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Quand Paul McCartney transforme Rudolph en reggae : l’histoire d’une reprise improbable

Publié le 07 décembre 2024 par John Lenmac @yellowsubnet
Noël a toujours occupé une place particulière dans le cœur et l’imaginaire du public, mais aussi dans celui de nombreux musiciens. Au fil du temps, des artistes aussi variés que Bing Crosby, Mariah Carey ou Elvis Presley ont exploré le répertoire festif, que ce soit à travers des standards ou des créations originales. Paul McCartney, lui, est rentré dans l’histoire des chansons de Noël grâce à “Wonderful Christmastime”, publiée en novembre 1979, mais ce single cache un autre secret insolite sur sa face B : une étonnante adaptation à saveur reggae de “Rudolph, the Red-Nosed Reindeer”.

Sommaire

Contexte historique : des années 1970 sous le signe de l’expérimentation

À la fin des années 1970, Paul McCartney est installé depuis plusieurs années dans la dynamique créative de son groupe Wings, formé après la séparation des Beatles. Il alterne entre mélodies pop accrocheuses, expérimentation de sons nouveaux et tentatives plus légères, parfois humoristiques. Les années qui suivent la séparation des Beatles (officiellement en 1970) donnent à McCartney l’occasion d’explorer de nouveaux territoires musicaux. Il collabore avec d’anciens compagnons comme Denny Laine, multiplie les albums (de Ram en 1971 à Back to the Egg en 1979), et s’autorise de temps à autre des projets plus anecdotiques, mais révélateurs de sa curiosité.

La création de “Wonderful Christmastime”, sortie en single en 1979, s’inscrit dans une démarche simple et festive. Dans une interview pour PaulMcCartney.com en 2022, McCartney revient sur son approche des chants de Noël, expliquant que sa famille se moquait gentiment de cette tradition, sans toutefois la détester, et que lui-même les appréciait modérément. Pourtant, il voit dans les chansons de Noël la possibilité d’un rituel musical récurrent, ces morceaux se réinvitant chaque année dans les foyers. Comme il l’explique : « J’aime l’idée des chansons de Noël parce qu’elles ne reviennent qu’à Noël ! »

“Wonderful Christmastime” et sa face B improbable

Au moment de concevoir ce single, McCartney décide d’y associer une face B. Il aurait pu opter pour un morceau plus traditionnel, ou un titre inédit reflétant le même esprit festif. Au lieu de cela, il choisit d’enregistrer une version instrumentale de “Rudolph, the Red-Nosed Reindeer” dans un style aux accents reggae, intitulée “Rudolph the Red-Nosed Reggae (Instrumental)”.

La chanson originelle, écrite en 1949 par Johnny Marks, est d’abord un conte musical relatant les mésaventures d’un renne au nez rouge luminescent moqué par ses congénères, avant de devenir le héros incontesté du traîneau du Père Noël. Très populaire dans le répertoire de Noël américain, elle a été interprétée par Gene Autry, Perry Como, Dean Martin et bien d’autres. En faire une version reggae à la fin des années 1970, période où le reggae connaît une popularité mondiale grâce à Bob Marley, Toots & The Maytals ou encore Jimmy Cliff, peut paraître audacieux. Pour McCartney, cela relève peut-être plus de la facétie que de la volonté de rendre un hommage sincère à la culture jamaïcaine.

Une tentative humoristique et expéditive

Le choix de McCartney de s’aventurer dans une “reprise reggae” de “Rudolph, the Red-Nosed Reindeer” a de quoi surprendre. D’abord, cette version n’est pas véritablement du reggae pur. Elle emprunte ici et là quelques rythmes syncopés, quelques guitares au skank discret, mais ne propose pas la chaleur, la basse ronde et profonde, ni les harmonies vocales propres au genre. Le résultat s’avère un hybride curieux, mélangeant mélodie de Noël, quelques inspirations caraïbéennes et références classiques de l’instrumentation pop.

Le souci principal réside dans la qualité de l’exécution. Les sessions d’enregistrement de cette face B semblent s’être déroulées sans grand soin. Plusieurs chroniqueurs de l’époque et historiens de la musique ultérieurs notent qu’un bruit parasite – comme un objet tombant ou heurtant une surface dure – demeure audible sur l’enregistrement final, signe du peu de retouches apportées. Wings, pourtant composé de musiciens professionnels, n’a apparemment pas jugé nécessaire de réenregistrer ou de nettoyer cette prise. Cet aspect donne l’impression d’une esquisse, d’un amusement de studio non finalisé, plutôt que d’un titre pleinement assumé.

La critique et la réception

Au moment de la sortie du single “Wonderful Christmastime” en 1979, l’attention se porte surtout sur la face A. Cette dernière, malgré les critiques qui la trouvent trop répétitive et parfois un peu kitsch, s’installe durablement comme un classique de la période des fêtes, revenant chaque année dans les playlists et les programmations radiophoniques. Au contraire, “Rudolph the Red-Nosed Reggae (Instrumental)” ne bénéficie pas d’un élan similaire. Le morceau demeure méconnu, rarement mentionné dans les anthologies ou les rétrospectives sur McCartney, et n’a pas connu de rééditions particulièrement mises en avant.

Dans le paysage des chansons de Noël, l’originalité n’est pas toujours un gage d’immortalité. “All I Want for Christmas Is You” (1994) de Mariah Carey, par exemple, doit son succès à sa mélodie accrocheuse et son énergie pop, tout comme “Christmas (Baby Please Come Home)” (1963) de Darlene Love a marqué grâce à sa puissance vocale et la production de Phil Spector. À l’inverse, “Rudolph, the Red-Nosed Reindeer” se distingue plus par son histoire touchante et son statut d’icône culturelle que par sa mélodie. La tentative de McCartney d’en faire une curiosité reggae n’a pas transcendé ces limites et a surtout mis en lumière le manque de force intrinsèque de la chanson sans son récit.

L’héritage d’une curiosité de studio

Quarante ans plus tard, “Rudolph the Red-Nosed Reggae (Instrumental)” demeure un morceau obscur, une curiosité pour les collectionneurs et les fans les plus acharnés de Paul McCartney et de Wings. Le musicien lui-même n’en parle guère. Dans les interviews où il est revenu sur ses expériences musicales, il n’a pas accordé de place particulière à cette face B singulière. Son propre père, qui se moquait des chants de Noël, aurait probablement souri devant cette expérimentation un brin ratée.

Au final, cette reprise improbable offre un petit éclairage sur l’état d’esprit de Paul McCartney à la fin des années 1970 : un artiste curieux, parfois désinvolte, capable du meilleur (ses grands succès avec Wings, l’intemporalité de “Wonderful Christmastime”) mais aussi d’expériences mal ficelées. “Rudolph the Red-Nosed Reggae (Instrumental)” n’entre pas dans les annales de la chanson de Noël, mais reste un témoignage amusant de l’insouciance expérimentale d’un ancien Beatle, prêt à tout essayer, ne serait-ce que pour le plaisir d’une curiosité passagère.

Cet article répond aux questions suivantes :

  • Pourquoi Paul McCartney a-t-il réalisé une version reggae de “Rudolph, the Red-Nosed Reindeer” ?
  • Quelle est la relation entre “Rudolph the Red-Nosed Reggae” et “Wonderful Christmastime” ?
  • Quels éléments musicaux composent “Rudolph the Red-Nosed Reggae” ?
  • Pourquoi la reprise de Paul McCartney semble-t-elle bâclée ?
  • Quels sont les points faibles de la chanson originale “Rudolph, the Red-Nosed Reindeer” ?

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