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L'empire mérovingien, par Bruno Dumézil

Par Mpbernet

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Voilà un livre qui remet bien des pendules à l'heure ... et qui montre combien les travers politiques (on  parle aujourd'hui de cleptocratie) des puissants perdurent siècles après siècles.

La précision de cet ouvrage universitaire contraste cependant avec le constat de la pauvreté des archives disponibles.

L’utilisation du papyrus et non du parchemin a hélas fait disparaître la majorité des archives de l’époque, sans compter le prisme déformant des chroniques survivantes (Grégoire de Tours, Frédégaire, Grégoire le Grand, Paul Diacre, Michelet ...).

Il n’en reste pas moins vrai que la dynastie des mérovingiens occupa (plus ou moins directement, entre 451 – victoire de la coalition à la bataille des Champs Catalauniques contre Attila, à la suite de laquelle Mérovée, roi des Francs saliens, fut reconnu par Rome - et 751, sacre de Pépin le Bref) le trône du regnum francorum trois siècles durant, plus que toutes les autres dynasties françaises à l’exception des Capétiens.

Le système de gouvernement est alors fondé sur la prédation : captation puis redistribution du butin de guerre et du tribut des peuples asservis au profit des fidèles du roi, les grands qui forment l’aristocratie militaire des leudes. Mais les titres conférés (duc, comte, patrice) ne sont pas héréditaires. Il y a donc un fort turn over car la vie est courte en ces temps obscurs.

Le don de propriété aux leudes permet au roi de se constituer un réseau de pouvoirs. Ce sont eux qui manient de façon équilibrée les principes dynastiques et l’élection pour assurer la continuité de la lignée seule légitime issue de Clovis, quitte à pratiquer l’élimination physique de certains enfants rivaux et/ou de membres secondaires de la dynastie … qui constituent aussi une réserve en cas de vacance du trône.

A la mort de Clovis en 511, le monde franc est catholique. Il n’y a plus de paganisme ni d’hérésie arienne, même s’il existe d’autres croyances (hébreux, bonosiens en Burgondie, manichéens en Provence). Le roi a pour charge de protéger les chrétiens vivant sur ses territoires, il est un agent du Ciel sur la terre.

Le rôle de l’Eglise et la diffusion de la foi aux marges de l’empire est éminent comme le maillage de fondations religieuses auxquelles le roi fait don de terres. On se souviendra des importantes figures d’évêques que furent Cloud, Ouen, Eloi, Colomban, Loup, Wandrille, Léger, Boniface ... devenus saints.

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A la mort du roi, il n’existe pas de principe de primogéniture. On partage son territoire (Teilreiche) entre ses fils. Si l’héritier est trop jeune, la reine est flanquée d’un conseil de régence, dont le maire du Palais.

C’est ainsi qu’Ebroïn, maire du palais de Neustrie, prend l’essentiel des décisions sous Clotaire III. Au VIIème siècle, les trônes comme les fonctions de maire du palais se transmettent entre parents car outre le pouvoir, il y a des enjeux financiers importants, même si les concessions de terres reviennent au fisc royal à chaque rotation.

Pépin II de Herstal est le maire du palais d’Austrasie sous le roi Thierry III.

Mort en 714, il laisse deux fils, Charles (Martel) et Childebrand. Il ouvre une période de recomposition rapide et presque complète du royaume, après des années de guerres civiles.

Charles, brillant chef de guerre, défait les Arabes – entrés en Espagne en 711 - à Poitiers en 732. Une occasion de se débarrasser d’Eudes, duc d’Aquitaine, considéré (par lui !) comme païen. En 736, Charles prend le contrôle de la Provence, Avignon, Narbonne. En 737, à la mort de Thierry III, Charles gouverne seul.

Quelques mois avant sa mort, ses deux fils Carloman et Pépin III le Bref sont associés au pouvoir de maire du palais, ils intronisent un nouveau roi : Childéric III. Carloman, pourtant l'aîné de Pépin, se retire dans un couvent. Childéric est déposé. Pépin est couronné avec l’accord du pape Zacharie et des leudes puis sacré roi des Francs en 751. Père de Charlemagne, il est le fondateur de la dynastie carolingienne.

Une épopée qui relève du miracle, celle d'une stabilité globale due à une adaptation intelligente des élites franques à un milieu changeant …

L'empire des mérovingiens, par Bruno Dumézil, édité par Passés/Composés, 348 p., 23€


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