Le médiateur bancaire britannique a infligé une sanction à Santander pour avoir, entre 2019 et 2020, déployé sur sa plate-forme web un système d'authentification forte (requis par la réglementation) qui requérait un téléphone mobile, les seules alternatives qu'elle proposait à défaut étant une visite en agence ou un appel au centre de contact.
Plusieurs personnes avaient engagé une procédure contre l'établissement pour discrimination, au motif qu'elles ne pouvaient plus accéder à leurs comptes en ligne après l'entrée en vigueur du nouveau dispositif de protection. En effet, celui-ci ne leur offrait que deux options, certes classiques : la ressaisie d'un code envoyé par SMS ou la validation d'identification via l'application mobile de l'enseigne. Elles se voient aujourd'hui octroyer une indemnisation de quelques centaines de livres sterling chacune.
Pour une des victimes, souffrant d'un handicap physique et incapable de quitter son domicile, la banque à distance constitue la seule solution viable. Elle a obtenu 600 livres de dédommagement. Pour (beaucoup, apparemment) d'autres, la rancœur est aggravée par le vaste mouvement de fermeture d'agences en cours sur l'ensemble du territoire, qui rend ce canal impraticable pour une partie de la population, sans parler des restrictions imposées par la pandémie et des temps d'attente insupportables au téléphone.
Un aspect notable de l'affaire est qu'elle invoque une ségrégation entre autres par l'âge, considérant que ce sont les seniors qui étaient directement pénalisés par les décisions de Santander. À l'opposé des clichés habituels, le raisonnement sous-jacent est que ces individus sont a minima aussi susceptibles que d'autres d'avoir besoin d'accéder à leurs comptes par internet mais qu'ils sont moins adeptes du téléphone mobile… ou qu'ils vivent dans des zones (rurales, en particulier) mal couvertes par les réseaux.
Les enseignements à tirer de la mésaventure sont multiples. D'une part, il faut probablement incriminer un manque de réactivité et d'agilité de la part de la banque dans sa capacité à répondre rapidement à la demande de ses clients, dont les plaintes lui sont certainement parvenues très vite. D'autre part, elle a sous-estimé l'impact de ses choix, ce qui résulte vraisemblablement d'une connaissance et d'une compréhension imparfaites des usages, du contexte et des besoins des utilisateurs de ses outils en ligne.
Il est vrai que, en la matière, Santander a peut-être eu tendance à trop se fier au stéréotype, désormais dépassé, qui voudrait que les plus de 60 ans soient réfractaires aux services « digitaux ». Or, les idées préconçues de ce genre sont d'autant plus dangereuses quand elles sont appliquées à des clients existants. En arrière-plan, se dessine aussi clairement une prise de pouvoir des consommateurs : ils exigent, avec toujours plus d'insistance, la personnalisation de leur relation avec leurs fournisseurs, en l'occurrence à la fois vis-à-vis du média d'interaction et de la méthode de connexion.