C’est en effet une nouvelle méthode qui permet de localiser avec précision l'activité des gènes et les protéines dans les tissus et pourrait révolutionner les immunothérapies, que nous présente cette équipe de généticiens de la Weill Cornell Medicine (New York) : la nouvelle technologie, documentée dans la revue Nature Biology, identifie les identités et les activités des cellules dans un organe ou une tumeur, à un niveau de résolution sans précédent.
En « pratique », la méthode enregistre les modèles d'activité des gènes et la présence de protéines clés dans les cellules, à partir d’échantillons de tissus ou biopsies, et apporte, de surcroît, de précieuses informations sur les emplacements précis des cellules. Cette technique permet ensuite de développer une véritable « carte » de l'organe et de la tumeur, exploitable en recherche fondamentale et/ou en pratique clinique.
« Une technologie passionnante », commente l’auteur principal, le Dr Dan Landau, professeur agrégé de médecine à la Weill Cornell Medicine et chercheur au New York Genome Center, « car elle nous permet de cartographier l'organisation spatiale des tissus, dont les différents types de cellules, leurs activités et interactions ».
Observer à l’échelle moléculaire l’activité moléculaire et cellulaire d’un organe ou d’un tissu
La recherche fait en effet partie des efforts et des progrès, ces dernières années, dans les techniques de profilage de l'activité des gènes et de recueil d’informations sur des cellules individuelles ou de petits groupe ou types de cellules. La plupart du temps, ces techniques nécessitent généralement de « dissoudre » les tissus analysés et de séparer les cellules les unes des autres, ce qui implique la perte de toutes les informations sur les emplacements d'origine de ces cellules. Ce n’est pas le cas de cette nouvelle méthode qui capture également ces informations spatiales et à haute résolution.
Un point essentiel lorsqu’il s’agit du microenvironnement tumoral.
La méthode, appelée Spatial PrOtein and Transcriptome Sequencing (SPOTS), est basée en partie sur une technologie (10x Genomics) existante. La technique utilise des lames de verre qui conviennent à l'imagerie d'échantillons de tissus mais qui sont également recouvertes de milliers de molécules de sonde spéciales. Chacune de ces molécules sondes contient un « code-barres » moléculaire indiquant sa position bidimensionnelle sur la lame. Lorsqu'un échantillon de tissu finement tranché est placé sur la lame et que ses cellules sont rendues perméables, les molécules de sonde sur la lame attrapent les ARN messagers (ARNm) des cellules adjacentes, qui sont essentiellement les transcrits des gènes actifs. La méthode comprend l'utilisation d'anticorps qui se lient aux protéines d'intérêt dans le tissu et se lient également aux molécules de sonde spéciales. Grâce à des techniques rapides et automatisées, les chercheurs peuvent ainsi identifier les ARNm capturés et les protéines sélectionnées, et cartographier précisément leurs emplacements d'origine dans la biopsie.
La première preuve de concept est apportée avec la cartographie à l’échelle moléculaire d’une rate de souris normale et cette cartographie révèle bien l'architecture fonctionnelle complexe de l’organe, ses différents types de cellules, leurs fonctions et la façon dont ces différents états fonctionnels varient en fonction de l'emplacement des cellules.
Un potentiel considérable dans la recherche sur le cancer : on l’aura compris, la méthode a de implications énormes pour l’analyse et le traitement des cancers, et l’amélioration des immunothérapies. Ici, les chercheurs cartographient ainsi l'organisation cellulaire d'une tumeur mammaire-toujours chez la souris. Ils obtiennent une carte avec des cellules immunitaires dans un état actif et combattant la tumeur ou au contraire, formant une barrière pour protéger la tumeur.
« Ces 2 sous-ensembles de macrophages se trouvent dans différentes zones de la tumeur et interagissent avec des cellules différentes. L’outil nous permet ainsi de mieux comprendre les caractéristiques du microenvironnement tumoral, probablement à l'origine de ces 2 états fonctionnels, anti et pro-tumoral ».
De tels détails sur l'environnement immunitaire de la tumeur
vont également contribuer à expliquer pourquoi certains patients répondent aux immunothérapies et d’autres pas, et donc éclairer la conception de futures immunothérapies plus efficaces ou mieux ciblées.
Source: Nature Biotechnology 2 Jan, 2023 DOI : 10.1038/s41587-022-01536-3 Integration of whole transcriptome spatial profiling with protein markers
Plus sur l’Immunothérapie
Équipe de rédaction SantélogAvr 7, 2023Rédaction Santé log