Par-delà leurs différences d’expériences et d’identités, Ernest Breleur et Ifeoma Aneaji respectivement originaires de la Caraïbe française (Martinique) et du Nigéria dont les œuvres dialoguent dans les salles de Circa Art actuel (Canada), explorent langages artistiques et esthétiques témoignant de la diversité des identités noires. Comment ces artistes investissent-ils le champ de l’art contemporain ? Quel type de dialogue décolonial naît de leur rencontre ?

C IRCA art actuel, fondé en 1988 et initialement dédié à la céramique, devient en 1996 le Centre d’exposition CIRCA, se constitue en centre d’artistes autogéré et s’ouvre à l’art contemporain. C’est l’un des partenaires de la première édition de la Biennale Transnationale Noire, événement de promotion de l’art des afro-descendants aux Amériques. Un événement, initié et coordonné par le plasticien- chercheur Eddy Firmin, qui a pour objectifs de présenter en premier lieu aux publics québécois, canadien et international un art pluriel, puissant et riche mais aussi de mieux comprendre les diverses identités noires, d’en explorer les langages et les esthétiques, de les mettre en dialogue et d’éclairer les enjeux qui touchent ces communautés à travers leurs cultures et leurs productions artistiques.


Les expositions respectives d’Ernest Breleur, Le Vivant, passage par le féminin et d’Ifeoma Aneaji, Ezuhu Ezu (In[complet), du 30 octobre au 11 décembre, s’inscrivent au programme de la biennale . Expositions, performances, conférences réunissent vingt – trois artistes comme Jeannette Ehlers, Amartey Golding, Sharon Norwood, Jérôme Havre, Ernest Breleur, Marielle Plaisir, Kama La Mackerel, Zab Maboungou, Anna J.McIntyre, Dana Michel et Ngemba et bien d’autres.


C’est autour de la reconfiguration et de la re-contextualisation d’objets que dialoguent les œuvres de Breleur et d’Aneaji.
Artiste néo-traditionnelle nigériane, Ifeoma crée, à partir de sacs et de bouteilles en plastique non biodégradable, des sculptures et des installations complexes et organiques. Elle utilise des techniques non conventionnelles néanmoins associées à des processus artisanaux de tissage, de vannerie et de tressage de cheveux traditionnels. Des problématiques environnementales ne sont pas étrangères à son engagement. Ces sculptures et installations sont créées à partir de sacs en plastique jetés, récupérés et tressés, de ficelles, de bois et d’objets trouvés. Ces œuvres utilisent le processus Upcycling, un concept de réutilisation environnementale de rebus de la société de consommation.

Ernest Breleur privilégie plutôt la fonction poétique de l’objet et l’inscrit dans le champ de la légèreté, du ludique, de l’onirique. Cette série de formes verticales suspendues, légères et transparentes agrémentées d’une multiplicité de colifichets neufs très colorés prolongent une longue période exclusivement réservée au dessin sur la thématique de l’origine et de la dynamique de la vie. Ernest Breleur est un artiste prolifique. Son œuvre est polymorphe. En 2015 dans ses nouvelles créations, il abandonne la radiographie, introduit la couleur ainsi que des objets féminins qu’il combine avec des matériaux transparents et réfléchissants. Il interroge le mystère du féminin, célèbre la prolifération, la multiplicité et laisse la place au rêve et à l’imagination.

C’est un dialogue inattendu entre deux univers profondément différents qui parfois se croisent. Et la biennale proposent d’autres mises en dialogue à voir sur son site.
