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La banque sans cœur devient réalité

Publié le 29 octobre 2021 par Patriceb @cestpasmonidee
BIANEn 2019, BIAN lançait le projet de concevoir un modèle de banque sans cœur. Deux ans et une crise sanitaire (avec ses conséquences sur la demande « digitale ») plus tard, les premiers résultats en étaient présentés au salon SIBOS. Voilà une occasion de revenir sur les enjeux de modernisation des systèmes existants, toujours aussi critiques.
Dans la lignée de la mission que s'est fixée l'association depuis ses origines, l'idée vise à réactualiser les pratiques d'architecture informatique en vigueur dans les grandes institutions financières, de manière à passer de la préhistoire des années 60, 70 et 80 à l'état de l'art de la décennie 2020, en profitant des évolutions technologiques qui ont émergé entre temps autant que des réflexions théoriques sur le sujet, dont une bonne partie sont en outre mises en œuvre avec succès (et validées) par les géants du web.
Or un des derniers bastions de résistance des temps anciens est justement ce « core banking », un système critique dont la vocation est d'établir une référence absolue pour un certain nombre d'opérations qui lui sont déléguées par les applications de l'entreprise (la principale étant la tenue de comptes). À une époque où tous les traitements étaient exécutés sur une machine unique, cette construction avait du sens. Aujourd'hui, les nouvelles contraintes de la banque en font un point de faiblesse majeur.
La mutation numérique du secteur a entraîné une explosion du nombre de logiciels, qui induit une pression extrême sur ce composant dont dépendent (presque) tous les autres et le place entre le marteau (des exigences de performance et de tenue en charge en forte croissance permanente) et l'enclume (du risque de d'interruption totale de l'activité en cas d'incident). En parallèle, sa position de carrefour incontournable du système d'information constitue un puissant frein à son remplacement, voire à son évolution.
BIAN Coreless Banking
Parce que ce cœur est un fardeau maintenant et qu'il le sera toujours, les mêmes problématiques revenant à chaque changement de génération, BIAN propose « tout simplement » de l'éliminer. En adoptant les approches modernes de conception des systèmes complexes, l'organisme lui substitue un modèle totalement décentralisé, où chaque composant métier conserve l'entière maîtrise de son périmètre et les besoins de consolidation sont pris en charge par le recours à un format d'échange standardisé.
La plate-forme qui vient d'être dévoilée apporte un avantage supplémentaire aux institutions qui rechignent à s'engager dans l'aventure du remplacement de leur « core banking » vieillissant. En effet, son rôle de passerelle entre systèmes, qui permet de convertir les messages des outils actuels vers sa spécification, autorise l'introduction progressive d'applications conformes à sa vision, sans remettre en cause le reste du patrimoine. La stratégie de migration incrémentale devient alors plus réaliste.
La promesse est attractive et ses fondations semblent objectivement solides… sur le papier. Cependant, a-t-elle quelque chance de convaincre les principales intéressées de se lancer ? De toute évidence, si le mouvement de transition vers ce type d'architecture se produit (avec ou sans la solution de BIAN), il sera extrêmement lent, pas tant en raison d'obstacles techniques que de la sorte de « révolution mentale » qu'il requiert de la part des équipes informatiques, habituées à un style identique depuis un demi-siècle.
Même au niveau d'une direction générale, l'idée d'abandonner le nœud central de gestion des données bancaires de base au profit d'une vue virtualisée, fédérant différentes sources, risque de susciter un certain malaise… Il faudra pourtant bien en passer par là pour envisager d'entrer dans la prochaine ère de l'industrie financière, avec ses défis de distribution par API, de services enfouis, de plates-formes… et, surtout, d'agilité face aux transformations de plus en plus rapides imposées par les attentes des clients.

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