Magazine Finances

finance internationale & économie mondiale : Peut-on et comment ? stopper la “vague folle”…

Publié le 11 août 2008 par Kamizole

traders-independants-figaro-5-aout-2008-reduite.1218450139.jpgJ’ai lu récemment avec beaucoup d’intérêt une interview alarmiste de Jacques Attali donnée au Monde sur la crise économique actuelle et ses possibles conséquences.

Jacques Attali : “Pour l’économie, la crise est un tsunami qui approche”
LE MONDE | 08.08.08

©

finance internationale & économie mondiale :  Peut-on et comment ? stopper la “vague folle”…

Comme vous n’aurez peut-être pas le courage de me lire en entier, je signale tout de suite un article excellent, paru récemment sur le blog “Not zugzwang” : « Mode panique ».
De l’interview de Jacques Attali, je dirais néanmoins que si le diagnostic - un “tsunami” qui s’approche - et le traitement : il faut re-réguler et au niveau international autant que national, me paraissent adéquats, il se trompe tout à fait sur l’anamnèse de la maladie : les “instruments économiques et financiers” dont il loue les qualités (il n’est pas revenu semble-t-il de son aveu-glement dogmatique…) sont précisément ceux qui ont rendu possibles toutes ces dérives successives qui nous mènent aujourd’hui tout droit dans le mur.
Comment ne pas être d’accord avec Jacques Attali quand il énonce à juste titre «que cette crise démontre l’impossibilité de laisser la finance se réguler seule.» ? Il est évident que les banques et autres institutions financières et “traders” n’avaient aucun intérêt à instaurer et suivre des règles contraignantes qui eussent limité leur course folle dans la spéculation et la mobilisation de masses toujours plus importantes de produits financiers, de plus en plus opaques et sophistiqués.
Ces mécanismes et pratiques sont bien entendu le résultat de la “mondialisation” de la finance rendue possible par le “big bang” intervenu dans les années 80 : on abolit toutes les règles, et bien évidemment liée à la révolution informatique : il suffit de quelques “clics” pour que des sommes astronomiques - mais totalement virtuelles - s’échangent à travers la planète à la vitesse de la lumière.
Dire que la finance est devenue alors totalement déconnectée de l’économie réelle et des territoires où continuent de vivre les “vrais gens” relève du pur euphémisme.
Pourquoi parlé-je de “l’aveuglement dogmatique” de Jacques Attali ?
Je relève deux affirmations (et même une troisième qui concerne l’avenir).

  • «Le système financier a été un instrument génial pour organiser la globalisation, le transfert depuis les pays qui ont de l’épargne vers les pays où investir.»
  • Il resterait à démontrer que la globalisation soit aussi géniale qu’il le suppose… Quant aux transferts de liquités vers les pays où investir, nous savons bien que cela s’est traduit par les délocalisations massives et la désindustrialisation non moins massive.
    Priver d’emplois qualifiés des millions de personnes pour les transformer en larbins des temps modernes…

  • “La titrisation (une innovation financière qui a permis aux banques de transférer les risques de crédit aux marchés) en a été l’un des outils.”
  • “Mais à partir du moment où il n’a plus été au service de l’économie de marché mais au service de lui-même, pour réaliser des profits, le système a dérapé et il n’y avait personne pour l’en empêcher”.
    Pourquoi seulement parler de “l’économie de marché” ? dont on sait bien qu’il s’agit là d’un des noeuds du problème… ce n’est pas le “marché” en tant que tel, puisqu’il faut bien que les richesses et les produits s’échangent pour qu’il y ait commerce, qu’il soit national, régional ou international, mais ce que sous-tend en dernière analyse ce terme d’économie de marché qui ne prend son sens entier que dans la perspective de la globalisation : tout, absolument tout, devient objet de commerce.
    Certains ont pu parler à bon droit “d’idéologie de marché” qui exclut la gratuité, et toute forme de solidarité, qu’elle soit associative ou dans le cadre des services publics.
    La “titrisation” était un système pervers dès l’origine. Point n’est besoin d’être grand clerc pour se rendre compte qu’elle n’avait aucun lien avec l’économie réelle et les besoins des êtres humains.
    Si l’on veut bien se souvenir de l’étymologie d’économie : “administration de la maison” bien curieuse est cette “demeure” - aujorud’hui la planète entière - où l’homme et ses besoins réels ont si peu de part !
    Dès l’origine, la titrisation n’avait pour ultime but que la création de profits financiers toujours plus importants, pour le seul avantage d’une poignée de décideurs et spéculateurs.
    En outre, en fractionnant à l’infini les créances (parfois des plus “douteuses”) prétendument pour limiter et répartir les risques, mais dans la plus grande opacité : aujourd’hui des spécialistes s’avouent incapables d’analyser ces supports financiers ! ces mécanismes ont donné la pleine mesure de leur dangerosité en cas de retournement conjoncturel.
    La crise des “morgate subrimes” en est l’illustration la plus achevée : elle s’étend par contagion à toutes les banques et institutions financières d’un bout à l’autre de la planète. Et multiplie les risques d’une récession grave, bien au-delà des Etats-Unis.
    Le pire est très certainement devant nous…

