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Le temps des Guépards, essai de Michel Goya

Par Mpbernet

Depuis la fin de la guerre d’Algérie, la France est en état de guerre permanent : elle a mené 32 opérations importantes (19 guerres et 15 grandes opérations militaires de police internationale), avec à la clef une perte moyenne annuelle de 20 soldats.

Du Tchad au Mali en passant par le Liban, le Rwanda, la Libye ou l’Afghanistan, des centaines de milliers de « soldats nomades » français ont été engagés dans une guerre mondiale pour la défense des intérêts de la France. La France est la seule nation européenne à combattre au Sahel et au Proche-Orient. Et on ne nous en a très peu parlé …

Car la France fait la guerre avec beaucoup de contraintes et peu de moyens, mais veut toujours « en être », tenir son rang aux côtés des grandes puissances. Et Michel Goya ne se prive pas de souligner les contradictions, les atermoiements, les réussites et les échecs d’engagements de nos forces, entre dissuasion et intervention.

Michel Goya

Le cadre institutionnel est celui de la Constitution de 1958 taillée sur mesure par et pour le Général de Gaulle. L’initiative est désormais, de fait, à l’exécutif et la légitimité est recherchée dans le mandat d’une organisation internationale. Le parlement n’est sollicité qu’a posteriori.

La guerre est donc d’une extrême facilité à déclencher : la volonté seule du Président suffit – sauf en période de cohabitation. Ce qui donne à nos armées l’avantage de la réactivité, mais aussi le risque de la dispersion de moyens pourtant toujours limités.

Autre difficulté : depuis l’écroulement du bloc soviétique, le modèle des forces et de leurs missions a dû être profondément renouvelé, car il n’est plus adapté à la gestion de crises longues dans des terrains éloignés : la guerre en ex-Yougoslavie a duré 22 ans !

En Afrique, les Etats affaiblis sont assaillis par des groupes armés irréguliers, seigneurs de guerre, forces d’autodéfense et/ou bandes criminelles parfois soutenus par des Etats voisins.

Sauf que la France est la seule à disposer d’une force d’intervention rapide dans la région – avec toutefois l’assistance nécessaire d’un transport aérien extérieur  …

Intervention dans une guerre civile, libération d’un Président élu, destruction de bandes armées rebelles, libération de villes passées sous le joug de djihadistes et destruction de leurs bases, opérations de stabilisation ou interposition pour maintenir la Paix … Michel Goya n’est tendre ni avec les missions onusiennes, ni devant la faiblesse d’Etats défaillants ou corrompus face à des groupes armés qui offrent parfois aux populations des services de base et une protection, ni avec nos décideurs politiques.

En fait, c’est l’opinion publique – et les perspectives électorales proches – qui dictent le plus souvent les décisions de l’exécutif de s’engager – le plus souvent au sein d’une coalition – ou de se désengager.

La politique de défense de la France est ainsi soumise à deux contraintes majeures : la faiblesse des moyens qui lui est allouée (recrutement, formation, recherche technologique, adoption de matériels plus performants), et la sensibilité des politiques aux pertes de soldats sur le terrain.

Un ouvrage éclairant, souvent corrosif, mais doté de cartes passionnantes, très clair et accessible à tous ceux que le monde prêt à s’embraser inquiète.

Le temps des guépards, essai de Michel Goya, édité chez Tallandier, 366 p., 21 ,90


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