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Man on the Run : McCartney à l’écran, Amazon mise sur Wings

Publié le 31 août 2025 par John Lenmac @yellowsubnet

Amazon MGM Studios sortira en février 2026 le documentaire Man on the Run, réalisé par Morgan Neville, qui explore la décennie post-Beatles de Paul McCartney et la formation de Wings.


Le long métrage documentaire Man on the Run, réalisé par l’oscarisé Morgan Neville, a été acquis par Amazon MGM Studios. Le film, qui brosse le portrait de Paul McCartney dans les années 1970 — de la séparation des Beatles à l’ascension de Wings — effectuera sa première ce week‑end au Telluride Film Festival (Colorado), avant une sortie en salles puis une mise en ligne mondiale sur Prime Video le 25 février 2026 dans plus de 240 territoires. L’opération s’inscrit dans un partenariat élargi entre MPL (la société de McCartney), Universal Music Group et Amazon, qui prévoit sur un an des contenus exclusifs, des drops de merchandising et des prises de parole de McCartney.

Pour les lecteurs de Yellow‑Sub.net, l’annonce a une double portée. D’abord, elle officialise l’entrée dans sa dernière ligne droite d’un documentaire longtemps évoqué, présenté comme un accès inédit à des archives rarement vues et à des matériaux filmés ou photographiés conservés par MPL. Ensuite, elle confirme que l’année McCartney ne se jouera pas seulement sur scène avec Got Back 2025, ni en librairie avec Wings: The Story of a Band on the Run (sortie le 4 novembre 2025), mais aussi sur le terrain du cinéma documentaire.

Sommaire

  • De la sortie des Beatles à l’invention d’un autre soi : la promesse du film
  • Morgan Neville, un regard de musicien sur les musiciens
  • Un partenariat à trois têtes : MPL, UMG et Amazon
  • Le cœur du sujet : les années 1970, terrain d’essais et de victoires
  • Archives et « regard vulnérable » : ce que pourrait montrer le film
  • Telluride, laboratoire de vérité
  • Un écosystème coordonné : livre, rééditions, documentaire
  • Les noms derrière la caméra : une chaîne de confiance
  • Sortie en salles : pourquoi c’est décisif
  • Ce que cela change pour 2025–2026 : agenda, attentes, conversations
  • Ce qu’on est en droit d’attendre — sans préjuger du contenu
  • Une « décennie McCartney » relue par le présent
  • Pourquoi cela compte pour Yellow‑Sub.net
  • En attendant l’écran : quelques jalons pour la mémoire
  • Dernier mot avant la projection
  • À suivre

De la sortie des Beatles à l’invention d’un autre soi : la promesse du film

Man on the Run se concentre sur la reconstruction de Paul McCartney après 1970 : un artiste sortant d’un groupe total qui doit réinventer son langage, sa méthode et sa place dans la culture populaire d’une décennie en ébullition. Le film suit la formation de Wings avec Linda McCartney en 1971, les allers‑retours de line‑up, l’apprentissage d’un groupe qui se rôde sur la route et en studio, jusqu’à la consécration de Band on the Run (1973), puis la trajectoire americana et stadium de Venus and Mars (1975), Wings at the Speed of Sound (1976), et l’explosion live de Wings Over the World. L’arc narratif assume l’idée d’un deuxième commencement : il ne s’agit pas de refaire les Beatles, mais d’installer une écriture qui s’autorise des pivotssoft‑rock, soul‑pop, pulsations quasi new‑wave naissantes, chansons d’atelier et tubes mondiaux.

L’intérêt du projet, tel qu’il est présenté, tient à la qualité et à l’intimité des sources : rushes rares, carnets, photographies de Linda, captations de répétitions et enregistrements privés composeraient la trame d’un récit plus vulnérable que les anthologies habituelles. On y attend les épisodes fondateurs : le Nigeria et les sessions mouvementées de Band on the Run après des départs inopinés, le University Tour de 1972 en fourgonnette, les sessions américaines qui affinent une esthétique radio‑friendly sans renoncer à l’expérimentation, la conquête d’un public désormais familial et international. Au cœur, une question : que signifie, pour McCartney, composer et produire quand s’efface la gravité gravitationnelle des Beatles ?

Morgan Neville, un regard de musicien sur les musiciens

Le choix de Morgan Neville éclaire l’ambition du film. Réalisateur de 20 Feet from Stardom (Oscar du Meilleur documentaire), de Won’t You Be My Neighbor? et de projets musicaux en série (Keith Richards, Rick Rubin, Mark Ronson, Bono & The Edge), Neville a démontré une science de l’archive et un sens de la mise en récit qui privilégie toujours la voix des interprètes. Plus récemment, son Piece by Piece a raconté Pharrell Williams en LEGO, preuve qu’il sait déplacer le cadre documentaire pour toucher à la matière intime de la création.