  • «Aujourd’hui, tout l’argent du monde se trouve entre les mains des fonds souverains. Ils sont devenus des investisseurs sophistiqués. Pour la plupart, ils sont des acteurs utiles et pratiquent un capitalisme patient. Nous sommes les cigales ; ils sont les fourmis.»
  • Si les fameux “fonds d’investissement” ont pu être qualifiés de “rapaces”, que dire de ces “fonds souverains” ! Pour une bonne compréhension, je précise que, contrairement aux fonds d’investissements et autres fonds de pension qui relèvent du privé, les fonds souverains sont pilotés par les Etats, qu’ils appartiennent aux pétro-monarchies ou aux pays émergents exportateurs (surtout la Chine).
    Jacques Attali ajoute toutefois (sursaut de lucidité ?) : «Même si l’on ne peut exclure que certains d’entre eux aient des ambitions politiques plus ou moins acceptables».
    Il est évident que les autorités chinoises n’ont qu’une seule ambition : devenir les maîtres du monde.
    Et pour mieux mettre “la main au collet” des dirigeants de tous les pays de la planète, quel meilleur moyen que de tout piller : ressources, emplois, bons du Trésor et autres actifs financiers (surtout la dette des Etats !).
    «acteurs utiles et pratiquant un capitalisme patient» ?
    Allons donc ! Encore une fois Jacques Attali rêve debout… Ils sont absolument nuisibles (ils ne sont utiles que pour les spéculateurs dont il font d’ailleurs partie) et quant au “capitalisme patient”, ce n’est vrai qu’en termes “d’accumulation du capital” et des moyens pour y parvenir, pan par pan, faire tomber toute la richesse de l’économie mondiale dans leur escarcelle.
    Pour le reste, c’est faire un maximum de flouze, toujours plus et toujours plus vite… Tous les moyens étant bons, y compris dans les procès de fabrication, peu importe qu’ils fabriquent de la m… dont ils nous inondent. La quantité au détriment de la qualité. Les exemples sont tellement nombreux que je renonce à les citer une fois de plus. Tant pis s’ils mettent en cause la sécurité des personnes ! Peu leur chaut.
    Or donc, Jacques Attali en appelle à la régulation, notamment par le biais du FMI. Ce qui semble des plus logiques. Mais celui-ci sera-t-il doté de pouvoirs suffisants ?
    Pour mémoire, il a été crée au sortir de la seconde guerre mondiale (accords de Bretton Woods) précisément pour éviter des débâcles financières analogues à celle de 1929 qui contribua plus que largement à l’évènement du nazisme et de la conflagration mondiale qui s’en suivit.
    Le capitalisme financier est-il réformable ? Prêt à revenir à de saines pratiques, sans attendre une catastrophe “terminale” (au sens où on l’en entend d’un cancer invasif…).
    Il me semble que les acteurs de la finance internationale n’en soient à une fuite en avant qui ne saurait que nous précipiter davantage dans le mur… en faisant tout pour échapper à des contrôles. J’en veux pour preuve un article paru récemment dans le Figaro : «Les traders s’affranchissent des banques». Des “salles de marché” et/ou des traiders indépendants ne me semblent guère le meilleur moyen d’introduire des règles de bonne pratique. Je suis au demeurant encore plus sceptique quand je lis : «certains traders indépendants viennent du secteur des jeux vidéo, qui ont un sens intuitif et une aisance avec l’informatique qui sont très importants dans le métier de trader».
    Ont-ils la capacité intellectuelle et humaine pour se rendre compte que cela n’a rien à voir avec un jeu vidéo… Que leurs décisions d’acheter ou de vendre tels ou tels actifs, ont des répercussions sur la vie de milliards d’êtres humains ?
    Enfin, Jacques Attali souligne que la crise actuelle aurait pu être évitée si l’on avait pas laissé se développer des produits tels que les CDS (Credit Default Swap), les ABS (Asset Backed Securities) et tous les instruments des subprimes par lesquels les banques se sont refinancées à coût nul en transférant leur risque sur le marché.
    Un article récent du Figaro «États-Unis : le scandale des ARS ébranle la finance» porte précisément sur le mécanisme des ARS (autre produit financier) qui sont des obligations dont le taux d’intérêt payé par l’emprunteur est fixé chaque semaine ou chaque mois par une procédure d’enchères. Or, le système s’est emballé et au lieu de payer des taux d’intérêt alignés sur les emprunts à court terme pour des dettes à très long terme - 20 ou trente ans - les emprunteurs - particuliers, entreprises et collectivités locales - devraient aujourd’hui payer des intérêts astronomiques.
    Les banques qui les ont poussés à emprunter dans ce cadre sont aujourd’hui sous le coup de procédures judiciaires et d’une enquête du gendarme de la bourse américaine, la SEC et du ministre de la Justice de l’État de New York, Andrew Cuomo.
    J’ai lu dernièrement dans Le Monde (mais je n’ai pas conservé la référence exacte) que les collectivités locales françaises sont de la même façon étranglées aujourd’hui par le poids des dettes à long terme qui ont grimpé de la même façon.
    Hélas, je doute qu’en France les pouvoirs publics fassent entendre raison aux banques et autres institutions de crédit !


    Retour à La Une de Logo Paperblog

    A propos de l’auteur


    Kamizole 786 partages Voir son profil
    Voir son blog

    l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte