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[critique] dream scenario

Par Onrembobine @OnRembobinefr
[critique] dream scenario

Titre original : Dream Scenario

Origine : États-Unis

Réalisateur : Kristoffer Borgli

Distribution : Nicolas Cage, Julianne Nicholson, Michael Cera, Tim Meadows, Dylan Gelula, Dylan Baker, Kate Berlant...

Genre : Drame/Fantastique

Durée : 1h40

Date de sortie : 27 décembre 2023

Le Pitch :

Paul Matthews, un professeur de biologie de l'évolution, travaille dans une université où il passe généralement inaperçu. Un jour néanmoins, plusieurs personnes lui rapportent des rêves dans lesquels il apparaît. Des rêves où il se pose en observateur de situations tantôt amusantes, tantôt extraordinaires ou plus angoissantes. Très vite, le phénomène s'amplifie et Paul devient malgré lui une célébrité. Jusqu'au moment où les rêves de milliers de personnes prennent une autre tournure et propulsent Paul dans une sorte de cauchemar dont il semble impossible de sortir...

La Critique de Dream Scenario :

Nicolas Cage a tout fait. Plus ou moins marginalisé au sein de sa propre famille, les Coppola, quand il débute sa carrière, il change de nom pour emprunter celui d'un personnage Marvel (Luke Cage) et monte un à un les échelons grâce à son talent brut de décoffrage, son courage, son audace et sa capacité à ne jamais s'économiser, quel que soit le film. Birdy pour Alan Parker, Arizona Junior pour les frères Coen, Sailor et Lula pour David Lynch, Leaving Las Vegas pour Mike Figgis (Oscar du meilleur acteur), Rock pour Michael Bay, Volte-Face pour John Woo. Du drame intimiste au thriller en passant par le pur film d'action ou la comédie loufoque, Nicolas Cage a tout fait.

Et puis un jour Nicolas Cage a semblé faire n'importe quoi. Des petits films sans envergure et des inédits vidéos que personne n'a vu, avec quand même de temps en temps de pures pépites histoire de rappeler qu'il n'avait rien perdu de son mojo. Des projets par camions entiers pour éponger ses dettes, retrouver les faveurs du fisc et soigner sa mère malade. Ces dernières années, Nicolas Cage a donc vraiment tout fait. Jusqu'au jour où il n'a plus eu de dettes et a entamé la reconquête de son nom et de sa réputation. Ses fans, les vrais, savaient qu'il était toujours ce génie qui un jour, avait séduit les plus grands mais d'autres l'avaient oublié.

Pour ces derniers, il était Tokarev et non Sailor. Il était ce mec qui peut voir le futur dans Next avant d'être le vendeur d'armes taré de Lord of War. Cage est donc redevenu lui-même. Un acteur hors-norme et hors limites, capable d'exploser à l'écran dans la peau d'un bûcheron taiseux (Joe), dans celle d'un homme prêt à tout pour retrouver son cochon (Pig) ou encore dans le costume d'un certain Nic Cage, dans le génial Un Talent en or massif, dans lequel il se joue donc lui-même, s'amusant des memes, du phénomène Nic Cage et de tout ce qui s'est globalement déroulé entre le moment où il est passé du statut d'acteur à Oscar à celui de superstar de la pop culture bariolée et ultra connectée.

Cage qui n'en finit plus de revenir alors qu'il n'est jamais parti, figure aujourd'hui au générique de Dream Scenario, un film fou écrit et réalisé par le Norvégien Kristoffer Borgli, déjà responsable de Sick of Myself.

[critique] dream scenario

Dream On

Dans Dream Scenario, Nicolas Cage ne s'interprète pas lui-même. C'est même tout l'inverse. Paul Matthews, son personnage, ne se fait pas remarquer. Il est la banalité incarnée. Un peu ennuyeux sur les bords. Quelconque. Le genre de type dont on ne rêve pas la nuit. Sauf qu'un jour, on ne rêve justement plus que de lui. Il est partout. Dans toutes les têtes. Il se pointe en plein milieu d'un rêve et observe. Il ne fait rien. Il regarde. Une personne rêve de lui puis deux, trois, des centaines, des milliers. Aux États-Unis, en France, partout. Paul est une star. Lui qui enseigne dans sa classe la faculté du zèbre à tirer parti des rayures de son pelage pour se fondre dans la masse de son troupeau pour échapper aux prédateurs, devient la proie des médias qui veulent s'en emparer. Son apparence de monsieur tout le monde l'expose, assez ironiquement, encore plus au regard des autres.

