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Tourisme & Nouveau Modèle de Développement

Publié le 29 juillet 2021 par Fouzi53 @fouzi53

Tourisme & Nouveau Modèle de Développement

Le Rapport Général établi par la commission en charge du nouveau modèle de développement et présenté à SM le Roi à Fés cite le Tourisme à 26 reprises. De par son positionnement et en sa qualité de secteur économique transverse ayant participé à la dynamique de croissance en permettant la création d’emplois et en faisant émerger une classe moyenne, il demeure un élément important dans les fondamentaux macroéconomiques. Il est aussi un des premiers à avoir bénéficié d’une stratégie sectorielle (Vision 2010 et Vision 2020).

Le tourisme a permis l’émergence de certaines régions, qui par leur positionnement tant historique que culturel, ont pu s’installer et de manière durable comme destinations touristiques internationales à parts entières.

C’est le cas notamment de Marrakech et Essaouira qui dès la fin des années 60 ont su attirer une jeunesse européenne avide de découverte et d’expériences uniques à vivre, on les appelaient les Hippies adeptes du « Power Flower » et arborant le « Peace & Love ». Le « Way of life » marocain faisait déjà recette et les Riads de la médina, les artistes de la place Jemaa El-Fna, la musique Gnawa des maâlems Souiris et les créations des artisans des souks figuraient parmi les « must to know » au moins une fois dans sa vie.

Je me permets de faire un petit retour en arrière qui permettra aux néophytes de mieux comprendre la success story de Marrakech et région, non par nostalgie, mais juste pour le fun car lorsque on ne sait pas où on va, il bon de se rappeler d’où on vient.

Ce qu’il faut savoir, c’est que cette région n’a jamais été considérée par les différents plans quinquennaux comme destination touristique, mais plutôt une ville étape dans le fameux circuit des villes impériales. Ce sont ses visiteurs, la ténacité de ceux qui y ont toujours cru et la joie de vivre de sa population qui ont permis cette réussite.     

Le mouvement hippie a déclenché une frénésie sur la destination Maroc déjà magnifiée de par le passé par les peintres orientalistes tels Delacroix, Majorelle et à moindre mesure Matisse venu se ressourcer au siècle dernier à Tanger ou des personnalités comme Winston Churchill habitué de La Mamounia, qui s’adonnait aussi à la peinture à ses heures perdues, auraient laissé quelques toiles retraçant des scènes de la vie marocaine.

Puis il y eu la période des grands couturiers venus s’inspirer à Marrakech comme Pierre Balmain ou Yves St Laurent ayant illuminé la destination et inspiré tout un monde de créateurs marocains qui ont sublimé les costumes nationaux et plus particulièrement le Caftan, aujourd’hui une fierté et une identité dont on peut s’enorgueillir.

Ce qui est communément appelé  « la Jet Set » est apparue à Marrakech dés les années 70, se faisant discrète au début avec des figures emblématiques tels que Paul Getty Junior, puis de plus en plus apparente au fil des ans avec les Rolling Stones et Mick Jagger, Alain Delon et Mireille d’Arc, et tant d’autres célébrités du monde du cinéma, des arts, de la musique pop, du sport ou tout simplement du monde de la nuit.

L’attractivité de Marrakech s’est faite au fil des ans , pour ne pas dire au fil des siècles, ayant toujours été un carrefour de rencontres Nord-Sud et un lieu de villégiature prisé par tout ce que la planète compte d’artistes, philosophes, intellectuels, hommes de lettres et de lois.

Marrakech n’est pas une destination touristique, mais une destination à vivre pleinement et ce serait lui faire affront que de la qualifier de touristique avec tout ce que cette appellation à de consonance péjorative due au tourisme de masse qui malheureusement, s’est infiltré avec son lot de tares ne respectant ni les lieux, ni les personnes et tentant d’avilir ce que les destinations portent de plus noble : la dignité.

On ne peut pas venir à Marrakech en touriste, on y vient en esthète, en amoureux, en connaisseur, en mécène ou tout simplement en curieux. On ne peut pas seulement prendre, ont doit aussi donner et Marrakech et toute sa région donnent beaucoup et aspirent à récupérer un peu.  

