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"les maitres du feu". forgerons dans la tradition animiste en afrique(1)

Publié le 28 octobre 2021 par Regardeloigne

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« Laisse la tuyère manger rapidement, bangati banga,

 Laisse la tuyère manger rapidement, bangati banga, •

Un python vient avec ses amis, bangati banga. »

 


Chanson cadencée des forgerons  du centre nigeria accompagnant le rythme du soufflet. Dans « FRAPPER LE FER ». MUSEE DU QUAI BRANLY. ACTES SUD.

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Les artisans semblent avoir occupé dans les structures sociales traditionnelles africaines une place spéciale. C'est ainsi qu'on peut distinguer les sculpteurs sur bois, les potiers, les tisserands, les vanniers, les métallurgistes ". Mais dans les sociétés traditionnelles, à la première place, se situe le métier du fer.

« Presque partout en Afrique Noire où des enquêtes ethnologiques ont été menées et leurs résultats publiés, les chercheurs ont abordé l'un ou l'autre des aspects du travail de la forge, qui a toujours attiré l'attention, tant il est entouré d'interdits, de précautions techniques particulières. Il en est de même pour l'artisan dont le statut général et la vie quotidienne présentent des caractères spécifiques lorsqu'on compare sa vie à celle des autres travailleurs

En Afrique Occidentale, les forgerons forment généralement des groupes sociaux endogames. Ils sont indépendants, quasi internationaux — un forgeron est partout « chez lui » où se trouve une forge et peut s'établir là où il le désire, là où il est sollicité (x). Ils vivent en symbiose avec les peuples auprès desquels, pour lesquels, ils travaillent, dont les techniques de base diffèrent et sont soit la pêche, soit le pastorat, soit l'agriculture. »

Dieterlen Germaine. Contribution à l'étude des forgerons en Afrique Occidentale. In: École pratique des hautes études, Section des sciences religieuses. Annuaire 1965-1966. Tome 73. 1964. pp. 3-28

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L’abondante littérature archéologique et anthropologique sur le phénomène, atteste qu’elle a été déterminante dans la vie des Africains depuis lors. Les dynamiques sociales, culturelles, économiques, politiques, religieuses, environnementales, dont cette métallurgie a été le moteur sont multiples, et certains n’ont pas encore été étudiées. Le contexte social, économique et écologique du premier contact de l’homme avec le métal ; les représentations sociales de la métallurgie, les techniques d’élaboration et de transformation du fer en produits finis, la distribution et la consommation des objets, la symbolique de l’activité dans sa structuration sociale, , sont les principaux sujets de la recherche.

La métallurgie du fer apparait  comme l’une des premières formes de production industrielle véritablement structurée des moyens de production – infrastructures, matières premières, ressources humaines – et des mécanismes de distribution et de consommation.

C’est aussi avec la sidérurgie ancienne que la spécialisation économique, à peine perceptible au Néolithique, du fait de la confusion des rôles joués par les paysans, a pris corps, laissant se constituer et émerger la classe des fondeurs et la classe des forgerons, maîtres des secrets de l’élaboration et de la transformation du fer. Les nouvelles catégories sociales ainsi structurées se sont érigées en castes dans certaines régions du continent africain.

L’activité a donc été, sur l’ensemble du continent, un facteur important de cristallisation ou de lien social.  A l’inverse, et à certains moments, la production du fer a plus divisé que rassemblé, facteur de conflits et de déstructuration sociale.

  Il existe un débat acharné des archéologues sur l’origine de la métallurgique en Afrique.   La thèse dominante fut longtemps  diffusionniste postulant que l’industrie du fer aurait été introduite en Afrique depuis l’Asie occidentale via Carthage ou Méroé,  thèse souvent qualifiée,  de nos jours,  d’inspiration colonialiste. L’archéologie  aurait désormais  découvert  l’existence d’un ou de plusieurs foyers d’invention de la sidérurgie en Afrique de l’Ouest et du Centre, ainsi que dans la région des Grands Lacs, .comme le précise l’ouvrage de l’UNESCO/ Aux origines de la métallurgie du fer en Afrique, Une ancienneté méconnue : Afrique de l’Ouest et Afrique centrale.

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Selon cet ouvrage, des datations obtenues dans les années 1980 attestent que le travail du fer remonte au moins à 1500 av. J.-C. à Termit (Niger oriental), alors qu’en Tunisie ou en Nubie, il n’apparaît pas avant le 6e siècle av. J.-C. A l’ouest de Termit, dans la localité d’Egaro, les dates obtenues vont même au-delà de 2500 ans av. J.-C., ce qui définit la sidérurgie africaine comme contemporaine de celle du Moyen-Orient.

