Magazine Cinéma

Poor Things : vautré dans l’outrance

Par Mespetitesvues
Poor Things : vautré dans l’outrance

L'histoire : Bella Baxter (Emma Stone) a été ramenée à la vie par le brillant quoique peu orthodoxe Dr Godwin Baxter (Willem Dafoe) qui a utilisé le cerveau du foetus qu'elle portait en elle au moment de sa mort par suicide. Résultat, Bella est une femme de 25 ans avec le cerveau d'un enfant. En raison de ses difficultés motrices et d'apprentissage, elle est tenue en réclusion chez son créateur, qui la protège de tout et de tous. Mais elle apprend vite et sa soif de savoir semble infinie. Duncan Wedderburn (Mark Ruffalo), avocat, lui fait les yeux doux. Elle succombe et s'enfuit avec lui. Grâce à l'homme de loi débauché, elle découvre (et savoure goulûment) les plaisirs de la chair. Imprévisible, libre et audacieuse, Bella s'inistie en grandes pompes à la vie. Et plus elle se confronte au patriarcat, plus elle s'émancipe et plus elle se libère des carcans qu'on voudrait lui imposer. Après un séjour dans une maison de passes, Bella se décide à défendre bec et ongles la libération de la femme et l'égalité entre les sexes.

Une poule à tête de cochon, un chien ressemblant à un canard (ou l'inverse), un fiacre à moteur affublé à l'avant d'une tête de cheval empaillée, des personnages extravagants, du sexe " R rating ". Et le tout dans une ambiance rétro-kitsch au mauvais goût assumé mise en scène avec tout ce qu'il faut de tape à l'oeil et d'effets de manche.

Avec Poor Things (Pauvres créatures en VF), Lanthimos, son scénariste Tony McNamara et sa comédienne et coproductrice Emma Stone - non dénuée d'une certaine ressemblance avec Frida Kahlo - se vautrent avec allégresse dans l'outrance pour mettre en images le roman éponyme et non moins exubérant d'Alasdair Gray, auteur écossais décédé en 2019 à l'âge de 85 ans.

Au-delà de ses qualités esthétiques et de ses traits d'humour omniprésents, ce qui m'a séduit dans Poor Things, c'est cette capacité de prendre à bras le corps un sujet rabâché (une femme avilie décide de s'approprier son corps et de se définir par rapport à ses propres expériences) pour en faire un objet de cinéma " enhaurme ", sans pour autant nuire à l'importance du propos.

Car, si le film se résume essentiellement en un récit de passage à l'âge adulte interdit aux plus jeunes, c'est surtout une oeuvre mémorable, excentrique et complexe, certainement pas faite pour plaire à tout prix. On ne peut que saluer l'audace de Lanthimos (qui l'a, du reste, déjà maintes fois démontrée, mais dans des registres moins " mainstream ") en ces temps où tout est fait pour tenter de ramener un public de plus en plus illusoire dans des salles obscures de moins en moins attirantes.

❤❤❤❤

En salle au Québec le 15 décembre 2023. En France le 17 janvier 2024.


Retour à La Une de Logo Paperblog