Barbie // De Greta Gerwig. Avec Margot Robbie, Ryan Gosling et America Ferrara.
Barbie est une comédie au concept fascinant : mélanger le monde réel avec le monde des poupées Mattel. C'est avec ça que Greta Gerwing et Noah Baumbach (White Noise, Frances Ha) parlent de crise existentielle. Et si Barbie, dont la vie est parfaite, venait à penser ? C'est une question saugrenue mais qui a beaucoup de sens dans le film. Car c'est avec ça que Barbie commence à développer son histoire et le fait que la Barbie stéréotypée n'est plus vraiment le standard actuel. C'est un film qui reste déroutant par son mélange savoureux du monde réel avec Barbie Land. Tous les éléments iconiques Barbie sont présents (tant par les différentes poupées - dont la Barbie que les jeunes filles torturent -, que par les éléments comme la maison Barbie, l'avion, les tenues et j'en passe). Mais derrière tout ce décorum absolument magique et surtout brillamment exploité par le film, il manque un petit truc en plus. J'aime la complexité du scénario, son humour travaillé et ses multiples références mais j'en attendais sûrement trop de la part de ce film.
A Barbie Land, vous êtes un être parfait dans un monde parfait. Sauf si vous êtes en crise existentielle, ou si vous êtes Ken.
Ce qui manque à Barbie c'est une construction différente. La première partie, assez burlesque, est amusante et un délire assumé. La seconde, plus sérieuse, tente de discuter de la condition de vie des femmes en brossant le portrait de toutes les idéologies (dont la destruction du patriarcat) mais a du mal à faire décoller l'ensemble et à le rendre mémorable. Car en dépit d'un discours magnifique du personnage d'America Ferrara et les instants entre Barbie et sa créatrice, il manque quelque chose. Le décor est là pour nous faire oublier que la réflexion manque de coffre mais ce n'est pas suffisant. Barbie va alors puiser sa force ailleurs et c'est clairement dans l'interprétation magique de Margot Robbie (Suicide Squad). L'actrice est absolument fabuleuse dans le rôle de Barbie et Greta Gerwig a une direction d'actrice qui donne vraiment vie à cette poupée iconique.
Dans sa mise en scène, Greta Gerwig tente plusieurs choses (et peut-être trop justement). Elle passe de Barbie Land au monde réel en oubliant par moment ce qui fait le charme de la première partie. La seconde a ses moments, notamment toute l'histoire de Mattel. Les dirigeants de Mattel passent ici pour les pires des idiots (et c'est à se demander comment ils ont pu accepter un tel scénario mais preuve aussi de leur probable autodérision). Will Ferrell est excellent en PDG de la société et apporte son lot de loufoqueries qui viennent réveiller la seconde partie. Car oui, la seconde partie souffre d'une intrigue qui n'a pas suffisamment d'intérêt (et ou qui n'est pas assez bien écrite) : celle de Ken. Ryan Gosling est parfait dans le rôle de Ken mais je le préfère dans la première partie du film que dans la seconde où il n'a pas grand chose de mémorable à incarner.
On sent que la révélation de Ken qui veut intégrer le patriarcat à Barbie Land et prendre le contrôle sur les femmes n'est là que pour justifier le propos du film. Barbie pouvait très bien se suffire par le monde réel et le constat que fait Barbie de ce monde là pour offrir un équilibre homme-femme à Barbie Land (et s'émanciper elle aussi par la même occasion). Mais le film s'embourbe dans une intrigue autour de Ken qui ne fonctionne pas vraiment. C'est dommage car tout ce que le film fait autour fonctionne très très bien. Ken reste juste Ken et n'est jamais un personnage que l'on a envie de suivre dans ses aventures masculines. Barbie reste une comédie burlesque et touchante (qui m'a tout de même fait verser une larme - voire plusieurs -) réussie mais j'aurais aimé un peu plus (et moins de Ken). La seconde partie perd alors le rythme de la première, multiple les scènes sans chercher la cohérence globale et manque alors de la folie du début. Le film s'étiole au fur et à mesure alors qu'il aurait pu au contraire monter en puissance.
Note : 6/10. En bref, c'est burlesque, soigné et Margot Robbie est parfaite en Barbie. Reste Ken, véritable point noir du récit qui gâche la seconde partie du film, uniquement là pour justifier certains éléments du scénario qui n'avaient pas besoin de tout ça pour vivre et se raconter.
Sorti le 19 juillet 2023 au cinéma