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Le niveau inquiétant des élèves en sciences !

Publié le 07 juillet 2021 par Raphael57
Le niveau inquiétant des élèves en sciences !

Au moment où tombent les résultats du baccalauréat, d'aucuns se rengorgent des résultats exceptionnels à cet examen tandis que d'autres prennent déjà cela pour une normalité. Comme l'été représente pour moi une période d'otium, surtout après cette année extrêmement chargée sur le plan de la recherche universitaire (je viens encore juste de présenter l'un de mes papiers à un colloque international), je serai volontairement un peu moins actif sur mon blog. Néanmoins, j'ai souhaité prendre un peu de temps dans ce billet pour évoquer le niveau en Mathématiques et en sciences de nos marmots.  J'ai ainsi lu avec intérêt les résultats de l'enquête TIMSS de 2019, menée avant la pandémie. Et le moins que l'on puisse dire est que les conclusions sont très inquiétantes...

L'enquête TIMSS

L’enquête internationale TIMSS (Trends in International Mathematics and Science Study) organisée par l’IEA (International Association for the Evaluation of Educational Achievement) évalue les performances en Mathématiques et en sciences - biologie, chimie, physique et sciences de la Terre - des élèves dans leur quatrième ou huitième année de scolarité (en France, il s'agit donc des élèves de CM1 et de quatrième). TIMSS Advanced, menée en 1995, 2008 et 2015, étudie les résultats en mathématiques et en physique avancées des élèves en dernière année d'école secondaire (classes de terminale en France).

Ainsi, depuis 1995, l'enquête TIMSS permet de suivre les résultats en mathématiques et en sciences des élèves tous les quatre ans. La dernière mouture, en 2019, était la septième évaluation de ce type et fut menée en quatrième et huitième année de scolarité dans 64 pays.

Résultats en 2019 pour les élèves de 8e année de scolarité

Les élèves français en classe de 4e obtiennent un score moyen de 483 points en mathématiques, inférieur à la moyenne internationale des pays de l’OCDE et de l’UE participants :

Le niveau inquiétant des élèves en sciences !

[ Source : https://timss2019.org/reports ]

Même constat douloureux pour les sciences :

Le niveau inquiétant des élèves en sciences !

[ Source : https://timss2019.org/reports ]

Une tendance négative

Beaucoup plus intéressante est l'évolution des résultats de nos chères têtes blondes depuis 1995. La tendance globale pour les élèves de huitième année de scolarité est plutôt positive en Mathématiques, dans la mesure où il y a plus de pays avec une tendance haussière de leur score que baissière :

Le niveau inquiétant des élèves en sciences !

[ Source : https://timss2019.org/reports ]

De même pour les sciences :

Le niveau inquiétant des élèves en sciences !

[ Source : https://timss2019.org/reports ]

Et la France dans tout ça ? Et bien, comment dire... Regardez par vous-mêmes pour les Mathématiques :

Le niveau inquiétant des élèves en sciences !

[ Source : https://timss2019.org/reports ]

Et maintenant pour les sciences :

Le niveau inquiétant des élèves en sciences !

[ Source : https://timss2019.org/reports ]

Une baisse de niveau aux multiples conséquences

J'invite le lecteur intéressé par ces questions à se plonger en détail dans le rapport de cette enquête, tant il fourmille de statistiques et d'informations pertinentes. En effet, loin de se résumer à un chiffre unique, TIMSS analyse différentes composantes des Mathématiques et des sciences, qui permettent d'affiner les conclusions. Mais dans le cas de la France, il y a à l'évidence décrochage du niveau de nos élèves spatialement et temporellement.

Les raisons sont multiples et nombre d'auteurs les ont très bien documentées : La fabrique du crétin (Jean-Paul Brighelli), Requiem pour l'éducation nationale (Patrice Romain), Le pire est de plus en plus sûr : Enquête sur l'école de demain (Natacha Polony), Et vos enfants ne sauront pas lire... ni compter ! (Marc le Bris), etc. Plutôt que de faire de la redite en moins bien, je me contenterai d'insister sur un point : l'illusion de la pédagogie ludique. Vous savez, cette "festivisation" de l'école, au sens que donnait Philippe Muray à ce mot, où l'on fait croire aux élèves que l'acquisition de savoirs peut se faire sans effort et dans le jeu, alors qu'apprendre nécessite depuis l'aube de l'humanité un travail harassant. Ce n'est qu'après avoir accompli cette tâche, que l'on apprend à ressentir la véritable satisfaction du travail intellectuel (bien fait). Mieux, l'on apprend aussi l'humilité, car au fond nous ne sommes que "des nains sur des épaules de géants" (nani gigantum humeris insidentes), comme l'a énoncé avec brio Bernard de Chartres au XIIe siècle.

Assurément, la célèbre parabole de Claude-Henri de Rouvroy, comte de Saint-Simon, publiée dans l’Organisateur en 1819 semble bien lointaine dans nos mémoires... Souvenez-vous, elle disait pourtant en substance que si la France perdait d'un coup ses meilleurs savants, artisans, producteurs, ingénieurs, etc.,  qui sont "de tous les Français les plus utiles à leur pays, ceux qui lui procurent le plus de gloire, qui hâtent le plus sa civilisation ainsi que sa prospérité ; la nation deviendrait un corps sans âme, à l’instant où elle les perdrait ; elle tomberait immédiatement dans un état d’infériorité vis-à-vis des nations dont elle est aujourd’hui la rivale, et elle continuerait à rester subalterne à leur égard tant qu’elle n’aurait pas réparé cette perte, tant qu’il ne lui aurait pas repoussé une tête. Il faudrait à la France au moins une génération entière pour réparer ce malheur, car les hommes qui se distinguent dans les travaux d’une utilité positive sont de véritables anomalies, et la nature n’est pas prodigue d’anomalies, surtout de celles de cette espèce.".

Mais, en France, par calcul, démagogie ou veulerie, certains dirigeants politiques ont préféré baisser les exigences tout en récompensant par des notes insignifiantes et élevées - quand il y en a encore ! - une acquisition de connaissances toujours plus hasardeuse, à laquelle l'on substitue désormais des compétences. Halte à la mémorisation, à la réflexion et à l'analyse ; place à l’autoconstruction des savoirs, à l'approximatif et à la restitution de connaissances. Le tout mâtiné comme il se doit de supports pédagogiques numériques, qui conduisent les élèves à passer encore plus de temps sur un écran. Mais puisque l'on vous dit qu'apprendre devant un ordinateur est ludique et qu'en plus c'est le progrès !

À tel point, que les inquiétants résultats que nous venons de survoler pour les Mathématiques et les sciences apparaissent également pour la maîtrise de la langue (enquête PIRLS). Pensez qu'il existe désormais des organismes proposant des certifications payantes pour attester du niveau de langue française même pour des étudiants qui sont nés en France et ont suivi une scolarité en France ! C'est dire le niveau ressenti sur le terrain après trois décennies de pédagogisme et dont nous avons un jour fait l'expérience... Avec un tel niveau en langue et en sciences, comment espérer construire démocratiquement, c'est-à-dire en confrontant intelligemment les points de vue lors de discussions, une société meilleure ? Aristote l'avait compris : "l''ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit".


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