Une rencontre authentique avec Inger, éleveuse de rennes

Me voici donc de retour à Alta, après y avoir été coincé 3 jours, avoir été à Kautokeino, avoir été pris en stop par un pêcheur écolo passionant et avoir rencontré Juhan, un jeune Sàmi qui m’a donné le numéro d’un de ses amis éleveur de rennes…Tout se précise !

Je me retrouve donc à Alta pour la énième fois et j’apprécie finalement de retrouver des repères : ce super restau étudiant pas cher oú, enfin, je peux manger des salades végétariennes super bonnes (!!!), le magnifique Fjord, parsemé de pluie et de rayons de lumières…

Je fais donc mon petit stop avec la pêche, bien déterminé à rencontrer ce jeune éleveur de rennes, Mahtte Niillas Gaup qui vit sur les plateaux menant au cap Nord. J’ai le pouce levé depuis à peine 5 minutes qu’une femme avec sa fille dans une vieille voiture s’arrête! J’embarque. Dans la voiture nous discutons et rapidement je lui dit que je travaillais sur le Riddu Riddu en temps que “film-maker” du Festival. Elle me regarde avec des grands yeux et me dit qu’elle y était aussi en tant qu’écrivain et conteuse ! Nous rions de nous être croisés là-bas et de nous croiser de nouveau. Elle me parle d’un autre Festival Sàmi qui a lieu à Harstad où elle sera aussi. Je lui raconte mon projet du peuple du Soleil, la BD, mon conte, les désirs de protection de la Nature que j’ai, pourquoi je suis ici. Elle me dit “Je suis à Alta pour une semaine, appelle-moi et je pourrais te parler de la Nature, des Sàmis“, on ne s’est pas rencontré pour rien je pense ! Très enjoué de cette rencontre, elle me dépose un peu plus loin dans Alta. Je regarde la carte qu’elle m’a donné, il y a écrit “journaliste, acupunctrice“. Excellente rencontre.

De là, un jeune homme me prend, il va vers le Cap Nord mais s’arrête une vingtaine de Kilomètres avant mon éleveur de rennes que j’ai appelé et qui m’attend. Il me dépose sur un air d’Autoroute ou il y a une petite boutique de souvenirs Sàmis. Cela ressemble à ça :

Me voyant, une femme d’une quarantaine d’années sort de sa minuscule maison et vient vers moi. Je dis que je n’ai pas de sous pour acheter, que je fais du stop et demande si je peux prendre des photos. Elle me dit oui, semble un peu méfiante et repars. Je prends quelques photos des bois de rennes, des peaux, des sacs, des chaussons, des poupées…Voici un patchwork de l’artisanat Sàmi, je jubile :

Je commence mon stop sur la route lorsqu’à un moment très calme apparaît de l’autre coté de la route un élan énorme, sans bois, une femelle donc. Je n’en crois pas mes yeux, c’est si beau ! Je la regarde marcher, me regarder. Puis un camion passe et elle fait demi-tour. Une rencontre magique…

Un peu plus tard une voiture s’arrête pour acheter des souvenirs, le papa ressort de la petite boutique ou il a acheté à la femme Sàmi des chaussons et me dit en me regardant “sorry, I have no place in my car !” (Désolé, je n’ai pas de place dans ma voiture). Je trouve ca super gentil de me dire ca spontanément. En tant normal, il ne m’aurait même pas regardé, les Norvégiens étant des gens plutôt timides. Ils part avec sa famille, le femme Sàmi s’approche de moi. Elle me dit “Je lui ai demandé, mais il n’a pas de place pour vous“. Je comprends alors son attitude et suis touché par son geste. Nous nous mettons à discuter, elle me raconte sa vie. Elle s’appelle Inger.

Les parents d’Inger lui ont dit “plus tard tu élèveras des rennes comme nous, tu partiras suivre les rennes dans ton Lavvú dès le début du printemps jusqu’à l’éte. Là tu résideras tous l’été dans ta maison d’été en vendant du rennes séché et des objets de notre culture car nous devons montrer que nous existons, que savons faire de belles choses. Là, tu pêcheras car ce qu’il y a dans les magasins ici n’est pas bon à manger. Le saumon sera là pour toi dans les rivières. Tu pêcheras aussi pour l’hiver. À la fin de l’été tu partiras avec ton Lavvú et suivras les rennes pour rejoindre Karasjok, dans les Terres, pour y passer l’hiver. Tu traverseras les plateaux, la Toundra, les rivières, les lacs, les montagnes, les canyons, accompagné de ta famille, des oiseaux, de tes chiens, avec un sourire sur ton visage et une étincelle dans tes yeux car tu sais que tu as de la chance d’être là, dans cette nature, sur cette Terre“.

Et c’est ce qu’Inger a fait et continue de faire depuis 30 ans avec son mari. J’ai les larmes aux yeux tellement je trouve ca beau. Je me rends compte que c’est ma première rencontre avec un Sàmi aussi proche de la nature, qui m’en parle avec délice et magie dans ces yeux bleux pétillants.

Il se met à pleuvoir. Elle me dit que je peux dormir sous le Lavvú si je veux. J’appelle Mahtte, je lui dis que je viens demain. Je m’installe sous le Lavvú, Inger me prépare le feu et m’explique ou me mettre. Elle n’arrête pas de me demander avec son anglais “Norvégianisé” : “Do you have meat, do you have meat ?“. Je trouve ça trop adorable. Je lui dis j’ai des pommes, merci ! Voici une petite photo sous le Lavvú. Je m’y endors bien au chaud… J’adore.