Thierry Roquet est un poète que je suis depuis pas mal d’années et dont les textes me touchent par leur fine ironie et une discrète mélancolie, abordant les à-coups de la vie urbaine contemporaine, les bizarreries du monde du travail ou des exigences sociales, décrivant des scènes de rue prises sur le vif, évoquant un quotidien qui ressemble à celui de chacun, mais avec une pointe d’acidité et de piquant.
Les trois poèmes que je vous propose aujourd’hui sont issus du recueil paru chez Gros Textes en 2019 A la périphérie du monde (par la ligne 13 du métro).
Biographie
Thierry Roquet : né en 1968, en Bretagne.
Vit en région parisienne depuis près de vingt ans.
(Source : éditeur)
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Furtive rencontre
J’ai rencontré un poète que j’aime bien
Je lui ai dit :
« bonjour, tu es un poète que j’aime bien »
Je n’ai jamais grand-chose à dire
aux poètes que j’aime bien
Ni aux autres d’ailleurs.
*
Poème perdu
J’ai malencontreusement égaré
un poème
sur la ligne 13 du métro
si je vous dis que ce poème évoque
des choses intimes comme
la lâcheté ordinaire
le temps qui passe
&
surtout les merveilleuses galettes
au sarrasin
que préparait ma grand-mère maternelle
vous comprendrez aisément
qu’il puisse me manquer
terriblement.
*
Un bon ratio
A la boulangerie
trois clients avant moi
pour un dernier croissant
au chocolat et aux amandes
ça me fait donc seulement
une chance sur quatre d’obtenir
ce que je désire
cela parait peu
mais
c’est quand même un bon ratio
en tout cas c’est un ratio
très largement supérieur
à celui que j’ai
de dégoter le gros lot
ou
de devenir le meilleur poète français
du siècle.
Thierry ROQUET
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