Appliqué à McCartney, ce regard laisse espérer un équilibre entre histoire et présent : expliquer comment se fabrique une chanson, pourquoi un arrangement prend telle direction, se loge l’audace dans un tube pensé pour les radios ; mais aussi entendre des doutes, des virages, des ratés parfois, bref la chronique d’un laboratoire pop.

Un partenariat à trois têtes : MPL, UMG et Amazon

Man on the Run est produit par Tremolo (la société de Neville), en association avec MPL (le catalogue et la maison de McCartney) et Polygram Entertainment (entité audiovisuelle d’Universal Music Group). La présence conjointe de MPL et de UMG garantit l’accès aux droits, aux bandes, aux masters, aux images ; elle dit aussi le positionnement du film : ni bootleg prestigieux, ni pub déguisée, mais un récit qui peut circuler sur tous les canaux de la marque McCartney — livre, musique, salle, plateforme. Dans l’attelage de production figurent Chloe Simmons et Meghan Walsh pour Tremolo, Scott Rodger et Ben Chappell pour MPL, Michele Anthony et David Blackman pour Polygram ; la production exécutive associe Caitrin Rogers et Paul McCartney lui‑même. La sortie est pensée en deux temps : un passage par des cinémas choisis — format idéal pour goûter l’image et le son — avant la mise en ligne globale sur Prime Video le 25 février 2026.

Ce calendrier interacte avec deux autres événements : la première à Telluride, rendez‑vous qui a servi de tremplin à tant de documentaires de référence, et la parution du livre Wings: The Story of a Band on the Run, programmée au 4 novembre 2025 chez Liveright/W. W. Norton. L’un nourrit l’autre : au cinéma, l’image et le son ; en librairie, la voix longue, les documents reproduits, l’entretien au long cours.

Le cœur du sujet : les années 1970, terrain d’essais et de victoires

Parler de la décennie 1970 chez McCartney, c’est abandonner la vision stéréotypée du « post‑Beatles facile ». On y rencontre des choix risqués et des méthodes radicales. Il y a d’abord le bricolage assumé de 1971–1972, quand Wings apprend son métier en tournant dans des universités, sans distance avec le public ; ce geste, d’une humilité parfois incomprise, redonne à McCartney un sens du jeu qu’aucun stade ne remplace. Il y a ensuite la décision de capter l’énergie d’un groupe en formation au Nigeria pour Band on the Run, malgré les aléasvol de bandes, soucis logistiques, personnel réduit —, qui forcent l’ingéniosité et signent l’identité d’un album devenu canoniquement maccartnien.

Viennent alors des années américaines où l’on voit Wings s’installer dans un écosystème de studios et de radios qui aiment les chansons ciselées, les cuivres élégants, les harmonies qui s’ouvrent en fanfare. Les tournées grossissent, l’imagerie s’amplifie, la section de cuivres devient un personnage, le répertoire concilie la ballade artisanale et le single taillé pour les charts. Man on the Run promet de tenir ce fil : montrer l’artisanat sans sacrifier le spectacle, rappeler la fabrique derrière l’icône.

Archives et « regard vulnérable » : ce que pourrait montrer le film

Le pitch insiste sur un accès « sans précédent » à des images et enregistrements encore inédits. Sans dévoiler les surprises, on peut esquisser ce que ces trésors permettraient d’éclairer. Les journaux et photos de Linda McCartney pourraient raconter la vie d’atelier, l’intimité d’un couple qui compose et tourne avec des enfants en bas âge, l’équilibre domestique derrière la machine scénique. Des rushes de répétitions ou de soundchecks donneraient la mesure des ajustements musicaux : une basse qui change de ligne, un bridge réécrit, un tempo qu’on assouplit, autant d’indices d’un goût du détail qui fait la signature McCartney.

On peut aussi imaginer la cartographie d’un line‑up qui n’a cessé d’évoluer : Denny Laine comme colonne vertébrale, Denny Seiwell et Henry McCullough au premier Wings, la période Jimmy McCulloch/Joe English, puis les ajustements de fin de décennie. Un montage bien tenu ferait sentir les changements d’équilibre, les complicités musicales, les éclats d’amitié et les tensions inhérentes à une troupe soumise à un rythme intensif.

