En sortie dans les salles françaises le 27 août 2025, ce documentaire ne laisse pas indifférent. Là-bas au Congo, au milieu d’une guerre sans fin, des gens extraient à mains nues, dans d’innommables conditions, le coltran nécessaire au fonctionnement de nos téléphones portables…
Les négociations bilatérales entre Kigali et Kinshasa ont débouché sur un accord de cessez-le-feu à l’Est de la RDC signé à Washington en juillet 2025 après trente ans de guerre, le conflit le plus meurtrier depuis la Seconde Guerre mondiale. Le groupe armé M23 n’était pas présent, ni surtout les populations concernées. On sait que ce genre d’accord de principe reste sans effet lorsque les données locales ne sont pas prises en compte. Il semble d’ailleurs surtout une opportunité pour les Etats-Unis de sécuriser l’approvisionnement de minerais critiques nécessaires à la technologie. Il est dès lors essentiel d’être conscients de ce qui se passe sur le terrain, dans les montagnes du Sud-Kivu. Issu d’une longue immersion à Numbi, au coeur du conflit, le film de Jean-Gabriel Leynaud y contribue.

Ce n’est cependant pas un film-enquête. C’est une plongée. Jean-Gabriel Leynaud a tourné plus d’une vingtaine de films en Afrique, le plus souvent comme directeur de la photographie. Il est vrai que l’image est toujours très soignée. Celui-ci est le produit d’une collaboration avec le cinéaste François-Xavier Destors, qui a lui aussi arpenté la région des Grands Lacs et a permis de mieux préciser les enjeux. Josaphat Musamba, chercheur doctorant à l’université de Gand et professeur à l’université de Bukavu, a quant à lui réuni une équipe de jeunes chercheurs congolais passionnés et compétents. C’est donc un travail collectif pour un film choral.

A l’exemple du coltan extrait à mains nues, le film met en effet l’accent sur les conditions tant humaines qu’économiques en suivant Ujumbe, un creuseur, mais aussi sa compagne Rachel, Alliance leur enfant, Aziza la prostituée, Honoré le vieux sage, Justin l’instituteur, Safari le policier des mines, Moïse le négociant… « On a tout mais nous vivons en enfer » : les groupes armés s’accaparent systématiquement à un prix dérisoire les minerais extraits dans le sang et la boue… C’est une terrible machine qui est à l’œuvre : l’exploitation des précaires est généralisée, autant que le banditisme. Une économie parallèle s’est installée, alimentant un trafic international souvent opaque. Leynaud suit la chaîne, notamment l’inextricable transport des minerais entre arnaques policières et embuscades.
C’est du Congo que provenait l’uranium qui a servi à la bombe atomique du 6 août 1945. Parmi les minerais extraits dans le pays, le coltran est celui qui permet notamment à nos téléphones de fonctionner. « On a tous un morceau de Congo dans la poche », dit Ujumbe. Il n’est pas inutile de passer le temps d’un film à nous rendre compte du prix humain réel de notre confort numérique !
Le Sang et la boue
Le Sang et la boue Bande-annonce VO STFR
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