De vraies réformes sont indispensables à la France en vue de réconcilier les citoyens avec la République et la justice sociale mais elles n’auront pas vu le jour sous ce quinquennat qui s'achève.A défaut de véritables réformes institutionnelle, sociale, fiscale, hospitalière, etc., Emmanuel Macron s'est contenté de faire quelques réformettes comme celle de l'Assurance chômage visant d'abord à réaliser des économies budgétaires...
Les vraies réformes dont la France a besoin ont toujours été renvoyées aux calendes grecques depuis plusieurs dizaines d'années par tous les gouvernements successifs et celui d’Emmanuel Macron n’échappe pas à la règle.
Un mot de Pierre Mendes France en son temps reste toujours d’une profonde actualité : " si les réformes nécessaires au pays ne sont pas engagées dans les six premiers mois qui suivent l'arrivée au pouvoir d'un nouveau gouvernement, elles ne se font jamais ".
Faire une vraie réforme fiscale
Accroître la progressivité de l'impôt sur le revenu (IR)
L'IR souffre d'un manque cruel de progressivité avec seulement 5 tranches d’imposition. La simple diminution des dispositifs dérogatoires qui permettent une déduction du revenu imposable et le rétablissement des quatorze tranches d'imposition, supprimées par Laurent Fabius, ministre des finances en 2000, permettraient de rétablir une réelle progressivité de l'IR et de dégager des recettes nettement supérieures à celles rapportées actuellement chaque année.
Fusionner la CSG et la CRDS avec l'IRPP
La CSG (contribution sociale généralisée) mais aussi la CRDS (contribution pour le remboursement de la dette sociale) rapportent plus que l’IR mais elles s’appliquent avec un taux proportionnel, identique pour tous. Or, un taux progressif est celui qui répond le mieux à l’esprit de l’article 13 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 (un impôt en fonction des « facultés » de chacun).
Fusionner les contributions CSG et CRDS avec l'IR, pour en faire un large impôt progressif acquitté par tous, serait donc une mesure positive et juste car outre les bienfaits de la progressivité, la nouvelle assiette de la CSG et CRDS reposerait sur le revenu fiscal des personnes physiques au lieu et place principalement des salaires.
Supprimer le quotient familial
L’IR est calculé en fonction du quotient familial (QF) qui est un mécanisme qui prend en compte la taille de la famille mais qui a pour défaut de subventionner davantage les familles riches que les familles pauvres, la réduction d'impôt étant proportionnelle au revenu dans la limite d'un plafond.
Que la France abandonne le QF, qui n’est plus appliqué en Europe que par le Luxembourg et la Suisse et qu’elle adopte une déduction d'impôt uniforme pour chaque enfant comme le font déjà la Belgique, le Canada, l’Espagne, la Hongrie, l’Italie, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la République tchèque et l’Allemagne, ne serait donc pas déraisonnable.
Réformer le quotient conjugal
L’IR est modulé aussi en fonction du quotient conjugal (QC) qui consiste à diviser la somme des revenus d'un couple par deux avant de lui appliquer le barème progressif. La conséquence de ce système est double : il réduit fortement l'impôt des couples aisés dont l'un des membres - le plus souvent la femme - ne travaille pas ou très peu, avec une réduction d'impôt d'autant plus élevée que le revenu principal est important.
Pour un même revenu, ces couples sont ainsi avantagés au détriment des célibataires, des personnes séparées, des veufs et veuves ou encore des familles monoparentales qui doivent pourtant faire face à des dépenses de vie courante plus élevées qu'un couple.
Réduire drastiquement les niches fiscales
En 2018, 457 niches fiscales représentaient, d'après le Trésor, un montant dépassant pour la première fois les 100 milliards d'euros (100,4 milliards d'euros), en hausse de 7 milliards par rapport à 2017. Si quelques niches répondent à un souci d'équité ou à des mesures économiquement utiles, la plupart d'entre elles sont complètement inutiles et permettent surtout à une minorité de personnes de réduire fortement leur imposition tout en se constituant un patrimoine important.
Emmanuel Macron, qui est hostile à une réduction drastique des niches fiscales, n'imagine pas un seul instant qu’avec une récupération même partielle de ces recettes perdues, on réglerait une bonne fois pour toute la charge des intérêts annuels de la dette publique…
Lutter contre la fraude et l'optimisation fiscale
La fraude fiscale, par son ampleur et ses caractéristiques (le dernier rapport du principal syndicat des Finances publiques, Solidaires-Finances, indique que celle-ci aurait grimpé à 100 milliards € annuels, et ce sans comptabiliser les fraudes aux prélèvements sociaux) réduit fortement les rentrées fiscales et accentue les inégalités, sans parler de l'optimisation fiscale qui fait le bonheur des avocats d'affaires (20 milliards € de manque à gagner fiscal dus aux jongleries d'optimisation). Ce sont essentiellement les grosses entreprises et les riches particuliers qui en bénéficient car ils peuvent faire de gros investissements déductibles de l’impôt ou user de l’existence des paradis fiscaux.
