Toi non plus tu n'as rien vu // De Beatrice Pollet. Avec Maud Wyler, Géraldine Nakache et Grégoire Colin.
Les films judiciaires français ont la côte. On en a déjà eu pas mal ces dernières années mais Toi non plus tu n'as rien vu n'est pas aussi mémorable que ses pairs. Pourtant, Toi non plus tu n'as rien vu parle d'un sujet dont on parle peu en fiction : le déni de grossesse. Dans un premier temps, le but du récit est de nous permettre de comprendre qui est cette femme et de nous attacher à sa propre histoire, sidérée d'apprendre qu'elle est prétendue coupable et finalement victime de son propre corps. Toi non plus tu n'as rien vu juge alors un infanticide (enfin, d'un point de vue purement judiciaire) mais va bien plus loin que ça. C'est dans son scénario que le film parvient à creuser sa thématique et à offrir des éléments assez remarquables à de nombreuses reprises. Basée sur des faits réels, cette fiction a de quoi faire réfléchir. On sent que le film a été travaillé et qu'il pose les questions qu'il faut intelligemment. Notamment pour créer l'émotion, toute en retenue et soignée, que le film vient nous proposer dans son environnement clinique qu'est la cour de justice.
Claire et Sophie ont fait leurs études ensemble, elles sont toutes deux avocates. Claire va être accusée de tentative d'homicide sur enfant de moins de 15 ans. Sophie va assurer sa défense. Comment Claire, déjà mère de deux enfants, n'a-t-elle ni vi ni senti qu'elle était à nouveau enceinte ?
Mais Toi non plus tu n'as rien vu ne fonctionne pas toujours. Le début du film est assez brouillon et empêche par moment d'entrer réellement dans l'histoire. C'est au fil de l'enquête que l'on se prend au jeu de ce thriller sur fond de déni de grossesse. L'enquête dévoile petit à petit des éléments qui permettent aussi de comprendre ce qui s'est passé tout en créant autour de son amie avocate une question autour de comment défendre ce qui pourrait être décrit comme l'indéfendable. La difficulté d'un tel récit est de nous happer avec des éléments qui viennent faire écho à notre propre existence. Parler de déni de grossesse n'est pas simple tant le choc émotionnel que cela créé peut facilement devenir un élément psychologique fort. Toi non plus tu n'as rien vu se mue petit à petit en quelque chose de plus intéressant et surtout plus mémorable. Béatrice Pollet ne cherche pas les fioritures et se contente de filmer son récit dans son plus simple appareil. C'est dommage car par moment on sent que la caméra passe à côté de moments forts et intéressants.
Note : 5/10. En bref, juger le déni de grossesse est ici complexe mais parvient à délivrer quelque chose d'intéressant dans sa seconde partie, plus construite et habile.
Sorti le 8 mars 2023 au cinéma - Disponible en DVD et VOD