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Rentrée littéraire étrangère 2023- Celles qu’on tue : PATRÍCIA MELO sonde la violence du mal(e)

Par Filou49 @blog_bazart
mardi 05 septembre

  

9782283036785

"Voilà la conclusion à laquelle je suis arrivée au cours de ma deuxième semaine au tribunal : nous, les femmes, nous tombons comme des mouches. Vous les hommes, vous prenez une cuite et vous nou tuez. Vous voulez baiser et vous nous tuez. Vous êtes furax et vous nous tuez. Vous voulez vous amusez et vous nous tuez. Vous découvrez nos amants et vous nous tuez. Vous vous faites larguer et vous nous tuez. Vous vous trouvez une maîtresse et vous nous tuez. Vous vous sentez humiliés et vous nous tuer. Vous rentrez fatigués du travail et vous nous tuez."

 Patrícia Melo, grande femme de lettres et sans doute une des voix majeure de la littérature brésilienne contemporaine, n'a eu de cesse, dans ses différents romans (dont une dizaine est sorti en France), de raconter l'ambivalence du  Brésil, de sa beauté, mais aussi de sa violence intrinsèque.

« Celles qu’on tue », une des grandes parutions en littérature étrangère de cette rentrée littéraire,  ne fait pas exception à la règle avec ce texte puissant autour de la violence exercée sur les femmes, toutes les femmes du Brésil, mais surtout les femmes indigènes.

Patrícia Melo | Viceversa Littérature

La narratrice de "Celles qu'on tue" est une avocate à Sao Paulo envoyée au tribunal de Cruzeiro do Sul pour entendre et recenser des affaires de violences faites aux femmes, du simple coup au meurtre. C’est dans ce contexte qu’elle rencontre Clara, avocate générale, Paulo - le compagnon de cette dernière, et Marcos.

De fil en aiguille, on en apprend plus sur la culture du viol, la pornographie, la normalité de la violence faite aux femmes, le besoin de vengeance inassouvi… Et également sur le parcours de vie de l’héroïne, son passé, ses retranchements, ses souvenirs d’enfance teintés de sauvagerie et de brutalité.

« Ce que nous appelons la vie est aussi une file d’attente pour la mort. Nous naissons et bam, nous intégrons la file. »

Celles qu'on tue, récit implacable, âpre- le récit est composé de descriptions de crimes commis envers les femmes, très crues et réalistes mais jamais complaisantes- aborde de manière fictionnelle mais en s'appuyant sur pas mal de témoignages avérés d'une thématique délicate, celle des feminicides au Brésil. 

Car en Amazonie encore plus qu'ailleurs, et quelque soit leur niveau social, niveau d'instruction, tempérament, travail, physique…les hommes tuent.  

Brasil vive “paroxismo da intolerância”, diz Patrícia Melo que lança novo livro na França

Les croyances des peuples de l'Amazonie se mêlent au droit, à la justice et à l'indifférence.  La plume de la romancière se fait rageuse, frappante comme un uppercut pour dénoncer cette partie du globe où une femme meurt toutes les six heures car c'est un lieu où les coups sont la norme, les femmes des objets et l’alcool un désinhibiteur puissant. 

Alternant faits, narration et poésie , l'écriture, diverse, reflète la pluralité de la personnalité de celle qui parle : l’avocate, la femme, la victime, la guerrière.

Un roman résolument féministe, engagé et indispensable, qui fait vraiment froid dans le dos!  

Celles qu'on tue de Patricia Melo

Editions: Buchet-Chastel
Traduit du portugais (Brésil) par Elodie Dupau
Date de parution : 24 août 2023


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