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Apprendre autrement : Les écoles alternatives au Québec

Publié le 06 juillet 2023 par Raymondviger

L'école traditionnelle, avec ses bancs d'école et sa discipline rigide, n'est pas pour tout le monde.

Certains élèves apprennent mieux dans un environnement plus libre, moins structuré. En donnant aux élèves plus d'indépendance et d'espace pour apprendre, une école alternative aide les élèves à développer de meilleures habitudes d'étude, tout en leur offrant un espace pour grandir.

On compte maintenant 48 écoles alternatives publiques au Québec, rassemblées sous la bannière du Réseau des écoles publiques alternatives du Québec (REPAQ), dont la grande majorité sont des écoles primaires. Mais qu'est-ce qu'une " école alternative "? Est-ce que c'est une école hippie sans discipline où les jeunes peuvent faire ce qu'ils veulent?

" Le terme alternative, quand il est collé aux écoles, avait pour but de créer une communauté, le même que quand c'est employé dans la médecine et dans l'économie. Les enseignants et les parents sont des accompagnateurs. Le plus important, c'est de développer l'autonomie et le goût d'apprendre de l'élève. " dit Pierre Chénier, porte-parole pour le REPAQ, il explique, " Le paradigme n'est pas la transmission des savoirs, c'est l'apprentissage au rythme de l'élève... on fait des voyages ensemble, on fait des projets ensemble. "

De plus, les écoles alternatives ne font pas le tri de leurs élèves, contrairement aux écoles à programme alternatif (des écoles alternatives curriculum) telles que les écoles d'art et les écoles de sport.

L'évaluation est multipartite, continue et rigoureuse visant à soutenir l'apprentissage; un processus qui implique l'élève, les pairs, les enseignants, les parents et les autres intervenants d'une école publique alternative. Le jugement et l'évaluation se bâtissent au quotidien à l'aide d'outils variés et connus des élèves et des parents : ils sont intimement liés aux projets et activités vécues en classe, selon les documents du REPAQ.

Comment établir une école alternative dans un quartier? Ça prend l'effort des parents, qui font une demande à leur Centre de services scolaires (ou Commission scolaire pour les anglophones). En moyenne, ça prend deux ans pour qu'un tel effort porte fruit, selon Chénier. Actuellement, il y aurait 20 projets en cours à travers la province. " Bâtir à partir d'un besoin, " est le principe, comme Chénier le raconte. Si vous êtes intéressé à créer une telle école dans votre quartier des conseils sur la marche à suivre sont disponibles sur le site-web du REPAQ.

Et les écoles alternatives ont eu une influence sur l'éducation dans des écoles plus traditionnelles, selon Chénier. Il rappelle que Pauline Marois, ministre de l'éducation pendant la " réforme Marois " en 1997, a dit que ces changements ont été " inspirés largement de vous " parlant des écoles alternatives.

L'école alternative offre aux enfants des outils afin de les guider vers l'autonomie, la responsabilité et l'engagement dans leur réussite scolaire et sociale. L'école alternative guide chaque enfant pour atteindre les objectifs du programme du Ministère, mais en les abordant différemment.

L'approche pédagogique diffère d'une école alternative à l'autre, chacune ayant sa propre personnalité , mais elles ont en commun de favoriser ce qu'on appelle une pédagogie ouverte, qui privilégie la responsabilisation de l'élève dans sa démarche d'apprentissage et le développement de son autonomie. Les parents participent aux réflexions, décisions et actions de l'école alternative.

Une école dans le bois

Une école dans le petit village de Saint-Mathieu-du-Parc, 15 kilomètres à l'ouest de Shawinigan, en plein milieu de la forêt de la Mauricie, est un leader sur l'échelle provinciale. Le village compte parmi ses attraits un paysage magnifique et un environnement unique comptant plus de 80 lacs, de nombreuses forêts et des montagnes - et une école au primaire et au secondaire créée par des citoyens et des citoyennes.

Fin juin 2004, l'école du village de St-Mathieu-du-Parc ferme ses portes, faute d'un nombre d'élève qu'ils jugeaient suffisant la fréquentant. Sans école, les enfants de la municipalité furent donc dirigés vers le village voisin, St-Gérard-des-Laurentides. Devant ce sort qui était jeté, un groupe de parents a décidé de former un comité responsable de bâtir un projet innovant à présenter à la Commission scolaire de l'Énergie (aujourd'hui le Centre de services scolaires de l'Énergie). Comme cette dernière n'avait aucune école alternative sur son territoire, cette avenue fut donc privilégiée. Quelques mois plus tard, un projet de qualité était présenté et en septembre 2005, un an après sa fermeture, l'école accueillait à nouveau des enfants du village et des alentours.

​Lors de sa première année, l'école comptait 63 élèves entre ses murs. Lors de sa réouverture, l'école portait toujours le nom d'école Centrale de Saint-Mathieu-du-Parc. Afin de trouver un nom qui représente mieux leur identité, un concours fut organisé pendant l'année scolaire. C'est Marie-Soleil Boisvert, élève de deuxième année, qui a trouvé le nouveau nom : École alternative de la Tortue-des-Bois. Elle a eu cette idée, car le village héberge une des plus grandes populations de tortues des bois au Canada, une espèce en péril.

