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Toutes les plumes de Colette

Publié le 09 février 2024 par Morduedetheatre @_MDT_
Toutes plumes Colette

Critique de Music-Hall Colette, de Cléo Sénia et Alexandre Zambeaux, adapté par Léna Bréban, vu le 2 février 2024 au Théâtre Tristan Bernard
Avec Cléo Sénia, mise en scène par Léna Bréban

Je ne sais pas combien de fois j’ai écrit ça ces derniers temps mais encore une sélection due en partie au harcèlement du haut de l’arbre généalogique. Colette est au programme de prépa et j’entends chanter ses louanges depuis quelques mois. Et puis comme j’ai aussi un peu une personnalité, je dois dire que Léna Breban à la mise en scène et Jean-Marc Hoolbecq à la chorégraphie, ce sont pour moi des valeurs sûres (et que j’aurais donc probablement pointé mon nez même sans le contexte très Colettien !).

La première chose qui me vient, c’est que je ne sais pas si j’ai déjà vu un seul en scène qui soit autant un spectacle. Ne me hurlez pas dessus, les seuls en scène sont bien des spectacles et loin de moi l’idée d’en faire un sous-genre. J’ai toujours aimé les seuls en scène. Mais chaque forme a ses codes, et, entre nous, on sait bien que ces derniers temps, quand on dit seul en scène, on a plutôt l’image du dépouillement scénique total venant contraster avec le côté très démonstratif de ce morceau de bravoure que constitue l’interprétation de vingt personnages par un seul comédien (comment ça je suis blasée ?). Ce Music-Hall Colette n’a rien de tout ça. Rien que dans sa forme, il est libre, il est différent, et ça mérite déjà des bravos.

C’est peut-être un détail pour vous, et pourtant, je pense que ça fait partie des éléments qui contribuent à insuffler un air de liberté et d’anti-conformisme à ce spectacle. Car c’est dans l’air, indéniablement, c’est l’âme et la singularité de Colette qui progressivement envahissent la salle, ça ne reste pas juste sur le plateau, ce n’est pas juste l’effet de quelques effeuillages – aussi réussis soient-il, j’en conviens. C’est au-delà de ça. Ça déborde de Colette, dans la forme, dans le fond, dans le rapport au spectateur – ai-je déjà vu un jeu avec le public aussi pertinent que ce soir-là ?

J’ai dit que je n’étais pas habituée à voir des seuls en scène avec pareille attention portée sur la mise en scène, je n’ai pas été au bout de ma pensée. Je ne savais pas que ce matériau permettait de proposer quelque chose d’aussi brillant. D’aussi étonnant. D’aussi intelligent. Le travail de Léna Bréban est inventif mais jamais démonstratif, généreux sans être encombré, ultra dynamique tout en restant élégant. Mais il est surtout d’un équilibre parfait : l’utilisation du plateau, l’alternance entre les numéros dansés et racontés, les différents aspects de la personnalité de Colette, tout s’articule à la perfection pour entraîner le spectateur dans cette danse effrénée.

Et pendant que Léna Bréban signe une petite perfection à la mise en scène, Cléo Sénia, elle, en fait tout autant sur le plateau. Jeu, chant, danse, effeuillage, rien ne lui résiste. Sa Colette est un roc et l’enthousiasme débordant qu’elle affiche est un nid à faire front dans la difficulté. Les barrières qui se posent sur son chemin, elle les éclate, presque comme si elle ne les voyait pas. Rien ne semble lui résister, donnant un effet de toute puissance. C’est une personnalité unique, et caractérielle. Alors oui, le spectacle est principalement axé sur le rapport de Colette aux hommes, peut-être plus qu’à la littérature, mais c’est fait avec une envie communicative qui nous donne envie de nous (re)plonger dans l’oeuvre de l’autrice. Pari gagné.

Quelles femmes !

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Music-Hall Colette – Théâtre Tristan Bernard
64 rue du Rocher, 75008 Paris
A partir de 23€
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© Julien Piffaut

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