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La disparition de l’empire

Par Carmenrob

disparition l’empire

Comme si le contexte américain n'était pas assez déprimant, j'ai lu le dernier Douglas Kennedy, Et c'est ainsi que nous vivrons. L'auteur nous catapulte en 2045, dans les restes encore fumants de l'empire américain qu'une guerre civile a scindé en deux entités ennemies. D'un côté, la République (RU) regroupe, grosso modo, les états des côtes est et ouest, de l'autre, la Confédération (CU) regroupe les états centraux. La RU, quant à elle, prône la liberté des mœurs, " [la] diminution des contrôles de l'État et la surveillance incessante de la vie des citoyens ", surveillance rendue possible grâce à une innovation, la puce Chadwick, une interface électro-cérébrale insérée derrière l'oreille. Cette invention a révolutionné tous les modes de communication, rendant ainsi les téléphones cellulaires désuets. Du côté de la CU, dirigée par les Douze Apôtres, c'est la religion qui règne en maître. La diversité des genres pose problème. L'avortement et la contraception y sont interdits. On y brûle en place publique les déviants. Chose certaine, d'un côté comme de l'autre de la frontière, la liberté n'existe plus. D'un côté, " l'État de Big Brother ", de l'autre " la dictature de l'inquisition ". Joyeux !

disparition l’empire

Samantha Stengel travaille au sein d'un service de sécurité de la RU, le Bureau, qui est comparable à l'actuelle CIA. Ambitieuse, Stengel a pris l'engagement de renoncer à la vie de couple, que l'organisation considère être dangereuse pour la fidélité des agents. Déjà ébranlée par le spectacle de l'exécution d'une de ses taupes infiltrée en pays ennemi (CU), brûlée en place publique, Stangel apprend l'existence d'une demi-sœur œuvrant pour la CU. Elle doit l'éliminer. Après avoir subi une modification de son apparence physique et de ses marqueurs biométriques (iris, empreintes digitales) grâce à des avancées technologiques, Stengel est envoyée en ZN, la zone attenante à la frontière de la Confédération, afin d'accomplir sa mission. La révélation de l'existence de sa demi-sœur sera perturbatrice pour l'agent secret. Comment Stengel se tirera-t-elle de cette situation intenable ? Je ne vous le dirai sûrement pas. 😉

L'action est lente à se mettre en place. Kennedy semble plus désireux de nous décrire ce monde où règnent la surveillance permanente, la méfiance généralisée et la solitude massive des personnages (c'est ainsi que nous vivrons) que de nous scotcher à leurs aventures. C'est seulement vers le milieu du roman que l'action s'accélère et que le suspense s'intensifie.

L'extrait

Vous devrez appuyer ici, poursuit-elle. La capsule a une forme pointue pour lui permettre de percer facilement la peau. Dès que vous l'aurez en main, mettez-la immédiatement dans votre bouche, de préférence entre vos incisives, et mordez dedans. Même si l'ennemi tente de vous faire avaler un antidote pour pouvoir vous interroger, rien n'y fera. La mort est immédiate. Votre cœur s'arrêtera moins de 7 secondes après la rupture de la capsule. Des questions ? (p. 290)

Douglas Kennedy n'est pas du genre à faire des effets de manche. Son style est sobre, direct, efficace. Il ne nous fait pas de cadeau dans ce livre qui donne à réfléchir (et à trembler). Un roman intéressant, mais possiblement déprimant.

Douglas Kennedy, Et c'est ainsi que nous vivrons, Pocket, 2023, 452 pages


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