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Nous étions la forêt

Publié le 24 janvier 2025 par Morduedetheatre @_MDT_
Nous étions forêt

Critique de Nous étions la forêt, d’Agathe Charnet, vu le 13 janvier 2025 au Théâtre Ouvert
Avec Léonard Bourgeois-Tacquet, Hélène Francisci, Maxime Gleizes, Virgile L. Leclerc, Catherine Otayek, Lillah Vial, mis en scène par Agathe Charnet

C’est cette image qui a retenu mon attention. Ces cinq personnages avec leurs vestes trop larges et leurs visages expressifs, et surtout ce visage au milieu, sérieux, tendu, m’ont captivée. Alors j’ai regardé le titre, jeté un oeil au résumé. Nous étions la forêt. Quelques lignes me suffisent à comprendre. C’est un spectacle écolo. Je n’en vois pas assez, alors même que c’est un sujet central dans ma vie. Go.

Un couple qu’on qualifierait facilement de parisiens bobos décident de s’installer à la campagne. Elle essaie de reprendre pied après un burn out, il sera en full remote. Ils emménagent dans ce village, au milieu de ces gens si différents, et chacun ne peut s’empêcher de juger un peu l’autre sur ses valeurs, sa vision de la vie, ses ambitions, son quotidien. Et puis vient l’annonce. Le bois de la Fermette, le bois même qui les a convaincus d’acheter ici, va être rasé pour devenir un parc photovoltaïque. Aïe.

Un spectacle écolo, au Théâtre Ouvert, par une jeune compagnie, avec un titre pareil, autant vous dire que j’arrive avec une idée en tête de ce que je vais voir. Je m’attendais à quelque chose de, sinon austère, disons sérieux, frôlant avec le moralisateur, mais je suis ok avec ça. C’est un sujet qui m’intéresse, que je ne vois pas assez souvent au théâtre, et je sais où je mets les pieds. Ha, ha, ha. Autant vous dire que dès la première scène, je comprends que je me suis fourrée le doigt dans l’oeil. Jusqu’au coude.

Je me retrouve devant un spectacle musical, fourmillant d’idées, mélangeant les genres, s’autorisant plein de choses. Il y a une véritable envie d’impliquer le public sans jamais aller vers la facilité. C’est théâtral avant d’être écolo. C’est pensé pour la scène avant d’être pensé pour éduquer. Et ils arrivent à créer une forme où les deux versants coexistent. Il y a cette histoire, avec nos personnages, bien dessinés, très différents, tous attachants, autonomes, indépendants, qui vivent leur vie et nous donnent envie de les découvrir plus avant. Et il y a, au sein de cette histoire, en filigrane, le discours que j’étais venue chercher.

Et dans cette forme assez captivante, on entend beaucoup de choses. Alors oui, il y a des discours qu’on attendait, sur des sujets qu’on connaît bien, mais ils sont amenés de manière tellement inattendue, tellement surprenante, que c’est comme si on les entendait vraiment pour la première fois. Il y a des fulgurances, dans la forme, dans les idées, dans la scénographie, qui nous font sentir une urgence, qu’on connaît, certes, mais qu’on a l’impression de vivre à leur côté.

Avec toutes ces idées, avec toutes leurs envies, avec tous les points de vue qu’ils amènent, ils ne nous demandent pas de prendre parti. Il n’y a pas de bien ou de mal, il n’y a pas une manière de penser, il n’y a pas une vérité ; il y a des personnages, il y a des réalités, il y a des compromis à trouver. Ils nous placent au centre des contradictions. Ils arrivent à nous amener avec eux, là où toutes les perspectives coexistent. Ils parviennent à nous projeter au bord de la forêt.

Plein d’idées, plein de promesses, plein d’ambition. En plein dans le mille.

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Nous étions forêt

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