Les nombreux échecs rencontrés au fil de leur histoire conduisent bien des entreprises à reculer le plus tard possible leurs grands projets de transformation, quitte à fragiliser leur situation. Pourtant, arrive toujours un moment où il faut franchir le pas. Jim Marous évoque pour The Financial Brand une méthode originale afin de réduire les risques.
Le principe s'inspire directement de l'exercice mieux connu de l'autopsie (post-mortem en anglais) des chantiers importants. Réalisée à leur issue, qu'elle soit positive ou non, elle vise à documenter les facteurs de succès comme les raisons expliquant les ratés, de manière à ce que l'expérience ainsi accumulée profite aux successeurs. Bien sûr, rares sont les organisations qui formalisent ce genre de pratiques car elle est fréquemment perçue comme une mise en lumière d'erreurs individuelles nuisibles aux carrières.
Dans l'optique, cette fois, d'anticiper les pièges qui guettent un projet avant son lancement, la nouvelle idée consiste à orchestrer une sorte de « pré-autopsie » (premortem). Concrètement, au cours d'une session de simulation, conviant tous les intervenants à s'imaginer quelques mois plus tard, quand leur travail est terminé, l'hypothèse de l'aboutissement à un désastre total est prise comme postulat de départ et chacun est alors invité à soumettre son analyse des causes de ce résultat.
Naturellement, rien n'empêche aujourd'hui les participants de formuler leurs réserves et leurs inquiétudes par rapport au plan qui a été préparé. Mais soyons réalistes, ceux-là sont rarement écoutés, notamment dans l'euphorie du démarrage. La valeur de l'approche proposée réside dans la conversion des réactions négatives ponctuelles en une séance de créativité collaborative, au sein de laquelle, en outre, tous ont une voix égale, quels que soient leur rang hiérarchique, leur rôle, leurs antécédents et leur psychologie.
Pour atteindre ce but, l'animateur désigné met en place et fait respecter quelques règles du jeu. D'abord, les objectifs du projet considéré doivent être parfaitement clairs pour l'ensemble de l'équipe. Ensuite, les motifs de fiasco envisagés sont tous collectés et mis en commun sans discussion, avant d'être évalués un par un, pour identification des plus sérieux, ceux qui sont le plus susceptibles d'avoir un impact négatif. Des solutions sont alors dessinées afin de les atténuer et un suivi est instauré dans la durée.
Au terme du processus, l'entreprise gagne une vision extensive (et évolutive) des risques encourus, beaucoup plus concrète et utile que les classiques listes de problèmes potentiels présentes dans les fiches de pilotage, auxquelles personne ne se réfère jamais. Encore faut-il pour que la démarche produise ses bénéfices que les collaborateurs impliqués se sentent suffisamment en confiance pour exprimer leurs opinions, en sachant qu'elles seront écoutées et prises en compte. Toujours une question de culture…