
De Leon à Saint Jean Pied de PortCrépuscule, j’adore! Personne ne m’attends, j’ignore où je dors ce soir, n’est-ce pas la définition du bonheur? La liberté sans la solitude. Souvent, il faut sacrifier l’une à l’autre. Je ne sais jamais choisir, je prends les deux. Bien sûr cette fanfaronnade n’est possible qu’à Paris avec un chat dans sa vie. Le Gers était un vague projet en quittant Paris et j’aurais dû « descendre » via Toulouse mais, c’est l’arc-en-ciel qui commande, Bordeaux était déjà là avec sa bombe à retardement de la nostalgie. Il me restait du carburant, je ne me sentais pas mûr pour soumettre à l’épreuve la stabilité affective que je dois à la dernière première femme de ma vie et à notre chatte. Poursuivant l’étrange cheminement de la non-organisation— c’est-l’arc-en-ciel-qui-commande — on the road again, à Castets la signalétique vers Léon me suggéra de poser mes pneus dans cette perle des Landes. Persuadé d’être à jamais à distance des émotions, de cette erreur il m’en coûta un billet. On se croit immunisé mais être vioque implique des fantômes jaillissants de partout. Léon, le lac, le resto de Christian et Valèrie, la Palu, le courant d’Huchet, l’Atlantique à Saint Girons me donnèrent envie de tourner les jambes, la page l’étant depuis longtemps. Je décrochais le vélo. Il restait quelques minutes au jour en train de fondre sur le Maransin. J’avais participé a long time ago au trail éponyme et je savais que les dunes de sables d’ici faisaient mentir la réputation plate du pays landais. . Ici tout me rappelait Benjamin — il m’avait mis un bon quart d’heure dans la traversée du lac à la nage — mon « petit » dernier qui désormais me domine de vingt centimètres était la raison de notre présence ici cet été-là et celle, subliminale, de la mienne ce soir-làLa voilà la solitude. La soi-disant liberté n’est qu’une fuite en avant pour lui échapper. Ici et maintenant dans le soir qui survient, le couchant au dessus des pins, le silence vespéral de la forêt, le pédalage épuisant dans le sable, la dune que je monte à pied le vélo sur le dos, ce n’est pas le moment d’écouter Barbara en songeant à d’autres vies que la mienne « Je l'ai trouvée devant ma porteUn soir, que je rentrais chez moiPartout, elle me fait escorteElle est revenue, elle est làLa renifleuse des amours mortesElle m'a suivie, pas à pasLa garce, que le Diable l'emporte Elle est revenue, elle est là Avec sa gueule de carême Avec ses larges yeux cernésElle nous fait le coeur à la traîneElle nous fait le coeur à pleurerElle nous fait des matins blêmes Et de longues nuits désoléesLa garce ! Elle nous ferait même L'hiver au plein coeur de l'été »Leon ce n’est pas que Benjamin! Ce ne sont pas que la descente en kayak de la Palu et du courant d’Huchet, le trail du Maransin, la traversée du lac à la nage, Léon c’est aussi F. Sept ans de vie avec F. entre sept autres avec K et cinq au compteur avec M. Ma vie ressemble à un calendrier de prénoms féminins. Heureusement ma carte du tendre se limite à la France Métropolitaine sinon j’te dis pas l’empreinte carbone La vie dissolue de Ma Majesté Moi me revient comme un boomerang dans la gueule. Des bleus au cœur, j’ai moyen envie de monter ma tente dans la forêt. Depuis qq temps, le vieillou venant, c’est la plan B de l’hôtel du lac qui palliera à mes projets fantasques d’aventurier de pacotille en bivouac— T’oublies rien?— …?— « Persuadé d’être à jamais à distance des émotions, de cette erreur il m’en coûta un billet… » Certes il faut toujours tenir la promesse narrative faite au lecteurDont acte:La nostalgie ça va cinq minutes, chuis pas en pèlerinage! En conséquence j’ai évité le resto de l’ex beau-frère qui doit être dead depuis un moment, F a poursuivi la vie jusque dans les Pyrénées et cela ne me regarde pas et je suis allé déjeuner "en ville" distante de qq kilomètres du lac et, réglant la cuenta comme d’hab à la CB sans un rond sur moi, il m’a semblé croiser de la tristesse dans le regard de la serveuse. J’ai pas aimé! C’est là que le barrage a cédé. J’ai revu Benjamin saisonnier pour financer son stage de surf et sa mine désappointée en comptant les pourboires* de ce difficile et ingrat job d’été. Je suis allé tirer du cash. La serveuse aura le souvenir d’un petit vieux qui revient sur les lieux du crime de pingrerie et lui lâche un billet inespéré.J’ai pris mon vélo et la fuite une boule de mélancolie dans la gorge* dans la vraie vie ce petit crevard se faisait les couilles en or dépensant dans l’achat d’un simple jean l’équivalent de mes fringues d’une année