  En 2008 des résultats des fouilles menées par Étienne Zangato et ses collègues En  République Centrafricaine ont trouvé   une forge de métal, datée de 2000 ans avant J.-C. grâce à huit datations convergentes  . Cela ferait d'Ôbui le plus ancien site au monde où le fer aurait été travaillé et l'éloignerait de près d'un millénaire des autres preuves recueillies jusqu'alors en Afrique centrale. 

D’autres sites anciens  de la métallurgie du fer en Afrique de l'Ouest ont été relevés au Nigéria . Sur le plateau de Jos où sont exploitées des mines d'étain, est née la civilisation NOK, dans un rayon de plus de 100 kms (Jenaa, Wamba, Makafa, Tamga •••).

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Au site de Taruga, les figurines sont liées à des scories de fer et à du charbon qui ont permis de dater le travail du fer au C. 14 et de fixer l'âge du fer au IVe siècle avant J.C. De nombreux sites d'anciens villages de forgerons jalonnent le fleuve Sénégal: le cas de Rindiaw Sylla, ancien village de forgerons où il ne reste plus aujourd'hui que des traces de forges, des fragments de tuyères et d'abondantes scories, est des plus frappants. A plusieurs kilomètres de Rindiaw Sylla· Dans la boucle du Niger, l'on retrouve également des restes d'ateliers de forgerons du même type

Outre la technologie, naquit aussi  une histoire et une culture liées au fer. Ainsi, les Bantu se seraient  propagés à travers l’Afrique centrale  » grâce à la supériorité agricole que leur conférait la métallurgie pour défricher la grande forêt et à la supériorité militaire que leur procurait la possession d’armes en fer. Chez les Yoruba, l’unification du pays, sous la férule des partisans d’Oduduwa (10e siècle), s’expliquerait  en très grande partie par une supériorité militaire due à l’usage du fer,

 D’autre part, dans beaucoup de communautés,  ce métal présentait une si forte charge symbolique qu’il avait  été élevé au rang des divinités. En pays Yorouba (Nigéria), la forge est devenue le symbole de la royauté, à la fin du 9e siècle, et OGUN, le dieu du fer, la divinité tutélaire du royaume. Aujourd’hui encore Ogun est le patron de tous ceux qui exercent un métier lié au fer. Le rôle des forgerons est ainsi  crucial dans la tradition africaine. Dans la région du Yatenga (nord du Burkina Faso), l’ancêtre des forgerons, Bamogo, est considéré comme le sauveur de l’humanité. C’est lui qui aurait  fabriqué la lame servant à couper le cordon ombilical, la hache pour couper le bois, la pioche pour cultiver la terre ou creuser la tombe… autant d’ustensiles fondamentaux pour l’homme.

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"La vie a un bord, parfois tranchant, parfois émoussé. Découvrez le fer - qui creuse, coupe, perce, brille, rouille et se désintègre. Il est "né" lorsque la fonte l'a extrait de la roche, et dans un certain sens il possède sa propre vie. Le fer transforme les circonstances : les instruments forgés pro­longent les mains afin de réaliser toutes sortes d'efforts essentiels. Comment les Africains subsaha­riens ont-ils réalisé des processus aussi complexes, façonné à la main des fourneaux et créé du fer malléable pour faire évoluer leurs univers ? Quelles sciences basées sur 'observation ont-elles été maîtrisées, quels drames ont-ils été joués ? Comment les populations savaient-elles quel minerai choisir, quel bois couper, comment alimenter et contrôler des feux d'une intensité stupéfiante, néces­saires à la fonte du fer) ? Quels outils furent requis et grâce à quelles forces mystérieuses les fondeurs et les forgerons parvinrent-ils à les manier, généralement au prix d'un travail intense et épuisant? Qui savait quoi faire, comment marteler, quand tremper et quoi réchauffer? Pourquoi choisir cette forme pour une arme forgée ou symbole d'un statut social et pas une autre, et comment la perfection était et est-elle atteinte et reconnue ? Pourquoi les "technologies enchantées1" impli­quaient-elles des substances symboliques et des mouvements soigneusement chorégraphiés jugés nécessaires à la ferronnerie ».

Allen F. Roberts .introduction à« FRAPPER LE FER ». MUSEE DU QUAI BRANLY. ACTES SUD.

