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Deux Poèmes de Tomas Tranströmer sur des thèmes nocturnes

Par Etcetera
Deux Poèmes Tomas Tranströmer thèmes nocturnes

J’avais un peu parlé de Tomas Tranströmer en janvier dernier, lors de mon Mois thématique sur le voyage.
Tombée sur ces deux poèmes nocturnes et hivernaux, écrits à une trentaine d’années d’écart, j’ai eu envie de les partager ici. Ils me plaisent par la force et la justesse de leurs images, qui s’imposent à moi d’un seul coup, surgissent avec évidence.
Je reparlerai sûrement de lui pendant le Printemps des Artistes car il a écrit pas mal de poésies sur des musiciens, des peintres, des écrivains, etc…

Les deux poèmes ci-dessous sont tirés du livre « Baltiques, Œuvres complètes (1954-2004) », publiées chez Poésie/Gallimard en 2004, avec une traduction du suédois de Jacques Outin.

Note biobibliographique

Tomas Tranströmer (né en 1931 à Stockholm – mort en 2015 dans la même ville), poète suédois qui a remporté de nombreuses récompenses à l’international, dont le Prix Nobel de Littérature en 2011. Il a publié quatorze recueils en cinquante années d’écriture. Psychologue de formation. Ses livres ont été traduits en cinquante-cinq langues. Les éditions du Castor Astral ont publié toutes ses œuvres, en français. Gallimard a publié l’œuvre complète en 2004.

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Page 109
(Poème extrait du recueil « Ciel à moitié achevé  » de 1962)

Une nuit d’hiver

La tempête pose la bouche sur la maison
et souffle pour donner le ton.
Je dors nerveusement, me retourne, lis
les yeux fermés le texte de la tempête.

Mais les yeux de l’enfant ont grandi dans le noir
et la tempête, elle, gronde pour l’enfant.
Ils aiment tous les deux les lampes qui balancent.
Et restent tous les deux à mi-chemin des mots.

La tempête a des mains enfantines et des ailes.
La caravane s’emballe vers les terres lapones.
Et la maison sait quelle constellation de clous
fait tenir ses cloisons.

La nuit est calme sur notre sol
(où les pas effacés
reposent comme les feuilles englouties par l’étang)
mais la nuit est sauvage dehors !

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Page 303
(Poème extrait du recueil « Funeste gondole  » de 1996)

Journal de nuit

Une nuit de mai, j’ai accosté
dans une fraîche clarté lunaire
là où les fleurs et les herbes sont grises
mais les senteurs verdoient.

J’ai glissé en haut de la colline
dans la nuit daltonienne
alors que des pierres blanches
le signalaient à la lune.

Un espace de temps
de quelques minutes de long
de cinquante-huit ans de large.

Et derrière moi
au-delà de l’eau plombée
s’étendait l’autre rive
et ceux qui la gouvernent.

Des gens avec un avenir
à la place du visage.

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