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« Un comble ! Les patrons seront bientôt obligés de respecter leurs employés»

Publié le 26 juillet 2022 par Guy Deridet

Un article, au second degré évidemment, de Samuel Piquet pour l'hebdo Marianne.net. Que j'apprécie personnellement de plus en plus. Et, croyez bien que par les temps qui courent, il y a très peu de médias grand public que j'apprécie.



« Un comble ! Les patrons seront bientôt obligés de respecter leurs employés» « Un comble ! Les patrons seront bientôt obligés de respecter leurs employés» Retour de flemme, par Samuel Piquet
pour Marianne.net


Publié le 24/07/2022 à 13:00

Comment se fait-il que l’on ne trouve plus de personnes désireuses de travailler « dix heures d’affilée avec une pause déjeuner d’une demi-heure pour 1 500 € net » ou « sept jours sur sept », comme le racontaient d’anciens employés ? Incompréhensible. Plutôt que de nous plaindre de la fuite des cerveaux, commençons par déplorer celle des serveurs.

Serveurs, chauffeurs de bus, profs : autant de métiers que les Français sont devenus trop fainéants pour exercer ? Il semble en tout cas que ceux qui ont le courage de traverser la rue ne courent plus les rues. Pour preuve, dans un article du Point intitulé « Où est passé le goût de l’effort ? », un recruteur déplore la fainéantise des Gaulois réfractaires et explique : « Les gens ne veulent plus travailler le soir et le week-end. » On croit rêver, et pourquoi pas bénéficier de congés tant qu’on y est ? Le Figaro aussi s’émeut de la situation dans un article intitulé « La galère des restaurateurs pour recruter ». Le propriétaire d’un restaurant du XVIIe arrondissement de Paris déclare même : « Je prends des pincettes avec mon personnel. J’y réfléchis à deux fois avant de faire une remarque désagréable à untel ou untel, de peur qu’il ne prenne ses cliques et ses claques. Je sais par avance que j’aurai un mal fou à le remplacer ! » Si ça continue, il faudra bientôt respecter ses employés. Un comble !

Les serveurs ont pourtant la chance d’être souvent en terrasse. Or ne vaut-il pas mieux arpenter le trottoir que le faire ? On offre à tous ces jeunes qui ne rêvent que de devenir influenceurs et de côtoyer les stars la chance inouïe de côtoyer la clientèle parisienne et ils la dédaignent ! Hélas, il semble que, dans cette société de tire-au-flanc, tous les prétextes soient bons pour ne rien faire. Comment se fait-il que l’on ne trouve plus de personnes désireuses de travailler « dix heures d’affilée avec une pause déjeuner d’une demi-heure pour 1 500 € net » ou « sept jours sur sept » comme le racontaient d’anciens employés au Parisien dans un article intitulé « Recherche serveurs désespérément » ? Incompréhensible. Plutôt que de nous plaindre de la fuite des cerveaux, commençons par déplorer celle des serveurs.

QUE LA PARESSE DISPARAISSE

Rendez-vous compte, même le métier de prof avec son lot indécent de jours de vacances n’attire plus. Travailler la moitié de l’année est devenu trop fatigant, et ça n’intéresse pas ceux qui ne sont rien de devenir quelque chose. La pénurie touche tous les domaines : on ne trouve plus, par exemple, de chauffeurs de bus. Qui, pourtant, n’a jamais rêvé de sillonner la Grande Borne, le Clos Saint-Lazare ou les quartiers nord de Marseille et de visiter des lieux aussi exotiques que La Courneuve ou Villeneuve-la-Garenne ? Après tout, la Plaine Saint-Denis vaut bien la plaine du Pô, et la colline d’Argenteuil, celles de Pagnol.

En outre, a-t-on jamais vu plus enrichissant que d’aller « au contact » de la population, quitte à ce que ce contact soit parfois un peu rude ? Mais non, sous prétexte que beaucoup se voient proposer un contrat annuel de huit cents heures, avec un taux horaire de 11,37 € non cumulable avec un autre emploi, ils préfèrent aller voir ailleurs. À cause de ces feignasses, ce sont près de 8 000 conducteurs qui risquent de manquer à la rentrée. Et nos enfants alors ? Les chauffeurs de bus se moquent du tiers comme du car.

Pis, quand le président tend généreusement la main aux jeunes désœuvrés, ils lui signifient qu’ils préfèrent faire l’aumône eux-mêmes. D’un côté, ils sont obnubilés par la quête de l’argent facile, et, de l’autre, ils refusent de mettre d’Uber dans les épinards. Indolents et ingrats. Pour eux, tout est prétexte à ranimer la flemme. Et quel manque d’ambition ! La foi peut pourtant, comme le disait Crésus, déplacer les montagnes de billets. Encore faut-il vouloir aller au sommet pour décrocher l’Uber hit. Mais les Français sont égoïstes et ils n’ont aucune considération pour les enfants des actionnaires. Quand chacun défend son pré carré, on ne chasse pas la précarité.

On aurait d’ailleurs tort de penser que cette pénurie ne touche que les patrons. Depuis plusieurs mois, ma femme, Marie-Chantal, et moi-même éprouvons les pires difficultés à trouver du petit personnel, et celui-ci est par ailleurs, nous l’avons remarqué tous deux, de moins en moins docile. Les Français et le goût de l’effort ne font décidément pas bon ménage. Il y a trois semaines, ma femme a même dû préparer elle-même le repas, c’était extrêmement humiliant. Quelle sera la prochaine étape ? Laver une assiette à la main ? Pauvre France ! Il faudra du temps avant que la paresse disparaisse.



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