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 Pour sa part, L’anthropologie sociale a vu dans l’étude de  de la forge et du forgeron  un « Phénomène  Social Total » au sens de Mauss. La question du travail de la forge posait en effet  des questions telles que la production et ses modalités, la différence de statut social entre forgerons et agriculteurs, la place des  fonctions rituelles dévolues au forgeron et le rôle de la forge dans le système de pensée symbolique.

 Si l’on prend, par exemple, le rôle joué par les forgerons dans l'histoire politique, sociale et culturelle des peuples mandé (Soninké, Malinké, Dogon, Bambara, etc..) deux problématiques ne peuvent être évitées : celle de la différenciation sociale (et de l'usage de concept de caste) et  celle de la pensée  symbolique .L'image de la forge et du forgeron était  des clefs des vieilles religions du Mandé. Germaine Dieterlen a mis  ainsi en évidence un système symbolique reconnu par plusieurs sociétés d'Afrique occidentale, et au sein duquel la forge occupe une place centrale dans la  représentation mythique comme enclume primitive tombée du ciel  sous forme d’un aerolythe

« Nulle part en Afrique la sidérurgie n’est une activité banalisée. On ne peut la pratiquer sans précaution, elle n’implique pas la population dans son ensemble, et les métallurgistes ne représentent qu’une infime minorité ; ce sont parfois des étrangers. Cette technique est vécue comme une transgression de l’ordre des choses et des hommes. L’angoisse en résultant est évacuée, dans un premier temps, par les rites, les chants ou, inversement, le silence, par les jeux ou les sacrifices.. Les manipulations symboliques si nombreuses dans l’acte technique nous font supposer que l’homme craint la transformation de la matière". LA METALLURGIE DU FER : TECHNIQUE, SYMBOLIQUE ET SEMANTIQUE. Marie-Claude DUPRÉ” et BRUNO PINÇON

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DIFFERENTIATION SOCIALE :

Au 13 -ème siècle l'Empire Mandingue qui s'étendait de la Guinée (son berceau) aux frontières Tchadiennes, englobait l'actuel Mali, le sud du Sénégal, une partie du Burkina-Faso, le nord de la Cote d'Ivoire, du Ghana et une partie du sud-est Mauritanien. Cet empire s'organisait en castes et chacune correspondait à une profession ou à une activité artisanale: griots, forgerons, tisserands, pêcheurs esclaves etc.  Les castes d'artisans (.nyamakala, • manches à nyama , nom de  la force cosmique)  étaient craintes  à cause de leur pouvoir occulte. .Le forgeron fut,  dit-on  dans un lointain  passé le premier à se démarquer du reste de la population par son génie créateur.

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Nobles, griots, forgerons les castes africaines perdurèrent en milieu  rural et même de nos jours  il reste très difficile  pour les Keita, Coulibaly, Ba ou autres familles nobles d’épouser par exemple des Fane, Koumare, Balo ou Thiam forgerons. 

Professeur de psychologie à Bamako  Nambala KANTE est ainsi  né dans une caste de forgerons malinké   et devint apprenti pour exercer d’abord le métier de ses parents :

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« Aux yeux de mes parents, nous représentons une caste supérieure, car nous sommes les hommes les plus instruits, les premiers savants de nos sociétés. J'ai souvent entendu des propos de ce type : • Ce sont nos ancêtres qui ont su extraire et façonner le métal et l'argile, qui ont su tailler le bois, qui par la circoncision et l'excision ont permis aux enfants de répondre aux exigences de leur sexe, qui dans les sociétés secrètes du kômô ou du nama ont enseigné la connaissance aux adultes, qui ont noué et resserré les alliances, qui ont soigné les malades... Nous sommes les initiateurs dans tous les grands domaines de la vie sociale. Nous sommes la seule catégorie d'artisans à détenir les secrets de la terre et du feu. .."

« Les forgerons tiennent une grande place dans l'ima­ginaire des peuples d'Afrique de l'Ouest, et ils sont liés à d'autres groupes sociaux par des relations de taquine­rie comportant des interdits (Le parent à plaisante­rie commun à tous les forgerons est le Peul. Mais chaque lignée a en plus ses parents à elle à elle : les Kéita avec les Kanté, les Konaté avec les Coulibali, etc. Les paysans et les éleveurs considèrent le forgeron comme un homme exceptionnel par ses pouvoirs sor­ciers,  sa  force physique et sa virilité.  On dit que la grossesse d'une forgeronne dure de dix à onze mois, et il n'est pas rare d'entendre que ces enfants de caste naissent avec deux de leurs incisives, preuve évidente de leur aptitude à la sorcellerie ». FORGERONS D’AFRIQUE NOIRE NAMBALA KANTE . L’HARMATTAN

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.Le terme de caste, en voilant la multiplicité des rapports sociaux, obscurcit  pourtant la réalité plus qu'il ne permet de la comprendre. Il n’a pas le sens précis et restrictif du continent indien  Aussi parle –t-on plutôt d’un « genre  de caste » avec des précautions oratoires pour marquer une distance avec le schéma classique. Dans l'ethnographie ouest-africaine, le terme de caste le  plus répandue, consistait  à le réserver aux métiers spécialisés  quoiqu’il comportait  le plus souvent l’endogamie (mariage à l’intérieur du groupe primordial),  un statut hiérarchique, les emplois par famille,  et l’appartenance à ces derniers  de naissance. En fait, on n'avait  jamais affaire qu'à une conformité relative aux critères retenus comme caractéristiques de la caste : il ne s’agissait  ici que  d’une  supériorité (ou d'infériorité) relative, d'une endogamie relative et d'une spécialisation relative, Si par exemple,  les forgerons appartiennent le plus souvent à des clans spécialisés , cela  n'empêche pas un certain nombre des membres de ces clans", de ne pas pratiquer leur art et des membres d'autres clans de s'initier au travail de la forge et de le pratiquer dans des circonstances particulières comme la prescription d'un devin, ou le mariage avec des femmes forgeronnes,.
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 Si les familles de chefs observaient à l'égard des forgerons un interdit matrimonial strict, la prohibition était beaucoup moins nette pour les familles de modestes agriculteurs.

Les différences entre castes se sont  estompées, tout particulièrement au niveau des métiers exercés. Plusieurs sortes d'artisans appartenaient  d’ailleurs  à la caste des forgerons, comme les bijoutiers, les menuisiers, potiers et potières, teinturières.
Les forgerons étaient   eux même d’une grande polyvalence. Ils fabriquaient beaucoup d’outils agricoles et d’armes ( mais cette fabrication fut interdite à la période coloniale.) mais aussi des bijoux,  des bagues, des bracelets et des pendentifs. Ils façonnaient également des objets rituels, des figurines votives à représentations animales, particulièrement ceux qui font référence à la mythologie enfin les masques, lors de cérémonies initiatiques. Artisan du fer et du bois, le forgeron était encore traditionnellement puisatier, fossoyeur, (tâche peu valorisante) chirurgien, guérisseur, prêtre, thaumaturge et médiateur social..

Les Castes  dressent  bien  encore  une barrière matrimoniale, plus difficile à à franchir mais Nambala Kanté, par exemple,  épousera pourtant  une Peule contre l’avis de sa famille. Lui-même dans son livre résume les différentes fonctions liées à la « caste »  d’où il est issu et suggère leur affaiblissement dans la confrontation avec  l’islam

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« A la base, il y a bien entendu le travail du métal pour les hommes, celui de l'argile pour les femmes. Mais les forgerons ont aussi pour spécialité de tailler le bois. Grâce à leur amitié avec les djinns, ils sont devins et voyants. Ces dons leur ont permis la constitution d'une véritable médecine, et cela fait d'eux non seulement des guérisseurs,  mais  aussi  des  magiciens redoutables.  Ils gardent  le  secret  de  nombreux  poisons  et  antidotes. Pour renouveler   constamment  les  alliances  avec  les morts et les esprits de l'autre monde, ils procèdent à des rites. Dans les villages, ils sont chargés des cérémonies publiques.   En  ces  occasions  ils  sont  amenés  à  faire office de  généalogistes.  Ils  dirigent les  initiations des jeunes, les hommes s'occupant des circoncisions et les femmes des excisions. Ils sont les prêtres de la société initiatique  du   komo.  Ils sont chargés des médiations dans les mariages et les conflits villageois. Ce quasi-monopole de nombreuses activités sociales fait qu'ils sont entourés de respect et de crainte. Dans leurs alliances matrimoniales, ils veillent soigneusement à ne pas émousser leur pouvoir sorcier par des mélanges inconsidérés. Ce qui compte, c'est l'appartenance par le sang à un tel groupe, et non l'activité professionnelle qu'on exerce de fait : quand on est né dans la caste, on « est » forgeron, qu'on le veuille ou non. C'est le prin­cipe même de la caste, qui est plus qu'une simple corporation professionnelle. Souvent méprisés à la suite des campagnes de dénigrement tà l'égard des religions traditionnelles menées par les musulmans, les forgerons finissent par ne plus être connus qu'au travers du discours de leurs adversaires. Mais ce qui se raconte à leur sujet est souvent très éloigné de la réalité. Il est vrai qu'ils sont très rarement de bons musulmans, étant trop impliqués dans les pratiques anciennes. » FORGERONS D’AFRIQUE NOIRE NAMBALA KANTE . L’HARMATTAN