Aujourd'hui elle compte 86 élèves de la maternelle jusqu'à la 6 e année. Leur école-sœur à Shawinigan, l'École alternative de l'Énergie, compte 120 élèves de la maternelle jusqu'à la 6 e année et 20 élèves de plus en secondaire 1. Ils vont agrandir l'école année par année jusqu'à qu'ils auront 125 élèves en secondaire.

Stéphane Robitaille est le directeur dynamique d'une école pas comme les autres depuis son ouverture, ainsi que directeur de l'école alternative de l'Énergie à Shawinigan depuis son ouverture en 2017. " C'est la famille, " il nous explique. " La famille au cœur d'une école. "

Apprentissages concrètes

Marlène Bonneville, qui a deux enfants inscris à l'École de l'Énergie, parle du fait qu'il y a " des apprentissages actifs et concrets " dans une école alternative. " C'est sûr que ce que je voulais le plus pour mes enfants au primaire c'est qu'ils aimaient aller à l'école, qu'ils aiment apprendre, qu'ils prenaient goût à aller à l'école. Donc, je trouvais qu'à l'école alternative ça met beaucoup à l'avant les apprentissages actifs. "

De plus, elle aime que " le parent soit impliqué, qu'on pouvait avoir une belle cohésion entre qu'est-ce qui s'est passé à l'école et qu'est-ce qui s'est passé à la maison. "

En effet, les parents sont obligés de consacrer un certain nombre d'heures en aidant leurs enfants à apprendre au fil de l'année scolaire. " Il y a certains qui donnent beaucoup plus qu'ils sont obligés " dit Robitaille - comme Mme Bonneville.

Posant la question à Robitaille et Bonneville si c'est plus difficile d'établir et de maintenir une école alternative à la campagne par rapport à dans une grande ville, ni un ni l'autre croyait que les enjeux seraient différents. L'important c'est que les familles établissent cette communauté et pratiquent l'entraide. C'est un travail d'équipe. " Ça prend un village pour élever un enfant, " dit Bonneville.

A-t-il eu des problèmes avec le Ministère de l'éducation en établissant ses deux écoles alternatives? " On a eu une vocation alternative en lien avec l'article 2-22 du régime pédagogique", dit Robitaille, qui " stipule que le Centre de services scolaires a tous les pouvoirs pour octroyer une vocation à une de ses écoles. " Le Centre scolaire a tout ce qu'il faut, puis il n'est jamais battu pour une attestation du Ministère.

Une vraie affaire de région

Les élèves des deux écoles viennent des villes et villages un peu partout dans la région.

Charlie, une élève de 5e année à l'École de l'Énergie, aime bien son école. Elle participe à " un projet agro-alimentaire ", dont elle aide à s'occuper d'un jardin.

La classe de Charlie a " récolté du blé et de l'avoine, puis on a fait du pain avec ". Après, ils ont mis des feuilles mortes et la terre pour conserver leur jardin. " On a des bacs de recyclage et des compostages, " nous raconte-elle. Le projet du jardin va pouvoir continuer l'année suivante.

De plus, Rémi, élève de 5e, nous informe que sa classe faisait " un art collectif avec leurs parents et grands-parents. " Ils travaillent avec un artiste de la région, un membre de la communauté, " que son local est juste à côté, " nous dit Nakiel, en 6e année. " C'est avec lui qu'on fait l'art. On aime que les parents voient ce qu'on fait. "

" Parfois, nous rencontrons de petits défis, ou nous faisons quelque chose de croche. Nous sommes là, ainsi que les parents, pour se redresser. C'est en faisant des erreurs que nous apprenons " partage Robitaille.

" On peut faire beaucoup de choses, beaucoup de projets sur des sujets qui nous intéresse, des projets qu'on veut faire. C'est moins stricte, il y a plus de liberté sur les projets qu'on peut faire. "

Et il y a des projets personnels, comme Charlie le décrit : " Tout au long de l'année, tu peux décider de faire un projet, comme créer un robot, aller quelque part ou faire une activité. " comme explique le directeur Robitaille : " C'est entièrement conçu par l'élève, accompagné d'adulte, mais c'est l'élève qui décide de l'idée, avec les parents et on l'accompagne jusqu'au bout. "

L'année passée, Rémi a fait un livre, qu'il a bien aimé écrire, Charlie a vendu des galettes, l'argent qu'elle a ramassé, elle l'a donné à une association pour aider des enfants malades. Cette année, Nakiel, qui est intéressé par robotiques, va imprimer des figurines avec son imprimante 3D qu'il va vendre à l'école. " Des fois, " explique Charlie, " les projets ne fonctionnent pas, puis on en trouve un autre. " Les projets peuvent être modifiés en mi-chemin.

La matière préférée de Nakiel et de Charlie est le français; pour Rémi, c'est l'écriture. Trois journalistes en herbe !

Merci à Nakiel Bourbeau, Rémi Lafrenière et Charlie Guèvremont, ainsi qu'à toute l'équipe de l'École alternative de l'Énergie.

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