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Nouvelle Gauche, troisième partie : Bretton-Woods

Publié le 25 juillet 2008 par Omelette Seizeoeufs

Alors, je disais quoi...?

Oui, un nouveau Bretton-Woods. C'est l'une des propositions dans la contribution Urgence Sociale de la Nouvelle Gauche.

1. Etes-vous d'accord pour que, à l'issue de son Congrès, le PS organise sans tarder avec l'ensemble des socialistes européens (ceux qui sont au pouvoir et ceux qui n'y sont pas) une grande Conférence internationale pour définir de nouvelles règles du jeu en matière monétaire et financière ?

Voici l'explication :

Vu la gravité de la crise monétaire et financière qui vient, il faut sans tarder convoquer un nouveau Bretton Woods. En 1944, dans cette petite ville du nord-est des États-Unis, on a réuni les 30 meilleurs économistes de la planète et on leur a dit (gentiment mais fermement) qu'ils ne sortiraient pas du village tant qu'ils ne se seraient pas mis d'accord sur de nouvelles règles du jeu monétaires et financières permettant d'éviter qu'une crise semblable à celle de 1929 puisse à nouveau se produire. Ils ont travaillé dur, pendant 3 semaines, pour construire un système qui a tenu 30 ans. Hélas, depuis le début des années 1970, les libéraux ont peu à peu démantelés les règles et les outils de Bretton Woods pour finir par accumuler des déséquilibres supérieurs à ceux de 1929...

L'idée est donc de refaire la même chose, en commençant par mettant au travail tous les socialistes européens d'abord, et ensuite le reste du monde :

Allons-nous attendre que la crise éclate et que la situation devienne ingérable pour convoquer un nouveau Bretton Woods ? Si tout le monde a conscience qu'on va dans le mur, qu'attendons-nous pour définir, au niveau mondial, de nouvelles régulations monétaires, financières, sociales et écologiques ? Demander 3 semaines de travail approfondi pour éviter une crise majeure, demander 3 semaines de travail pour 30 ans de stabilité, est-ce trop exiger ?

"Est-ce trop exiger?" Malheureusement, la question n'est pas tout à fait celle-là. S'il était possible de faire ce que la Nouvelle Gauche propose ici, je serais évidemment pour, sans hésiter, ou du moins sans hésiter beaucoup. Le problème n'est pas celui de savoir ce qu'on ferait si on pouvait, mais celui du rapport de forces. Jamais les intérêts financiers de la planète ne laisseraient une bande d'économistes refaire les règles de la finance internationale. On prend des paris? D'une certaine façon, ce travail est en cours depuis des années, ou du moins son image inversée : le GATT et ses enfants et petits enfants, avec toute leur complexités, leur lourdeur, et leurs intérminables négociations sont là pour nous le rappeller.

Mais surtout nous ne sommes plus en 1944, année unique dans l'histoire moderne : l'économie internationale n'existe plus, la guerre n'est pas terminée mais on commence à penser à ce qui va se passer après. Pour les pays en guerre, le rôle de l'État dans l'économie est prépondérante, et de plus la position des Etats-Unis est alors unique : futurs vainqueurs, ils n'ont pas, en 1944, de rival économique véritable. Les grands centres financiers ne fonctionnent plus : surtout Londres et Paris. C'était une chance unique pour réécrire les règles, qui, sauf cataclysme planétaire, ne reviendra pas de sitôt.

Si l'utilité qu'il y a aurait à tout refaire, à refaire le monde économique, ne fait pas véritablement de doute, du moins pour des Français de gauche, la possibilité d'imposer une telle solution n'existe pas, tout simplement. Des industries financières entières sont désormais fondées sur la maîtrise des subtilités des règles de la finance. Toucher à une ou plusieurs virgules de ces règles revient à rebattre de fond en comble les cartes du pouvoir économique. Trois semaines et trente économistes ne peseraient pas lourd.

C'est un joli but, mais ce rêve de revenir à un monde financier plus simple et plus équitable peut aussi empêcher de chercher des solutions réelles. La mondialisation est là, l'économie mondiale est là. Un "nouveau Bretton-Woods" est une proposition qui nous plaît parce que, effectivement, il faudrait pouvoir tout changer. Mais c'et se tromper sur les léviers dont on disposent et, à mon avis (il faudra que je le développe encore), c'est dépenser de l'énergie politique dans une entreprise qui ne pourra pas aboutir, dans une tentative de "refaire le monde", comme on dit. Malheureusement, plutôt que de réécrire les règles, le rôle de la politique sera plutôt d'infléchir les choses.

(A suivre, avec beaucoup d'inflexions.)


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