Ainsi non seulement la fraude fiscale perdure mais son montant annuel est supérieur à ce que rapporte l'impôt sur le revenu !
Lutter contre les paradis fiscaux en France et en Europe
L’Europe compte en son sein de nombreux paradis fiscaux sans que les partis européistes béats de droite ou de gauche (LREM, Modem, UDI, Radicaux, Verts, LR, PS), s’en offusquent le moins du monde : Andorre, Campione, Chypre, Gibraltar, Guernesey, Ile de Man, Irlande, Jersey, Liechtenstein, Luxembourg, Madère, Malte, Monaco, Sercq, Suisse.
Dans son livre (Enquête au cœur de l'évasion fiscale), le journaliste Antoine Peillon a croisé différentes sources pour estimer à 590 milliards € l'ensemble des avoirs français dissimulés dans les paradis fiscaux, dont 220 milliards € appartenant aux Français les plus riches (le reste étant le fait d'entreprises). Environ la moitié de ce total serait dissimulé en Suisse.
Réduire les impôts indirects
Emmanuel Macron a notamment abusé en 2018 de la vieille technique d’augmentation des impôts indirects et des taxes, utilisée depuis de nombreuses années par tous les gouvernements pour compenser la faiblesse des rentrées fiscales issues de l'impôt sur le revenu (IR) ou de l'impôt sur les sociétés (IS) : taxes sur les assurances, l'audiovisuel, le carburant, les certificats d'immatriculation et le contrôle technique des véhicules, le gaz, l'électricité (les impôts et taxes atteignent 54% sur les factures d'électricité), l'immobilier, les jeux, les mutuelles, le soda, les spectacles, le tabac, les alcools, les transports, le prix des timbres,
Ces impôts indirects sont d’autant plus injustes qu’ils touchent sans distinction tous les foyers, y compris ceux, qui à cause de la faiblesse de leurs revenus, ne sont pas assujettis à l'IR (plus de 50% des foyers). Ils deviennent ainsi de moins en moins lourds au fur et à mesure que le contribuable est plus aisé.
Le plus important d'entre eux, la TVA (53,9% des recettes budgétaires) rapporte plus de 2 fois l’IR (25,2%). Si l’on y ajoute la TICPE (4,7%) et les autres contributions indirectes (6,9%), ce sont plus de 65% des recettes fiscales qui proviennent d’impôts indirects !
Mettre fin au racket des sociétés d'autoroutes
La route est un bien public mais comme toujours, les missions de service public confiées à des opérateurs privés, à l'image d'autres secteurs économiques, se traduisent par une augmentation non justifiée des prix au détriment des utilisateurs ou des consommateurs.
Aujourd'hui, non seulement les péages autoroutiers continuent d’augmenter régulièrement mais sur deux tronçons d'autoroute à peu près identiques en longueur, le prix du péage au kilomètre peut varier de 1 à 5.
Les automobilistes attendent donc toujours l’annulation pure et simple des privatisations des sociétés d'autoroutes et leur rachat par l’Etat au prix où elles ont été vendues en 2006 mais Emmanuel Macron entend bien continuer à privatiser massivement au nom de la sacro-sainte libéralisation des services, chère à l'Union européenne…
Créer un grand service public de l'eau
L’eau se situe aujourd’hui à la convergence d’enjeux économiques, sociaux, territoriaux et environnementaux qui sont indissociables, à cause notamment du réchauffement climatique et de l'élévation de la température moyenne.
Si la France n’est pas touchée heureusement par ce désastre, le quasi-monopole exercé par quelques opérateurs privés sur un service public essentiel est de plus en plus contesté en raison de multiples dérives et de restrictions d'eau de plus en plus fréquentes.
Mettre fin à l’existence de milliers de prix différents, sortir d’une ère d’inquiétude et de soupçon, voire de corruption du personnel politique lors de l’attribution des marchés, la maîtrise de la gestion de l’eau (potabilisation, distribution, assainissement) devrait être nationale, voire locale (communes ou syndicats intercommunaux).
L’eau, c’est la vie et la vie, c’est un droit. Une raison supplémentaire pour créer un grand service public de l’eau pour toutes les communes sans exception afin de rétablir une égalité entre citoyens.
Etc.
Mais aujourd’hui, la force de la République réside plus dans la capacité de réaction de ses citoyens que dans les mises en scène et mensonges gouvernementaux ou journalistiques.
Redonner des perspectives d’action crédibles à l’ensemble des citoyens pour faire face à la crise sanitaire, sociale, écologique et démocratique qu’elle entraîne, voilà ce que l’on peut souhaiter de mieux pour l'année 2022.
Que cette nouvelle année apporte à toutes et à tous bonheur et santé avec une pensée particulière pour tous ceux qui sont seuls, malades ou dans la peine…
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