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John Lennon et le blues : quand la vulnérabilité transcende le style musical

Publié le 27 décembre 2024 par John Lenmac @yellowsubnet

Tout musicien puise inévitablement dans ses influences. Même si beaucoup aspirent à créer quelque chose de totalement original, il est probable que leur meilleure musique naisse en prenant les bases de leurs disques favoris et en les transformant pour en faire quelque chose de personnel. Bien que lesBeatlesaient été maîtres dans l’art de mélanger les genres pour inventer de nouveaux sons,John Lennonressentait parfois qu’il était quelque peu perdu lorsqu’il chantait dans le style d’un bluesman.

Certes, les Beatles n’étaient pas aussi ancrés dans le blues que certains de leurs contemporains. LesRolling Stonesont bâti une carrière entière autour de chansons parlant de trahison et de peines de cœur, mais les Fab Four se concentraient sur les premiers rockeurs qu’ils découvraient, qu’il s’agisse des harmonies vibrantes des Everly Brothers ou des morceaux originaux de Buddy Holly et Little Richard.

Et en matière de styles vocaux, Lennon préférait une approche brute lorsqu’il chantait. Bien quePaul McCartneypuisse atteindre toutes les notes aiguës de Little Richard dans des interprétations comme « Long Tall Sally », Lennon, lui, se sentait plus à l’aise avec des morceaux directs comme « Johnny B. Goode » ou « Some Other Guy » lorsqu’ils se produisaient au Cavern Club.

Cependant, tout a changé lorsqu’ils ont commencé à expérimenter musicalement. Lennon, désireux d’apporter une certaine étrangeté à leurs chansons, allait jusqu’à malmener sa voix pour obtenir la performance souhaitée, comme les cris déchirants à la fin de « Revolution » ou ses gémissements dans « I Want You (She’s So Heavy) ».

Au moment d’enregistrer « Yer Blues », Lennon a pourtant ressenti une certaine appréhension en essayant d’adopter le style vocal de Sleepy John Estes. Il a admis : « Il y avait une gêne à chanter du blues. Nous écoutions tous Sleepy John Estes à l’école d’art, mais chanter comme lui, c’était autre chose. Je n’étais pas très à l’aise avec ça. Je pense que Dylan le fait bien, mais moi, j’ai tenté avec ‘Yer Blues’. »

Il faut dire que Sleepy John Estes n’est pas un artiste facile à imiter. Là où le blues de Mick Jagger reste relativement classique, l’interprétation de Lennon, avec ces intonations dramatiques avant chaque ligne, reste intimidante pour tout chanteur souhaitant captiver son auditoire, d’autant plus que les paroles abordent des thèmes sombres comme la dépression.

Cependant, Lennon pouvait aller bien plus loin lorsqu’il le souhaitait. « Yer Blues » aurait pu être un grand moment pour lui, mais en écoutant un morceau comme « Well Well Well » de son albumPlastic Ono Band, cette version du blues semble être celle d’un novice découvrant le genre.

Cela s’explique car, pour Lennon, chanter dépassait toujours le simple style. Il s’agissait de transmettre une émotion authentique, et si l’on observe l’évolution de sa carrière solo, Lennon avait amplement les moyens d’ouvrir son cœur pour le public.


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