Son succès participe malheureusement aussi à sa fragilité car elle reste dépendante du tourisme à 90% et cette pandémie a mis a nu son économie axée essentiellement sur l’activité touristique qui quant elle est prédominante, et qu’elle s’arrête, elle met en difficulté tout un écosystème et au-delà.   

Est ce que cette situation inédite était prévisible ? La réponse est oui, car comme pour les grands séismes, il y a toujours des signes précurseurs comme les différentes crises vécues par le secteur dont notamment la première guerre du golfe (17/01/91 au 28/02/91) qui a vu l’activité touristique s’arrêter du jour au lendemain, cela n’a duré que 45 jours, mais a laissé des stigmates.

Juste en se référant à l’adage qui recommande de « ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier », on n’a pas besoin d’être un stratège en économie pour prendre ses précautions et éviter de répéter les mêmes erreurs. Il faut croire que personne n’a retenu la leçon, car les crises étant limitées dans le temps et le tourisme ayant cette capacité de résilience et de rebond, on serait tenté de reprendre de plus belle et oublier les précautions d’usage. 

Le Rapport Général sur le Nouveau Modèle de développement, plus précisément concernant le secteur du tourisme, émet un certain nombre de recommandations issues certainement d’auditions d’experts et de rapports d’études élaborées par des grands cabinets.

On y parle notamment de « Repenser le secteur du tourisme au-delà des mesures de relance et à l’aune des tendances mondiales et de la nouvelle donne à la suite de la pandémie est essentiel.. »

On devrait donc réfléchir à des activités complémentaires au tourisme dans les régions déjà fortement impliquées et dotées d’infrastructures qui peuvent être utilisées autrement. Je m’explique :

Prenons le cas de l’enseignement supérieur et imaginons, des partenariats « Win Win » avec des grandes universités Anglaises, Canadiennes, Américaines et autres de ce qui se fait de mieux à l’échelle internationale.

Sachant que de plus en plus de jeunes bacheliers marocains s’expatrient pour faire leurs études supérieures vers ses pays, que cela coûte «  un bras » pour leurs familles donc pour le pays avec le risque que ces enfants ne retournent jamais au pays, ne serait-il pas plus judicieux que ces jeunes puissent faire leurs études au pays, dans les mêmes conditions et à moindre frais ?

L’ouverture de grandes écoles de formation aux métiers d’avenir serait une aubaine dans un environnement de qualité, sécurisé et offrant une multitude d’activités aux étudiants. Marrakech aujourd’hui dispose de suffisamment d’atouts pour attirer des étudiants aussi bien nationaux qu’internationaux et particulièrement d’Afrique francophone et anglophone.

La région de Marrakech a toutes les prédispositions pour devenir un Pôle Universitaire de renommée Mondiale. Outre l’Université Cadi Ayad (UCAM) à Marrakech et l’Université Mohamed VI (UM6P) à Benguerir, il y a déjà quelques pionniers comme l’école Supérieure de Commerce (Sup de Co), l’Université Privée de Marrakech ( UPM), HEM Marrakech, HEEC ,ENSA, ISTIM, IMM et j’en oublie certainement. Si on arrive a drainer les meilleures Universités anglophones, on pourra recruter jusqu’à 10 milles étudiants pour un cursus minimum de 3 ans et la possibilité de les retenir pour investir et s’investir dans la destination.

Transformer un certain nombre d’hôtels, aujourd’hui fermés, en campus résidentiels pour étudiants serait l’occasion de leur donner une seconde vie. Je pense aux hôtels à l’arrêt qui se trouvent à Semlalia face à l’UCAM et qui peineront à retrouver une clientèle touristique en l’état. Faire de ce lieu un quartier estudiantin serait bénéfique pour la ville et le pays. A proximité de la Faculté de Médecine, de l’UCAM, de la cité de l’Innovation, de la Faculté de sciences et Sup de Co avec des commerces de proximité, des cafés, des restaurants, des boutiques, des lieux de loisir, une belle bibliothèque etc… tout cela tenant compte du budget des étudiants devrait être possible à condition d’y croire.

