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Chroniques d’un anthropologue au Japon (49)

Publié le 16 août 2021 par Antropologia

Lectures (2)

TV5 monde, juin 2021. Le reportage commence. Ils devraient être à l’école. Le ton est grave et déterminé. L’étudiante japonaise est concentrée sur les informations chiffrées qu’elle va pouvoir tirer de la vidéo de deux minutes. L’ONU s’inquiète que les enfants ne veuillent plus perdre leur temps sur les bancs scolaires. La faute au corona, à maman et papa, aux producteurs de cacao, la peau sur les os et plus une goutte d’eau. Eh, quoi. Pourquoi voulez-vous les faire à votre image ? Les rendre incapables d’utiliser leur corps pour créer, leur apprendre à préjuger avant même qu’ils ne sachent juger, les faire obéir, de peur qu’ils ne vous commandent.

Pour le travail des enfants. Emile, ou de l’éducation, Rousseau, GF flammarion (1966), p240.

En le promenant d’atelier en atelier, ne souffrez jamais qu’il voie aucun travail sans mettre lui-même la main à l’œuvre, ni qu’il en sorte sans savoir parfaitement la raison de tout ce qui s’y fait, ou du moins de tout ce qu’il a observé. Pour cela, travaillez vous-même, donnez-lui partout l’exemple ; pour le rendre maitre, soyez partout apprenti, et comptez qu’une heure de travail lui apprendra plus de choses qu’il n’en retiendrait d’un jour d’explications.

Contre l’école. Emile, ou de l’éducation, Rousseau, GF flammarion (1966), p204.

Quand je me figure un enfant de dix à douze ans, sain, vigoureux, bien formé pour son âge, il ne me fait pas naître une idée qui ne soit agréable, soit pour le présent, soit pour l’avenir : je le vois bouillant, vif, animé, sans soucis rongeant, sans longue et pénible prévoyance, tout entier à son être actuel, et jouissant d’une plénitude de vie qui semble vouloir s’étendre hors de lui. Je le prévois dans un autre âge, exerçant le sens, l’esprit, les forces qui se développent en lui de jour en jour, et dont il donne à chaque instant de nouveaux indices ; je le contemple enfant, et il me plaît ; je l’imagine homme et il me plaît davantage ; son sang ardent semble réchauffer le mien ; je crois vivre de sa vie et sa vivacité me rajeunit. L’heure sonne, quel changement ! A l’instant son oeil se ternit, sa gaieté s’efface ; adieu la joie, adieu les folâtres jeux. Un homme sévère et fâché le prend par la main, il dit gravement : allonsmonsieur, et l’emmène. Dans la chambre où ils entrent j’entrevoie des livres. Des livres ! Quel triste ameublement pour son âge ! Le pauvre enfant se laisse entrainer, tourne un œil de regret sur tout ce qui l’environne, se tait, et part, les yeux gonflés de pleurs qu’il n’ose répandre, et le cœur gros de soupirs qu’il n’ose exhaler.

Rémi Brun


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