le devant de la scène et doivent en principe assurer la victoire des démocrates à la présidentielle. Mais McCain, conservateur version allégée et vieillissante, pourrait malgré tout être considéré comme un moindre mal par les électeurs face au candidat démocrate Barack Obama. Certains Américains pourraient hésiter à élire un candidat âgé de 46 ans et ayant une maigre expérience, tandis que d’autres pourraient rejeter l’idée d’un président africain-américain.

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