Si vous vous lassez de mes exhortations récurrentes à la mise en place par les banques d'approches de conseil proactif, en considérant qu'il ne s'agit que d'élucubrations autour d'idées théoriques totalement inapplicables sur le terrain, découvrez aujourd'hui avec moi cette initiative originale de Barclays au Royaume-Uni… vieille de six ans.
Ciblant spécifiquement les personnes en risque de fragilité, il n'est guère surprenant que le dispositif revienne actuellement sur le devant de la scène, dans le sillage de l'enchaînement entre crise sanitaire et pouvoir d'achat en berne. L'objectif de la banque consiste à prendre les devants, si possible avant que la catastrophe n'intervienne, et à offrir un espace de dialogue ouvert à tous ceux, nombreux, qui, par exemple, n'ont pas conscience de la gravité de leur situation ou hésitent à parler de leurs difficultés.
En amont, des algorithmes relativement sophistiqués (mais à la portée de n'importe quelle équipe de scientifiques de données digne de ce nom) analysent les transactions enregistrées sur les comptes et estiment les impacts futurs des tendances macro-économiques sur le budget, telles que l'augmentation des prix de l'énergie, des loyers ou des emprunts hypothécaires. Le résultat est un véritable modèle prédictif de bien-être financier qui permet d'identifier le danger d'évolution de chaque client vers la précarité.
Une fois la détection réalisée, une cellule d'accompagnement dédiée prend le relais. Dans un premier temps, un SMS est envoyé aux individus les plus exposés afin de leur donner l'opportunité d'échanger avec un conseiller. Il leur suffit de répondre positivement, immédiatement ou trois mois plus tard (le temps de se décider), pour être rappelé (dans les 24 heures) et engager une conversation sur leurs préoccupations financières, même hors du strict périmètre de la banque, et obtenir des recommandations ad hoc.
Lancée en 2016 avec un minimum de moyens, la démarche s'est étoffée au fil des ans. Barclays indique désormais envoyer 40 000 messages de support proactif chaque semaine et avoir contacté un total de 4,6 millions de personnes dans ce contexte. Dans certains cas, l'aide reçue est perçue comme une bouée de sauvetage, à l'instar de cette travailleuse indépendante qui ne parvenait plus à joindre les deux bouts jusqu'à ce que, aiguillée par un expert, elle découvre son éligibilité à une subvention salutaire.
À travers cette expérience, l'anticipation des besoins des clients et la prise d'initiative associée font clairement la démonstration de leur faisabilité. Il ne fait, en outre, aucun doute, après six ans de fonctionnement, que la banque y trouve un bénéfice substantiel, au-delà de l'impact pour son image de marque, vraisemblablement dans une meilleure maîtrise de la délinquance provoquée par les difficultés budgétaires.
Il ne me reste qu'à regretter que l'assistance proposée ne soit accessible que par l'intermédiaire de conseillers. Cet aspect réjouira indubitablement les inconditionnels de la relation humaine, mais il ignore hélas les individus qui n'oseront jamais évoquer leurs tracas et leurs angoisses au téléphone ou en face à face et seraient certainement plus susceptibles d'interagir avec un logiciel, quitte à ce qu'il ne soit pas aussi performant.