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[📝Edito] Libéralisme et crise climatique : la fin de l’écologie apolitique ?

Publié le 24 novembre 2022 par Michael Vincent @0vinz

Après plusieurs décennies de discours climato-sceptiques, de doutes sur l'existence du dérèglement climatique, de déni sur la responsabilité humaine de son origine, le constat et la prise de conscience ont largement évolué dans le bon sens et on peut entendre de plus en plus souvent que l'écologie est en train de gagner la bataille culturelle. A défaut cependant d'avoir encore gagné la bataille politique.

C'est que de ce côté-là, les lignes sont brouillées depuis longtemps. Beaucoup disent que l'écologie est un problème transversal, trop grave pour se cantonner à une seule nuance politique ou à un seul camp (c'est certainement vrai), d'autres s'efforcent à dire que l'écologie ce n'est ni de droite ni de gauche (ça l'est déjà moins) ou ont cherché à la différencier de la gauche, certains allant jusqu'à proposer une écologie "centriste", parfois "libérale" ou même compatible avec le capitalisme (et là, on rêve).

Le problème avec l'écologie apolitique, c'est qu'elle peine à pointer du doigt le problème. Certes, la crise climatique, l'incertitude pour le futur, et les perspectives de changements peuvent être déstabilisantes voire anxiogènes. L'un des nombreux défis de l'écologie politique est de proposer un discours plus rassurant, porteur d'espoir et d'un futur désirable. C'est possiblement l'une des raisons pour laquelle la politique mainstream souvent dévoient les mots de l'écologie pour que rien ne change. La "sobriété" redéfinie comme façon de gérer les pénuries par exemple, ou encore la couleur verte, formule magique quand utilisée comme adjectif qui permettrait de tout faire comme avant mais dans le respect de la trajectoire climatique soutenable : la croissance verte, la finance verte, les carburants verts ... Tout cela pour finalement se poser le moins de questions possibles sur les objectifs que nous voulons vraiment nous fixer en tant que société et les pratiques que nous devons stopper.

Ce verdissement lexical permet de cacher ce qui nous bloque, ce qui nous empêche de bifurquer : la nécessité de changer le système économique, que l'on a laissé s'organiser autour du capitalisme et du libéralisme, consacrant le profit pour le profit, les inégalités, l'accumulation, le court-termisme, l'extraction et l'exploitation des ressources et faisant fi des limites planétaires. Le libéralisme est d'ailleurs lui aussi un concept souvent dévoyé, où l'on confond sa définition philosophique avec sa vision plus économique ou politique. Parfois utilisé comme insulte, ou mal compris par d'autres comme excuse pour conserver sa "liberté absolue" de prendre l'avion, de conduire un SUV ou de manger de la viande.

Il est parfois très intéressant de les écouter, pour comprendre pourquoi ils présentent ce courant de pensée comme un idéal. C'est ce que j'ai fait, à deux occasions récentes : Sur Inter chez Thomas Legrand, et du côté belge avec Bruno Colmant. Tous font le constat suivant : fervents ou ex-fervents libéraux, ils sont forcés de constater que le libéralisme est incompatible avec le défi climatique et le besoin d'une transition écologique et solidaire. Historiquement, la pensée libérale s'est fondée sur l'idée d'un monde infini et du progrès éternel - en contradiction directe avec l'état du monde et la gravité du problème que nous rencontrons aujourd'hui, qui justifie une prise de contrôle centralisée des activités et de la production. Allant jusqu'à se demander si le libéralisme n'est pas finalement mort dans l'écologie. Dans la bouche de libéraux, forcément, ça décoiffe.

Une bonne foi rare qui fait du bien à entendre, et qui pourrait bien être le début d'une autre victoire culturelle de l'écologie, mais cette fois, aux conséquences politiques très intéressantes...

[📝Edito] Libéralisme et crise climatique : la fin de l’écologie apolitique ?


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