comme un boomerang

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"Je ne vais pas vous parler d'Ukraine, un mot qui commence comme uchronie et finit par haine.comme si la haine devait finir.Je ne vais pas vous parler d'Ukraine, car il faudrait dire ses mots qui heurtent le silence, la bonne et mauvaise conscience, guerre, invasion, agression, bombardement, frappe chirurgicale-tiens-donc-sur des hôpitaux, sur des malades, sur des enfants brandissant des panneaux: "Stop the war"il faudrait dire la super impuissance des super puissances, notre paralysie, les bras désarmés de l'occident ,car ni l'OTAN, ni l'Europe, ni l'Amérique n'ont mandat pour sauver l'Ukraine et encore moins les ukrainiens.Alors, pas question dans ces deux minutes chrono de vous parler d'Ukraine qui rime avec peine, avec sirène, avec obscène.il faudrait sinon regarder en face le passé qui fracasse le présent: colonnes de chars, peur qu'il soit trop tard, oukase du Kremlin qui de l'Ukraine veut faire son écrin; corps de civils sans vie, ensevelis dans la neige immaculée froide des tranchées, images d'un autre âge, images d'un outrage.Ce matin, la terre n'est pas bleue comme une orange.Le fond de l'air a des reflets nucléaire et un gogol aux yeux vitreux voudrait changer Marioupol en milliers d'âmes mortes.Alors, plutôt parler du printemps qui vient doucement, mais ce mots de printemps a un ptit air de Prague vous ne trouvez-pas?et revoilà les chars russes et revoilà l'Ukraine, tel le sparadrap du capitaine Haddock.Nous voilà dans de beaux draps. Rien ne va plus, ma vision se trouble. tout à l'heure en marchant jusqu'à vous d'un pas tranquille, Augustin, j'ai vu la tour Eiffel , les quatre fers en l'air et la maison ronde de la radio qui ne tournait plus très rond-mauvaises ondes-Fallait-il que jusqu'ici sous le pont Mirabeau coule la haine? Cette fois, c'est promis je ne vous parlerai pas d'Ukraine. Croyez-moi sur parole, c'est vrai, ça craint l'Ukraine, rien qui craigne plus que l'Ukraine, j'en ai même entendu qui prononcent Ukraigne.Mais voilà que le sabler a mitraillé ma carte blanche-blanc comme neige maculés du sang des innocents et l'Ukraine que je m'étais juré d'éloigner de ce micro me revient en pleine tête, comme un boomerang."Eric Fottorino  et sa carte blanche dans "Boomerang", l'émission d'Augustin Trapenard. Lundi 7 mars 2022