Le deversoir - poemes minute

d'Arthur Teboul

Recueil poésie - 240 pages

Editions Seghers - mars 2023

Le chanteur poète se lance des défis : ceux de la liberté, de l'inspiration spontanée, de l'écriture automatique, de la divagation couchée sur papier. Des poèmes qu'il s'oblige à écrire vite, sans y revenir.

De la poésie totalement libre, qui se nourrit de l'instant, de la rêverie, du mot qu'on se délecte à prononcer et qu'on voulait voir ici, du pourquoi pas, des mots qui osent, des phrases qui s'imposent, sans queue ni tête parfois, avec le sens poétique qu'on pourra leur trouver.

Le résultat se picore ou se dévore, se comprend ou se perçoit. Intelligible ou farfelu, c'est à chaque lecteur de capter ces ondes déversées d'une tête humaine.

Extrait :

"(...) Un bracelet démultiplié scintille quand la crise commence. Est-ce la résultante de ce qui s'est passé avant ? Tout au fond, il serait bon de poser un diagnostic.

Mais de le poser où ?

Un âne entend l'écho de la question, très loin sans la campagne où il chemine, encore loin du haut de la colline. C'est une belle colline, pense-t-il. On pourrait peut-être le poser là, le diagnostic. En haut de la colline."

Et puis il y a parfois ces avalanches d'allitérations et ces expressions mises sous pression et bringuebalées avec tact.

Extrait :

"Marché mal conclu

Une poule appela les pompiers qui ne purent venir qu'à pied. Abrutie par la parole, applaudie, parla ma poule qui féconda des condors en dix minutes pendant la nuit des abricots. Tout le monde dit : "Mais c'est un coq !" puisqu'il copule comme un mâle, j'ai dit non, non c'est ma poule, la même qui voulut voir les pompiers.

Font chier. Depuis qu'ils savent que j'usurpe, les gens jugent jusqu'à ma jupe, escamotent mes plans d'architecte et hachent mes escalopes tout en sciant mon escabeau. C'est pas beau, c'est pas joli.

Reste un pot de pissenlits que je mangerai par le bout avec ma poule, qui est un coq, que j'acquis près de Dunkerque sur un marché mal conclu avec un clope dans le bec. Je l'échangeai contre un clebs qui, maintenant je m'en souviens, ne m'appartenait qu'à moitié. Apparemment ça se voyait car le reste de mon chien restait à l'appartement avec celui qui l'avait, mais ne le lavait jamais."

Ces extraits sont parmi mes préférés, des poèmes minute qui m'ont touchée, émerveillée, amusée. Alors évidemment, d'autres m'ont laissée sur le côté, question de sensibilité...

____[merci Didou :)]

"Baptême de feu d'un chanteur poète" - LeMonde