Au début c'est marrant. Après tout, pour un type que personne n'a jamais remarqué, ce genre de phénomène peut être intéressant. Surtout quand on se rêve écrivain à succès. Sauf qu'un jour, Paul devient, du moins dans les rêves des gens, un tueur sadique psychopathe. De quoi retourner la situation et permettre à Nicolas Cage de mettre à contribution sa capacité à tout jouer, lui qui a tout fait. Il interprète un gars lambda avant de parvenir à traduire sa fascination puis son angoisse et enfin sa détresse. Le monde se retourne contre Paul sans que ce dernier ne le mérite et sans qu'il puisse y faire quoi que soit. Il est victime de lui-même. Il est lui et donc il est coupable car les gens rêvent de lui, malgré lui. Un concept fou que seul Nicolas Cage (ou un acteur aussi superbement borderline que lui soit quelqu'un qui n'est pas encore né) pouvait incarner et sublimer.

J'ai encore rêvé de lui (air presque connu)

Nicolas Cage n'est jamais où on l'attend et quand il est là où on l'attend, il arrive encore à nous surprendre. On nous aurait faire lire le pitch de Dream Scenario avant même que le film ne soit lancé et on aurait forcément pensé à lui. En lui proposant le projet, Kristoffer Borgli a donc misé sur le bon cheval. Un acteur fou qui sait encore, après 40 ans de carrière, prend des risques qui s'avèrent généralement payants. Un mec qui a encore, après 4 décennies à jouer la comédie, l'envie de se mouiller, avec la fougue d'un jeune premier qui n'a rien à perdre.

Dans Dream Scenario où Cage aurait pu jouer au cinglé, comme dans.. disons Embrasse-moi Vampire, l'un de ses meilleurs films au passage. Sauf que non car ici, même quand son personnage apparaît dans les rêves, le scénario l'encourage à faire l'inverse de ce qu'on attend de lui, avant de l'amener à faire exactement ce qu'on attend de lui pour exercer sur son personnage une pression impossible à supporter.

Ce qui conduit donc Cage à jouer l'angoisse et la détresse avec une justesse inouïe. Il nous file la chair de poule, nous fait rire aux éclats le temps d'une scène pourtant pathétique et triste, nous fait peur, joue au sadique puis redevient ce type acculé et vulnérable, qui cherche par tous les moyens à garder le contrôle sur sa vie. Ce qui, compte tenu des circonstances, est impossible.

Le type du cauchemar

Dans Dream Scenario, ce film au concept si génial et original, Nicolas Cage se montre plus qu'à la hauteur. Il semble réfléchir à sa propre condition, à sa propre légende et à sa propre capacité à se montrer digne des attentes de son public. Un peu comme dans Un talent en or massif mais dans un contexte plus anxiogène et beaucoup moins léger. Dream Scenario étant distribué par A24, la firme qui monte qui monte à l'origine de films comme Hérédité, Midsommar ou Beau is Afraid. La société de production des trucs bizarres et perturbants.

Ce qu'est précisément Dream Scenario. Bizarre et perturbant. Drôle aussi. Amusant. Ludique. Fou. Angoissant. Déchirant. Pertinent. Inclassable. Excellent. On pourrait continuer longtemps. La référence à Freddy Krueger lui ajoutant une touche meta des plus savoureuses. D'autant plus appréciable qu'elle n'est pas forcée ou opportuniste. Il fallait juste la faire et ici, elle a sa place.

Dans un clip promo, Nicolas Cage parle de ses rêves face caméra. Des images de Dream Scenario sont intercalées pendant que l'acteur nous fait son numéro et pour l'occasion, fait du pur Cage. Aussi génial que d'habitude. Le neveu de Francis Ford Coppola a fait du chemin. Il a tout fait à vrai dire. Et dans Dream Scenario, il est absolument brillant. Comme le film en lui-même d'ailleurs.

En Bref...Les films à concept sont parfois casse-gueules. Avec Dream Scenario, Kristoffer Borgli prouve qu'il en a dans le ventre. Nicolas Cage lui, trouve l'un de ses meilleurs rôles. Ce qui, vu sa filmographie, signifie vraiment quelque chose. Touchant, drôle, perturbant et pertinent, ce film est tout simplement une prouesse totale.@ Gilles Rolland
[critique] dream scenario

Par Gilles Rolland le 27 décembre 2023

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