Cette équipe de pharmacologues et de bioingénieurs de l’Université de Pennsylvanie propose ici une nouvelle méthode d’administration orale d’insuline, à base de plantes, qui permet de réguler les niveaux de sucre dans le sang de la même manière que l'insuline naturelle. La nouvelle méthode, présentée dans la revue Biomaterials présente un avantage unique : elle réduit considérablement le risque d'hypoglycémie par rapport aux traitements actuels du diabète.
Si l’insuline « sauve la vie » des quelque 537 millions d'adultes atteints de diabète dans le monde, si ce nombre devrait augmenter, l’insulinothérapie n’est pas toujours sans risques pour le patient. De récentes études cliniques ont ainsi montré que l'injection via des stylos à insuline peut faire en sorte que l'insuline atteigne la circulation sanguine si rapidement qu'une hypoglycémie, ou des niveaux de sucre dans le sang qui descendent en dessous de la plage normale, peuvent en résulter. Les pompes à insuline automatisées peuvent délivrer l’insuline de manière plus adaptée et minimiser ce risque, mais elles sont coûteuses et seule une petite partie des patients diabétiques y ont accès dans le monde.
Une administration orale d'insuline à base de plantes
Bien que l'insuline clinique soit utilisée depuis plusieurs décennies, il lui manque l'un des 3 peptides présents dans l'insuline naturelle. L’équipe a donc développé une insuline à base de plantes qui contient bien ces 3 peptides et peut être ingérée par voie orale. La résistance des parois cellulaires végétales protège l'insuline des acides et des enzymes dans l'estomac du patient avant que le médicament ne soit décomposé par les bactéries intestinales. Ensuite, l'insuline libérée est délivrée au foie via l'axe intestin-foie.
La preuve in vivo : testée sur des souris diabétiques, l’insuline végétale régule la glycémie dans les 15 minutes suivant l'ingestion de manière très similaire à l'insuline sécrétée naturellement. En comparaison, des souris traitées avec des injections d'insuline traditionnelles connaissent une diminution rapide de la glycémie, entraînant une hypoglycémie transitoire.
« Le risque d'hypoglycémie est l'un des plus grands inconvénients du mode d’administration actuel ».
Certains patients peuvent même connaître un coma, alors qu’avec le nouveau mode d’administration par voie orale, et grâce aux 3 protéines, la nouvelle insuline, délivrée directement au foie évite ce risque majeur. La nouvelle insuline fonctionne exactement comme l'insuline naturelle, ce qui minimise le risque d'hypoglycémie, précisent les chercheurs.
L’équipe travaille depuis longtemps sur les protéines végétales et avait déjà démontré la viabilité d'un médicament à faible coût à base de laitue pour les patients hémophiles. L’équipe a également développé d’autres médicaments à base de plantes pour traiter l'hypertension artérielle pulmonaire, la maladie d'Alzheimer, la poliomyélite et la plaque dentaire et a créé une gomme à base de plantes censée réduire la charge virale de COVID-19 dans la salive.
De l’Homme à la laitue : pour produire de l'insuline à base de plantes, les scientifiques ont identifié des gènes d'insuline humaine, puis ont utilisé un « pistolet à gènes » permettant d’insérer les gènes à travers les parois cellulaires résistantes des plantes. Les gènes de l'insuline sont ensuite intégrés dans le génome de la plante, en l'occurrence le génome de la laitue. Les graines résultantes conservent les gènes de l'insuline, et la laitue cultivée est ensuite lyophilisée, broyée et préparée pour une administration orale et dans le respect des directives réglementaires de l’Agence américaine FDA.
Ce processus diffère ainsi considérablement de la production traditionnelle d'insuline,
qui implique la croissance de l'hormone dans des bactéries ou des cellules de levure, un processus coûteux nécessitant une purification et une basse température pour le transport et le stockage. La nouvelle méthode de production élimine ainsi le besoin d'équipements de laboratoire coûteux et complexes et permet d’obtenir un produit stable à température ambiante.
Il est clair que pour les patients, l'administration orale pourrait modifier considérablement le traitement du diabète mais aussi ceux d'autres maladies.
« Avec ce système d'administration, nous changeons totalement de paradigme, et pas seulement pour l'insuline ».
Source: Biomaterials May, 2023 DOI: 10.1016/j.biomaterials.2023.122142 Affordable oral proinsulin bioencapsulated in plant cells regulates blood sugar levels similar to natural insulin
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Équipe de rédaction SantélogJuil 11, 2023Rédaction Santé log