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Veneno (Mini-series, 8 épisodes) : la mélodie des malheurs d'une femme transgenre

Publié le 07 octobre 2021 par Delromainzika @cabreakingnews

Alors que l’on m’en parle depuis un moment, je me suis enfin lancé dans Veneno. Cette icône transgenre espagnole avait défrayé la chronique dans les années 90 et était devenue une star dans son pays. Inconnue chez nous (en tout cas pour moi), j’ai découvert son récit au travers de huit épisodes à la vitesse d’une montagne russe. Créée par Javier Ambrossi et Javier Calvo (que l’on retrouve dans la série), Veneno est un récit sur une femme, travailleuse du sexe, qui de 1995 à 1997 a été la coqueluche des plateaux télévisés. Entre son style déjanté, son humour décalé et son franc-parler, elle ne passait pas inaperçu. Mais Veneno ce n’est pas seulement Veneno c’est aussi Cristina, une femme qui n’a pas eu la vie facile et la série est là pour rappeler que derrière les paillettes elle n’a au fond jamais réellement été heureuse. Ce récit n’est pas sans rappeler celui de beaucoup d’icônes et notamment une femme : Dalida. Si les deux femmes ne sont pas les mêmes et que leur parcours diffère, elles partagent toutes les deux une aventure de la vie douloureuse.

Etudiante en journalisme, Valeria vit l’aventure d’une vie en rencontrant son idôle, l'icône trans Cristina "La Veneno" Ortiz Rodríguez. Alors qu’elle commence à écrire les mémoires de Cristina, Valeria est embarquée dans une incroyable histoire rythmée par les tragédies, les victoires, les amitiés, les déceptions et le courage.

Afin de ne pas perdre le rythme, Veneno mélange les époques et jongle entre 2006 et des flashbacks. Que cela soit la jeunesse de la Veneno, son adolescence difficile, ses débuts en tant que prostituée, son opération et tous les scandales qui ont suivi son succès à la télévision avant sa chute inévitable. Mais Veneno reste un symbole qui a inspiré de nombreuses femmes transgenres à travers l’Espagne durant une époque où ce n’était pas aussi simple qu’aujourd’hui (et encore, il y a du chemin à parcourir). Grâce à une mise en scène soignée et inspirée, Veneno ne perd jamais le rythme. La série n’ennuie pas et garde à l’esprit l’envie de raconter cette histoire dans les moindres détails. Bien entendu la fiction vient accentuer certains traits comme Cristina a pu le faire lorsqu’elle a raconté son histoire à celle qui a écrit un livre sur elle. Maltraitée par sa mère, ses petits amis, ses clients, etc la Veneno a connu un parcours semé d’embûches. Certains moments, d’une violence extrême, viennent rattraper le spectateur et le rendent incapable de faire quoi que ce soit pour la sauver.

Je pense notamment à la scène de viol en prison (l’avant dernier épisode est terrifiant) ou encore l’arnaque à l’assurance qui l’a conduite en prison (avec cette histoire du chien dans le micro-ondes). Veneno se permet tout afin de retracer l’histoire de Cristina sans oublier ce qu’il y a eu de plus douloureux. Veneno c’est aussi la machine à rêves qu’était la télévision de l’époque. Esta noche cruzamos el Mississippi, émission de seconde partie de soirée, n’est pas sans faire écho à une autre émission peu glorieuse que l’on a eu en France : Tout est possible animée par Jean Marc Morandini. On retrouve ce même goût du scandale, des personnalités que l’on moque à la télévision pour l’audimat. Veneno n’est pas sans rappeler aussi les prémices de la télé-réalité avec les déboires que l’on a pu connaître en direct à la télévision.

Grâce à une écriture suffisamment subtile, voulant montrer avec réalisme ce qui s’est déroulé durant sa vie, Veneno ausculte ainsi le monde qui l’entoure. Que cela soit son petit ami italien prêt à tout pour utiliser la Veneno (aux dépends de cette dernière éperdument amoureuse), le talk show qui va l’utiliser à des fins d’audience, etc. Si l’on doit faire un bilan de Veneno, tous les gens qui l’on entouré n’ont jamais voulu son bien être en dehors d’une personne : Paca. Cette dernière, incarnée par la vraie Paca, a été son seul vrai soutien durant toutes ces années. Quand on sait que la vraie personne l’incarne, refaire toute l’histoire a dû être très douloureux et l’émotion ressentie est d’autant plus palpable. En seulement huit épisodes, Veneno nous fait traverser les époques et les rencontres, tout en évitant de tomber dans l’excès. Le but est de retracer la vie malheureuse de la Veneno, tout en montrant aussi ce qu’elle a fait de moins reluisant (les arnaques, les scandales, le porno, etc.).

Veneno fait ainsi le portrait d’une femme de l’époque, aux antipodes de ce que la femme représente. Le casting est quant à lui parfait. Les deux actrices incarnant la Veneno durant les deux époques sont parfaites et apportent au personnage quelque chose de bien plus touchant que je n’aurais pu l’imaginer. En tout cas, Veneno est l’une des révélations sérielles de cette année (diffusée l’an dernier en Espagne) et BrutX qui a débarqué dans le monde des plateformes récemment a fait ici une acquisition de choix.

Note : 9/10. En bref, un récit aussi fascinant que terrifiant et surtout terriblement émouvant.

Disponible sur BrutX


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