L’autre possibilité qui nous tend les bras, c’est le déploiement d’une stratégie digitale qui fera émerger une économie numérique avec de nouveaux métiers qui s’intègreront dans l’écosystème et permettront une mise en valeur des produits avec des contenus de qualité à même de drainer directement une nouvelle clientèle pour vivre de nouvelles expériences tout aussi authentiques.

A ce sujet, je voudrai porter un témoignage suite à une expérience personnelle que j’ai vécue : Durant l’année 2019 j’ai découvert au milieu du quartier industriel Sidi Ghanem à Marrakech, un lieu fabuleux regroupant des startups de différentes tailles et leur offrant un espace de co-working leur permettant de se développer dans une ambiance très sympathique et dans l’ère du temps. Il s’agit de Emerging Business Factory, plus connu sous l’appellation EBF.

Porté par un être exceptionnel (sans complaisance aucune), Taoufik ABOUDIA qui m’a fait découvrir et apprécier une communauté hors pair , des jeunes marocains issus de l’école marocaine, des expatriés , des africains, des femmes et des hommes vivant en parfaite symbiose et produisant de la valeur ajoutée.

Une jeunesse férue et très dynamique que l’on trouve déjà dans des incubateurs régionaux qui mettent le pied à l’étrier à des jeunes startups impliquées dans des projets tels que la gestion de l’eau, la mise en valeur de nouveaux itinéraires touristiques, la préservation des espaces naturels, la lutte contre la pollution de l’air, la promotion d’une mobilité propre ou le développement de plateforme de distribution collaborative au service de tous les acteurs du cluster « tourisme-artisanat-terroir ».

Enfin, je souhaiterais terminer cette réflexion par un pendant au secteur du tourisme, car créateur de rêves et permettant l’évasion : Le Cinéma,  que l’on appelle aussi le 7eme art, s’est toujours intéressé à notre destination et plus spécialement Marrakech qui a inspiré de grands, voire très grands réalisateurs tels que Alfred Hitchcock, Martin Scorcèse, Oliver Stone, Philippe de Broca ou Stephen Sommers. Il semblerait que le premier film a été tourné en 1918 à Rhamnas et Marrakech, une fiction tirée d’une histoire vraie de l’époque du Vizir Ba Hmad.

Si Marrakech a aujourd’hui son festival du Cinéma, il serait légitime de développer cette industrie dans la région, car tout s’y prête, les paysages, les couleurs, la luminosité, la créativité de ses artisans et la disponibilité de sa population cinéphile de la première heure (Le Cinéma Eden a été ouvert en 1926).

Sans vouloir faire de l’ombre à Ouarzazate, Marrakech et sa région proposent des décors à ciel ouvert à même de drainer des superproductions. Il y a déjà un savoir faire qui ne demande qu’à s’exprimer et à se développer. Ce savoir faire est incarné par des Marrakchis connus à l’échelon international, Messieurs Karim Abouobayd , Jimmy Abounouom et Hafid Balafrej à la tète de Dune Films, qui a déjà à son actif plusieurs films et documentaires de grande facture.

Le tournage d’un film,  c’est des dizaines d’emplois créés, des milliers de dollars investis, des lits hôteliers occupés, des véhicules loués, des costumes créés, des repas consommés et surtout une notoriété pour la destination à l’international. L’industrie du Cinéma est un formidable boosteur d’économie.

Depuis mon immersion au sein de cette communauté de jeunes, je suis intimement convaincu que le salut viendra de notre jeunesse car des mutations majeures se profilent pour le secteur du tourisme qui devrait profiter de cette pandémie pour changer complètement de paradigme, opter pour l’inclusion et proposer toute une palette de nouveaux produits et services, liés à l’environnement naturel de notre destination : Le terroir, le sport, la culture, le médical, le bien être, le cinéma qui bien que ce soient des niches, sont aujourd’hui autant d’offres à haute valeur ajoutée à même de positionner la destination dans la durabilité.


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