LE FORGERON ET LA FORGE TRADITIONNELLE : L’EXEMPLE MINYANKA :

Les Minyanka constituent une population qui habite le sud-est du Mali et une partie du Burkina Faso et de la Côte d'Ivoire. Ce sont  essentiellement des paysans.

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Avant la période coloniale, et même jusqu'à la dernière guerre, il a existé une petite industrie extractive du fer à partir de la latérite en pays minyanka. Les forgerons véritables se  livraient à l'extraction et à la fonte du minerai de fer. Celui-ci était abondant dans la région. Les premiers observateurs européens ont signalé la présence, en plusieurs endroits, de hauts fourneaux de petite taille, établis près des gisements les plus riches.
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Cette exploitation du fer a cessé au lendemain de la guerre devant la concurrence du fer européen produit et vendu à meilleur prix. On rencontre encore, dans les villages minyanka, des forgerons âgés qui ont participé ou assisté à l'extraction du minerai et à sa fonte.

Le  haut-fourneau traditionnel (kana) se présentait  comme une tour de briques de 2 m 50 de haut, avec une base d'environ 2 m de diamètre et une ouverture au sommet d'un mètre de diamètre. Le tirage était assuré par des tuyères de terre. A la base, des ouvertures permettaient l'écoulement du fer en fusion et l'évacuation des scories. L'opération de fonte durait  deux jours. Un feu de charbon de bois était allumé par le bas. Les forgerons chargeaient le fourneau par le haut, disposant en couches successives le minerai et le charbon de bois. Les scories étaient extraites à l'aide de crochets par les ouvertures pratiquées à la base. Le fer s'écoulait  dans un moule de terre en forme de tuyau. On le cassait  avec une hache spéciale. Il était ensuite  débarrassé de ses impuretés et de l'excès de carbone par martelage. Les Minyanka connaissaient  aussi la technique de la trempe.

Actuellement, l'extraction du minerai et la fonte a complètement disparu. Les forgerons travaillent à partir de la ferraille provenant d'objets manufacturés importés.

Traditionnellement un forgeron travaillait avec quatre outils de base outre le foyer : le marteau, l’enclume, la pince ,le soufflet

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La forge était  une petite case en terre. Le soufflet était  constitué de deux poteries percées incorporées dans une butte de terre et recouvertes de peaux de boucs. Aux orifices de ces poteries, on ajustait  un tuyau de bois fourchu (creusé au fer rouge). Le tronc de la fourche aboutissant au foyer de charbon de bois. Un apprenti forgeron actionnait  alternativement les peaux produisant  un souffle afin d'entretenir le foyer. Jadis, l'enclume était en pierre et une pièce de fer (sans manche) était utilisée comme marteau.

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« Au plus profond de chaque pièce en fer sub­siste la vie entière du cycle du fer. Pas à la périphérie de sa création, mais dans son noyau subatomique -depuis ses origines issues de la supernova aux méandres de son parcours dans le sang, de son usage le plus courant à son résultat le plus beau. Le fer existe dans un état de perpétuelle transforma­tion et le forgeron africain, comme partout ailleurs, a momentanément eu le privilège et l'immense res­ponsabilité de devoir élaborer des techniques pour son utilité avant qu'il passe, une fois encore, entre d'autres mains.

À l'image du marteau qui frappe, les objets qu'il a façonnés sont appelés à des actions décisives.

À l'image de l'enclume qui supporte et dévie, les objets forgés sur elle absorbent et rebondissent sous les secousses de l'impact fondateur.

À l'image de la pince qui agrippe, les objets qu'elle a protégés parviennent à affronter des situa­tions difficiles et dangereuses.

À l'image du soufflet qui respire, les objets ali­mentés par sa chaleur encouragent la vie au travers de créations qui viennent au monde."

« FRAPPER LE FER ». MUSEE DU QUAI BRANLY. ACTES SUD.

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RemerciementS pour les photos : LESLEY LABABIDI..copyright NOMAD4NOW 

A suivre


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