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Là où l’eau touche l’âme

Publié le 08 avril 2025 par Adtraviata
l’eau touche l’âme

Présentation de l’éditeur :

Cette histoire est née au bord d’une rivière, alors que regardant l’eau qui dévalait, je me disais qu’elle n’était jamais la même. Elle s’écoule, elle nous renvoie à l’éphémère.

Ce roman nous conte les relations et les non-dits d’un groupe de femmes qui s’isolent dans un chalet afin de vivre une passion partagée, la pêche à la mouche. Leurs retrouvailles sont comme un rituel dont l’auteur joue pour raconter leurs solitudes dans toutes ses conjugaisons, mais aussi leurs choix, leurs résistances et mensonges, leurs violences. En quête d’apaisement, au fil de l’eau, elles tentent de se retrouver. Une tension plane sur ce week-end là, où la vie et la mort affleurent plus qu’à l’ordinaire. Pour certaines, ce sera l’occasion d’en sortir plus lucide.

Je croyais découvrir (avec joie) la plume et l’univers de Frédérique Dolphijn, mais non : j’ai déjà chroniqué ici, en 2018, Comme un air de tendresse au bout des doigts. Ici l’univers est liquide puisque plusieurs femmes se retrouvent le temps d’un week-end pour pêcher à la mouche, au plus près de la rivière et du poisson, donc. Certaines sont plus douées que d’autres, l’une s’improvise coach de pêche, une autre semble user d’une violence déplacée vis-à-vis d’une truite pêchée. Toutes sont venues avec leurs soucis, leurs ambitions, leurs secrets bien cachés ou au contraire affichés. Georgia est veuve, son chagrin est encore frais. Olivia brigue le poste de bourgmestre, sa soeur Fanny s’efface derrière elle, Lucie peine à gérer sa vie et Sophie, policière encombrée de son corps, cherche à tout prix l’attention d’Olivia. Pauline (fille de Lucie) et Emy, deux ados imprévues au programme, se sont invitées dans la danse : elles tenteront de se faire discrètes mais le conflit mère-fille et leurs antennes très réceptives aux émotions vécues dans le chalet vont mettre à mal le calme auquel aspirent les membres du Women Fly Fishing. Au fil du week-end, les tensions sous-jacentes vont enfler et crever dans une apothéose inattendue.

J’ai beaucoup aimé ce portrait de groupe avec ses zooms sur chacune des participantes, cette écriture au plus près des corps et de la nature, cette finesse psychologique. Pour ce qui est des scènes de pêche à la mouche, elles sentent l’eau qui coule, la verdure, le couvert des arbres, les trous à poissons, on s’y croirait (impossible de ne pas penser aux belles images du livre et du film Et au milieu coule une rivière). L’écriture poétique de Frédérique Dolphijn accompagne la nature dans tous ses états, du calme à l’orage, et complète à merveille la profondeur de son roman.

« Chuchotement. Il faut se taire. C’est une des premières choses que l’on apprend à la pêche.
Le temps plane au-dessus des flots. Les soies dessinent des arabesques. Une écriture s’inscrit dans les airs, des hiéroglyphes secrets se racontent.
La rivière les unit dans un instant présent pétri d’attention à l’onde. Elles se sentent héroïnes d’une histoire hors du temps, voguant d’épisode en épisode, connectées à ce qu’elles recherchent la plupart du temps inconsciemment. Le vivant. »

Frédérique DOLPHIJN, Là où l’eau touche l’âme, Esperluète, 2016

En 2025, on fête aussi les 30 ans d’Esperluète.


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