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La jalousie – Marie-France Patti

Par Moglug @Moglug
La jalousie – Marie-France PattiLa découverte de cet ouvrage est en premier lieu, pour moi, la découverte d’une collection : Psy pour tous des Editions in Press. Dirigée par le psychanalyste Gérard Bonnet, la collection Psy pour tous accueille des ouvrages dont le but – semble-t-il – est de rendre accessible et compréhensible par tous des notions de psychologie souvent complexes. La jalousie : métamorphose de l’envie de Marie-France Patti en est un exemple. Ce livre est nettement plus sérieux que bon nombre d’ouvrages de développement personnel et beaucoup plus synthétique et facile d’accès que la littérature grise spécialisée en psychologie. L’ouvrage commence par illustrer ce qu’est la jalousie en rapportant des scènes que nous avons tous vécues ou dont nous avons été témoins dans nos vie. Il dédramatise ainsi une émotion souvent mal perçue.  L’autrice s’attache ensuite à définir la jalousie, puis l’envie et enfin la manière dont les deux émotions s’articulent : p. 37 : « La définition de la jalousie devient évidente dans la relation amoureuse. Elle rassemble bien les deux registres, celui de la possession de l’objet, et en même temps, le désir de sa conservation pour soi. La jalousie se réveille dès qu’une menace de perdre l’objet se profile à l’horizon. Elle est donc tournée à la fois vers l’objet  et vers le rival qui incarne la menace. Elle convoque le désir, l’angoisse de perdre, et est la source d’une souffrance liée au narcissisme blessé. » p. 41 en citant Spinoza :  » L’envie, au contraire, est « la haine en tant qu’elle affecte l’homme de sort qu’il soit attristé du bonheur d’autrui et se réjouisse au contraire du malheur d’autrui ». Il s’agit donc de déposséder l’autre de ce qu’il a. Le plus important n’est pas de s’approprier l’objet convoité mais de le soustraire à l’autre, afin de lui ôter la jouissance de l’objet en question. Le but de l’envie est donc de détruire le bonheur de l’autre. » Globalement, l’ouvrage se présente bien plus comme une synthèse que comme un essai : il présente les définitions proposées par les grands dictionnaires et par les pontes de la psychanalyse (Sigmund Freud, Mélanie Klein, Jacques Lacan). En ce sens, sa présentation se veut objective. A vrai dire, j’ai très vite décroché sur ces points. Le complexe d’Œdipe, quand bien même il serait revu et réactualisé, heurte de plus en plus mon âme féministe. Marie-France Patti se charge tout de même de rassembler les trois théories présentées dans un ensemble logique qui explique l’évolution de l’envie mortifère vers une jalousie davantage positive car chargée d’un désir notamment amoureux, le désir étant vecteur de vie. L’autrice rapporte ensuite un exemple plutôt cocasse que je ne peux m’empêcher de retranscrire : p. 118 : « L’exemple de la Société Psychanalytique est pareillement parlant. La jalousie a été peu élaborée sur le plan théorique. Pourtant elle a fait rage parmi les disciples de Freud et a continué dans toute l’histoire du mouvement psychanalytique. En témoigne le nombre de conflits, de scissions, d’exclusions. Ils ont commencé déjà du temps de Freud, mais tant que le maître (le Père) était là, il y avait un semblant de fraternité. Le Père maintenait la Loi. Après la mort de Freud la lutte fratricide s’est déchaînée. A commencer par Anna Freud et Mélanie Klein. Le même scénario s’est répété à la mort d’un autre maître, Lacan. Des querelles théoriques existent dans toutes les chapelles, mais dans l’histoire du mouvement psychanalytique, ces oppositions se sont transformées en lutte fratricide sans merci. Toute vie collective implique la répression des pulsions sexuelles et agressives, mais même si elles sont sublimées ou réprimées, elles sont toujours actives et doivent s’exprimer dans le groupe, entre les membres ou contre le pouvoir. Toute institution recrée le modèle familial avec la loi du Père et les frères obligés de vivre ensemble et de se partager l’espace, le temps et l’amour. Ils acceptent de le faire à condition d’avoir la même part du gâteau. Et ils ne peuvent le faire que s’ils se reconnaissent entre eux, et ont un idéal à partager. C’est par le vecteur de la jalousie ou de l’envie que l’agressivité trouve une issue. » Après cet exemple probant, Marie-France Patti développe rapidement les impasses à la fraternité à travers deux concepts que sont la « frérocité » qui veut que tout groupe se construise en opposition à un autre ou en se déchargeant d’un bouc émissaire, et « le complexe de Caïn », une sorte de péché originel qui se nicherait dans la jalousie/l’envie fraternelle. Elle propose ensuite des solutions pour combattre cette jalousie (déjà issue d’une évolution positive de l’envie et vecteur d’amour et de désir). Cette partie est de loin la plus intéressante du livre. Sans tomber dans les techniques classiques de développement personnel, elle ouvre succinctement mais efficacement des axes de réflexion pour tout un chacun. Ces solutions sont : le pardon, l’empathie,la sublimation par l’art, et la loi. Ces quelques pages rationnelles et objectives – comme l’ensemble du livre – sont sublimes de bon sens et d’espoir pour la suite. L’ouvrage se termine par des exemples de sublimation de la jalousie et de l’envie dans la littérature, la mythologie et le théâtre, et par une courte conclusion  résumant l’ouvrage. Cette lecture est une très belle découverte pour ma part. J’ai très envie de lire les autres ouvrages de la collection. C’est aussi un très bon moyen de s’informer sur la psychologie et sur les émotions sans passer par des lectures douteuses sur le développement personnel. Un très grand merci aux Editions In Press et à Babelio pour l’envoi de cet ouvrage !
La jalousie : métamorphose de l’envie – Marie-France Patti In Press, 2018, 180 p.
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