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Pépites, de Syvie Blondel

Publié le 12 juin 2021 par Francisrichard @francisrichard
Pépites, de Syvie Blondel

Les pierres ne peuvent empêcher l'herbe et les fleurs de pousser dans leurs crevasses: une goutte de pluie suffit. Alors les plantes enfoncent en elles leurs racines, les conquièrent et font une autre vie, plus colorée.

C'est dans Pépites, une des dix nouvelles qui donne son nom au recueil de Sylvie Blondel, que se trouve ce message d'espoir. Il y a en effet, dans cet hymne aux pierres rugueuses, comme la vie peut l'être, la possibilité d'une existence nouvelle parce que les pierres peuvent se faire les réceptacles d'une telle émergence.

La nuit verte, qui doit, son nom au tableau de Chagall, montre qu'il est possible à une proie d'échapper à son prédateur, de s'envoler comme le fait la chèvre du tableau et comme n'a pu le faire celle de Monsieur Seguin qui se résigne à son sort funeste. Un petit incident permet à cette proie d'enclencher le processus de délivrance.

Dans Café crime, la narratrice est témoin d'un crime, du moins le croit-elle. Elle prévient la police. Mais, quand elle revient sur les lieux, le corps de la victime a disparu. A-t-elle seulement rêvé? Au café, cela ne semble émouvoir personne. D'ailleurs il a fermé. Quoi qu'il puisse arriver maintenant, elle a fait ce qu'elle devait.

Dans Modification, dont le titre s'inspire du roman de Butor, Stavros a reçu un message de Danaé, qui aurait été sa petite amie autrefois,  mais il ne se souvient pas comment leur relation s'est terminée. Il prend l'avion pour la rejoindre à Genève. Mais son avion tombe en mer. Un geste du passé, réitéré, suffit à lui redonner espoir.

Dans Le diable est ici, Gustave et la narratrice se rendent aux Gastlosen, une dentelle de pics abrupts à la frontière des cantons de Berne et de Fribourg. Ils ne se doutent pas que, lors de cette excursion, les yeux de la narratrice se dessilleront et que, finalement, bien involontairement, elle se débarrassera d'une forte emprise. 

Il se passe Quelque chose entre nous, se dit une comédienne, à propos du couple qu'elle forme avec un comédien. Ils jouent ensemble des amants muets dans Salomé, la pièce d'Oscar Wilde, et deviennent inséparables à la scène comme à la ville. Mais, ne doit-elle pas se méfier? Un envoûtement n'est jamais raisonnable.

La Cerisaie sera bientôt La maison vide familiale. La fratrie de la narratrice et elle-même en ont convenu. Leur mère ne peut plus l'occuper seule. Paul lui a dit: Tu seras très bien à la Fondation des Ormeaux avec des camarades de ton âge. Le jour de son anniversaire, celle qui a perdu la mémoire leur joue un tour à sa façon.

Dévorer se passe au Japon. C'est l'histoire d'une intruse misérable qui se fait toute petite dans l'appartement d'un jeune homme pour lui dérober un peu de nourriture dans son réfrigérateur. Il arrive à la confondre en installant une caméra et à la faire arrêter. Mais son corps le hante parce qu'il l'a vu nu et il la fait libérer...

Loin du réconfort est une chanson d'Alain Bashung. Au retour de la visite qu'elle a rendue à son amie Yasuno, cette chanson vient à l'esprit de la narratrice après qu'elle a pris un taxi. Le trajet de retour ne s'est pas passé comme prévu et elle ne sait pas ce qui lui est arrivé sinon que son voyage s'est poursuivi comme dans un rêve.

Dans Une voix sous la porte, une jeune Ukrainienne accepte de poser pour des photos érotiques glamour contre bonne rémunération. Après la séance de shooting, c'est une nouvelle vie fantasmagorique qui l'attend derrière la porte verte des toilettes qui s'ouvre avec une clé violette. Ce n'est pour autant qu'elle voudra s'y éterniser.

La leçon de ces nouvelles est que la vie est semée d'embûches, que celles-ci peuvent être soit surmontées, soit contournées, à condition toutefois de saisir des opportunités quand elles se présentent, de prendre des initiatives et de ne pas être trop dépité lorsque surviennent des déconvenues qui sont, après tout, inévitables:

Le caillou pointu dans ma chaussure porte un message. Il me met en garde contre les certitudes. Il me rappelle qu'un petit rien peut me faire trébucher.

Francis Richard

Pépites, Sylvie Blondel, 152 pages, L'Âge d'Homme

Livres précédents:

Le fil de soie, 172 pages, L'Aire (2010)

Ce que révèle la nuit, 158 pages, Pearlbooksedition (2015)


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