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“Bon père de famille” : quand un cliché juridique en dit long sur nos clichés sociaux

Publié le 20 décembre 2024 par Angrymum @VeryAngryMum
“Bon père famille” quand cliché juridique long clichés sociaux

Ah, le "bon père de famille"... Une expression qui, à première vue, semble tout droit sortie d'un roman de Balzac. Pourtant, cette formule poussiéreuse a longtemps hanté les textes de loi français, servant de mètre étalon pour juger comportements et responsabilités. Mais qu'est-ce qui se cache vraiment derrière cette notion ? Une image rassurante ou un reflet criant des inégalités  ? Spoiler alert : c'est un peu (beaucoup) des deux.

Une histoire qui sent le rance

Historiquement, la notion de "bon père de famille" n'a rien d'innocent. Inscrite dans le Code civil de 1804, elle désignait un idéal : celui de l'homme rationnel, prévoyant, protecteur et... propriétaire. À une époque où les femmes n'avaient pas voix au chapitre, le "bon père de famille" incarnait une sorte de super-héros domestique, seul maître à bord pour prendre les "bonnes décisions" dans l'intérêt du foyer.

Cette figure est née dans un contexte où l'autorité paternelle régnait en maître : le père décidait, le père commandait, et le père gérait les biens familiaux. Et tant pis pour les femmes, réduites à des rôles d'exécutantes silencieuses. Pas besoin d'être sociologue pour voir que cette expression était un outil parfait pour légitimer la domination masculine, enrobée dans un vernis de respectabilité.

Juridiquement, un modèle dépassé

Jusqu'en 2014, le "bon père de famille" a continué à traîner sa carcasse dans le Code civil. Il apparaissait dans des textes relatifs à la gestion des biens ou au devoir de prudence, par exemple : "un individu doit agir comme le ferait un bon père de famille." Mais voilà, entre-temps, la société avait évolué : des femmes conduisaient des voitures, occupaient des postes de direction, et-choc !-elles géraient même des comptes bancaires.

Il a fallu attendre le XXIᵉ siècle pour que le législateur se décide à enterrer l'expression. En 2014, elle a été remplacée par des termes plus neutres comme "raisonnablement prudent et diligent." Un soulagement, certes, mais aussi une question : pourquoi diable avoir attendu aussi longtemps ?

Une vision genrée qui persiste

Si l'expression a disparu des textes officiels, son fantôme continue de rôder. Dans l'imaginaire collectif, le "bon père de famille" reste associé à des qualités supposées masculines : responsabilité, logique, rigueur. Pendant ce temps, les femmes sont toujours, à bien des égards, perçues comme des "nourrices naturelles", émotionnelles, voire irréfléchies.

Et l'actualité nous le rappelle régulièrement : en 2024, les femmes continuent de porter le fardeau des tâches domestiques et éducatives. Elles sont celles qui jonglent avec les agendas, préparent les goûters bio et font des réunions Zoom tout en surveillant les devoirs. Pendant ce temps, le "père moderne" est applaudi parce qu'il... a changé une couche (bravo !).

Déconstruction nécessaire

Déconstruire le "bon père de famille", ce n'est pas jeter la pierre aux hommes : c'est interroger une norme sexiste qui enferme tout le monde. Les hommes, d'un côté, sont sommés d'être des piliers infaillibles (bonjour la pression !). Les femmes, de l'autre, sont cantonnées à des rôles subalternes, même quand elles ont prouvé qu'elles peuvent tout faire, et mieux encore.

Au-delà de la linguistique, cette expression nous force à réfléchir à ce que nous valorisons comme société. Qui décide de ce qui est "raisonnable" ? Pourquoi l'autorité paternelle a-t-elle longtemps été le modèle exclusif ? Et surtout, pourquoi, en 2024, parle-t-on encore d'égalité quand il serait temps de passer à l'action ?

Une alternative ? Le "bon humain", peut-être ?

Et si, au lieu de juger les comportements selon des normes genrées et dépassées, on cherchait à valoriser l'équité et la collaboration ? Au lieu d'un "bon père de famille", pourquoi pas un "bon humain" ? Une personne, peu importe son genre, qui agit avec respect, intelligence et compassion.

Ce changement passe aussi par l'éducation : enseigner aux enfants que prendre soin des autres et être responsable, ce n'est pas une affaire d'hommes ou de femmes, mais une affaire de valeur et de sensibilité. Parce qu'au fond, ce dont nous avons besoin, ce n'est pas d'un retour nostalgique à une époque où les pères décidaient de tout, mais d'une société où chacun et chacune peut s'épanouir librement.

Alors, à quand la révolution  ? Elle commence peut-être ici, par un coup de balai dans nos expressions et un gros doigt d'honneur aux stéréotypes. À bon entendeur...

Après avoir lu : https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/12/18/la-disqualification-definitive-des-bons-peres-de-famille_6454623_3232.html
“Bon père famille” quand cliché juridique long clichés sociaux

Angry Mum, maman active, maman geek et toujours à l'écoute d'Internet... Elle adore les vacances mais pas toujours les vacances scolaires ! Blogueuse depuis 2013. S'abonner à Angry Mum sur Google News


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