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Ladislasse

Publié le 23 février 2024 par Morduedetheatre @_MDT_
Ladislasse

Critique de L’amour chez les autres, de Alan Ayckbourn, vu le 13 février 2024 au Théâtre Edouard VII
Avec R.Jonathan Lambert, Virginie Hocq, Arié Elmaleh, Julie Delarme, Sophie Bouilloux et Andy Cocq, mis en scène par Ladislas Chollat

L’affiche était belle. Chose rare pour un spectacle, la bande-annonce aussi. La distribution était alléchante, les têtes d’affiches un peu différentes de celles qu’on croise d’habitude à l’Edouard VII, comme si ce dernier tentait d’attirer un nouveau public. Et puis six artistes au plateau, on ne se moque pas de nous. Bref, j’ai plongé. Comme pas mal de monde a priori, car la salle était bien remplie pour un mardi soir – et tant mieux ! Tant mieux pour ceux, en tout cas, qui ont davantage rigolé que moi.

L’amour chez les autres met en scène trois couples, liés entre eux par les trois hommes qui travaillent dans la même entreprise : Frank Foster est le boss de Bob Philipps et William Chestnut. En surface, tout va bien. Mais officieusement, c’est un peu plus compliqué que ça. Il se trouve en effet que Bob Philipps a passé la nuit avec la femme de Frank Foster, Fiona Foster. Et que, à deux doigts de se faire prendre chacun de leur côté, ils ont pris le même couple pour alibi : Bob a prétendu avoir passé la soirée avec William Chestnut, et Fiona avec sa femme. Cerise sur le gâteau, le couple Chestnut va se retrouver invité à dîner chez les Foster, puis chez les Philipps. Voilà qui promet…

Je pensais que ce serait ma came. Les histoires de couple, les petites mesquineries, les tromperies, les comiques de situation, c’est vu et revu mais sur moi ça fonctionne toujours. Je suis bonne cliente. Devant l’affiche, devant le résumé, devant la bande-annonce, j’avais l’impression de me retrouver devant ces comédies françaises style Le Jeu que je consomme facilement au cinéma. J’avais les mandibules échauffées, prêtes à se décrocher. Y’avait plus qu’à envoyer !

En fait, c’était pas tout à fait ça. On ne jouait pas vraiment dans la cour prévue. L’Amour chez les autres est une comédie anglaise. Ce qui ajoute deux poids dans la balance. D’abord, c’est de l’humour anglais. Pas vraiment absurde mais disons décalé, un peu loufoque. Ensuite, c’est traduit. Loin de moi l’idée de juger l’adaptation française signée par Marie-Julie Baup, simplement, pour des situations pareilles, on sent le léger décalage induit pas le poids culturel qui vient avec la comédie. Bref, je sens déjà mes mandibules qui commencent à se contracter.

Ladislasse

Bon, me voilà donc loin de ma comédie réaliste à la française, mais on va pas se braquer pour autant. Après tout, le but du plateau reste de nous faire rire, je suis là pour ça, on va peut-être trouver un terrain d’entente. Et on l’a trouvé. Pendant cinq minutes, lors de la scène tant attendue, à peu près au milieu de la pièce, quelque chose prend. Le rythme, le grain de folie, la montée en puissance, tout y est. Mais cinq minutes, c’est peut-être un peu court sur une comédie qui dure 1h30.

Le reste du temps, malheureusement, je reste complètement sur ma faim. Difficile de mettre en cause les comédiens, qui défendent tous leur personnage avec ardeur, ni le texte, qui donne à voir un vrai potentiel comique. Non, pour moi, le problème vient de deux choses. D’abord, il y a comme une promesse non tenue : la bande-annonce et même le sujet de la pièce en lui-même semblaient converger vers une confrontation des trois couples. Or, cette confrontation n’arrive jamais. Et les dîners en eux-mêmes prennent finalement peu de place dans l’ensemble de la pièce, qui manque cruellement de tension dramatique. D’où probablement une partie de mon ennui.

Mais il y a aussi un problème de mise en scène. Moi qui ai toujours beaucoup aimé le travail de Ladislas Chollat, me voilà un peu décontenancée. Sa proposition manque cruellement de rythme : le spectacle semble monté au ralenti. Ce genre de comique fonctionne mieux en accéléré – le genre match de ping pong professionnel où on n’a même pas le temps de voir la balle tellement elle va vite. Et là, on se retrouve sur un match entre potes un dimanche post barbecue. L’histoire met plus de temps à avancer que le spectateur à comprendre ce qui va arriver. Et lui laisse tout le temps d’observer les défauts de la pièce : ses dialogues légèrement poussifs, ses aspects vieillots, ses grosses ficelles.

L’amour, c’est peut-être mieux chez les autres, mais pour ce qui est de l’humour, j’avoue avoir un faible quand il est français.

♥

L’amour chez les autres – Théâtre Edouard VII
10 place Édouard VII, 75009 Paris
A partir de 30€
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