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« Here Today » : la chanson de Paul McCartney pour faire la paix avec la disparition de John Lennon

Publié le 17 décembre 2024 par John Lenmac @yellowsubnet

La mort de John Lennon, en décembre 1980, a profondément bouleversé Paul McCartney, son ami, partenaire créatif et ancien camarade des Beatles. Pour celui qui, durant des années, avait partagé la scène, le studio et d’innombrables souvenirs avec Lennon, la disparition brutale de ce dernier fut un choc émotionnel si fort qu’il lui était impossible d’en parler publiquement. Dans une nouvelle interview pour la chaîne The Beatles Channel de SiriusXM, McCartney est revenu sur la façon dont il est parvenu à extérioriser sa peine et sa colère, non pas à travers des discours ou des interviews, mais par le biais d’une chanson : « Here Today ».

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Le silence face au chagrin

Après l’assassinat de Lennon, McCartney se souvient être rentré chez lui, allumant la télévision et voyant d’autres personnes, inconnues ou des connaissances plus lointaines, commenter la vie et la personnalité de son ami disparu. Le torrent médiatique, l’étalage des souvenirs, semblait insupportable à McCartney, qui ne parvenait pas à se joindre à cette vague de témoignages. Il ne pouvait pas se résoudre à exprimer ce que John représentait pour lui, ni à résumer cette relation si profonde et complexe. Les mots lui manquaient, la blessure était trop vive.

Le rôle salvateur de l’écriture

Avec le temps, alors que l’onde de choc s’atténuait doucement, McCartney a trouvé un exutoire dans la création. L’écriture de chansons, exercice auquel il s’était livré pendant des décennies, lui est apparue comme le seul moyen de mettre de l’ordre dans ses émotions. Dans un bâtiment vide qui allait devenir son studio, assis sur un plancher nu, il s’est armé de sa guitare et a commencé à jouer les premiers accords d’une nouvelle composition.

C’est ainsi qu’est née « Here Today », un titre qui apparaît sur l’album Tug of War (1982). Cette chanson est, selon McCartney, une conversation imaginaire avec John Lennon, un dialogue posthume où il lui dit tout ce qu’il n’avait pas pu exprimer avant, tout ce qui lui était resté en travers de la gorge ou du cœur. Plus que de simples paroles, la chanson renferme les sentiments bruts, la douleur, la nostalgie, et surtout l’amour et l’amitié qui avaient unis les deux hommes.

Des souvenirs intimes partagés

McCartney dévoile dans l’interview quelques sources d’inspiration précises. Une ligne de « Here Today » fait référence à une nuit particulière à Key West, en Floride, lors d’une tournée des Beatles. Un ouragan avait forcé le groupe à rester inactif, bloqué dans un motel. Sans rien d’autre à faire, les musiciens avaient bu, s’étaient confiés plus ouvertement que jamais, arrivant à se dire, entre deux verres, l’affection et la compréhension mutuelle qu’ils n’avouaient pas sobrement. Ce moment rare, suspendu dans le temps, avait révélé la profondeur du lien entre John et Paul.

Pour McCartney, cette nuit constitue l’un des rares instants où les deux compères s’étaient vraiment ouverts, se livrant sans détour. « Here Today » est donc un reflet direct de ces confidences : c’est un moyen, pour McCartney, de préserver et d’honorer ce souvenir précieux, devenu encore plus significatif après la mort de Lennon.

Une lettre d’amour et d’adieu

« Here Today » n’est pas qu’une chanson : c’est une lettre d’amour, un adieu intime, une façon de pleurer en musique sans avoir besoin de prononcer un discours en public. Les notes et les paroles permettent à McCartney de dire à Lennon ce qu’il ne pouvait exprimer à haute voix, de réaffirmer l’amitié, de rappeler leur complicité, de rendre hommage à la singularité de John, son humour, son esprit, son importance dans la vie de Paul. Là où les médias et les inconnus s’époumonaient, McCartney a choisi le silence d’abord, puis la musique, pour transformer cette douleur en un témoignage artistique poignant.

En fin de compte, « Here Today » représente un passage essentiel dans le processus de deuil de Paul McCartney. C’est la preuve que, si la parole publique lui semblait insupportable, la création, elle, pouvait canaliser l’émotion, rendre la tristesse plus supportable, et offrir au public une pièce de plus à la compréhension du lien indéfectible qui avait uni deux des plus grands compositeurs du XXe siècle.


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