Trop petit, trop nombreux, trop exceptionnel
D’un coup, tout était devenu tout petit, les arènes pourtant habituées à la foule, l’espace autour d’elles, les rues, incapables de laisser passer les manifestants, la ville même dont le centre était contourné. Il est vrai que j’ai failli manquer le départ étant arrivé juste à l’heure, tant les chasseurs étaient pressés de partir. Je n’ai fait que suivre les voitures des autres qui m’ont conduit en périphérie sur le parking d’un grand magasin, à un kilomètre du lieu de rassemblement.
Après des discours plus ou moins audibles ou écoutés, il a fallu quitter la place, chose impossible étant donné la taille des rues. Entassés, piétinant, nous heurtant les uns les autres – ah ces maudits sacs à dos ! – nous avons pu enfin nous mettre en marche alors que la pluie recommençait à tomber. Parfois, nous retrouvions des chasseurs de la commune pour vite les perdre car il y avait toujours quelqu’un qui nous séparait. Après quelques kilomètres de marche, isolé dans la foule avec mon passager, son téléphone portable nous apprend que les autres étaient déjà revenus à leur auto. Nous décidons d’en faire de même en prenant des raccourcis mais à notre arrivée nous constatons que les autres étaient déjà partis préparer le repas alors que nous attendait un apéritif gratuit, surplus d’une récente noce. Au passage s’étaient joints à nous, des chasseurs d’une commune voisine et des Médocains.
Durant le long repas, la manifestation n’a fait l’objet d’aucun commentaire : il n’y avait pas de « mise en forme langagière », d’ « ordinaire », de l’événement qui venait de subvenir, trop vaste, trop exceptionnel, unique : 17 000 manifestants selon le journal pour défendre des techniques de chasses régionales interdites.
Bernard Traimond