Telluride, laboratoire de vérité

Telluride n’est pas un marché tapageur ; c’est un baromètre. Y présenter Man on the Run, c’est confronter le film à un public de cinéphiles et de professionnels qui jugent sur pièce : forme, tenue, émotion. Pour un documentaire musical, la salle fait tout : les hautes lumières d’un mix bien ciselé, la respiration du silence, la dimension des images. Une réception chaleureuse à Telluride peut enclencher une trajectoire de festivals (Toronto, New York, Londres) et ouvrir un chemin vers les prix dédiés au documentaire. La présence de Neville — passé maître en récit musical — renforce ce potentiel.

Un écosystème coordonné : livre, rééditions, documentaire

La sortie proche de Wings: The Story of a Band on the Run — un oral history édité avec Ted Widmer — structure un moment de réévaluation. Le Wings des années 1970 n’est plus seulement l’émetteur de tubes ; c’est un laboratoire auquel l’édition, le cinéma et l’industrie phonographique redonnent épaisseur. La campagne de rééditions (dont l’édition 50e anniversaire de Band on the Run en 2024, puis Venus and Mars en mars 2025) et la sortie en salles du rarissime One Hand Clapping en 2024 ont préparé le terrain. Man on the Run arrivera comme synthèse visuelle et émotionnelle, quand le livre livrera la matière brute — transcriptions, témoignages, documents — d’un récit dit à la première personne.

Cette coordination n’a rien d’un simple « bundle » marketing. Elle répond à une curiosité réelle : comment un artiste passé par le sommet de la musique populaire construit‑il, après, une carrière singulière ? Qu’est‑ce qui fait qu’un groupe comme Wings n’est pas un appendice des Beatles, mais un monde avec ses lois et ses risques ?

Les noms derrière la caméra : une chaîne de confiance

Le générique de production raconte aussi une méthode. Autour de Morgan Neville, Chloe Simmons et Meghan Walsh orchestrent la fabrication pour Tremolo ; côté MPL, Scott Rodger et Ben Chappell garantissent l’alignement créatif avec la maison McCartney ; Michele Anthony et David Blackman pilotent pour Polygram. Caitrin Rogers, complice de longue date de Neville, supervise au plus près, avec Paul McCartney au sommet de la pyramide exécutive. Cette architecture de gouvernance — claire, assumée — permet de croiser l’exigence artistique d’un documentariste et la responsabilité d’un détenteur de catalogue. Traduction : un film capable d’être juste sans être hagiographique, généreux sans devenir fuyant.

Sortie en salles : pourquoi c’est décisif

La décision d’un passage en salles avant Prime Video n’est pas pure nostalgie. Un documentaire musical de cette ampleur gagne à être vu et entendu dans une salle calibrée : les textures de voix, le poids du bas, la dynamique des cuivres, la place des chœurs prennent une dimension que le salon peine à reproduire. La chronologie libérera ensuite le film sur plateforme, offrant l’accessibilité et la résonance internationale que permet un service disponible dans plus de 240 pays et territoires.

Ce que cela change pour 2025–2026 : agenda, attentes, conversations

À court terme, l’agenda McCartney se fait polyphonique. L’automne 2025 est celui de la tournée nord‑américaine Got Back entre Palm Desert (ouverture le 29 septembre) et Chicago (final les 24–25 novembre). Novembre 2025 verra paraître le livre Wings, promise à de fortes retombées médiatiques. Hiver 2026, Man on the Run passera le cap de la mise en ligne globale, prolongeant la conversation et rassemblant un public qui n’a pas forcément accompagné les rééditions ou les news de tournée. Cette progression en trois temps maintient une attention continue et permet d’entrer dans la décennie 1970 à partir de portes différentes.

À moyen terme, la plateforme servira de réservoir pédagogique et de plaisir : re‑voir, stopper, réécouter, partager des séquences. Pour les chercheurs et les fans chevronnés, c’est l’occasion de croiser les récits, de confronter les archives à ce qui est déjà connu, de nuancer des idées reçues (sur la « simplicité » de certaines chansons, sur la répartition des idées dans le groupe, sur l’esthétique live).

Ce qu’on est en droit d’attendre — sans préjuger du contenu

Il serait malavisé de déflorer ce que le film tient secret. Mais l’approche Neville laisse augurer quelques axes. Un chapitrage par albums ou par périodes qui, sans didactisme, suit les métamorphoses de son et d’équipe ; des portraits sensibles de Linda, Denny Laine, Denny Seiwell, Henry McCullough, Jimmy McCulloch, Joe English, Howie Casey et les cuivres ; une attention au travail quotidien — prises successives, maquettes, bricolages de studio — où se voit la patience d’un producteur‑auteur. On peut imaginer aussi un regard sur la réception : critiques de l’époque, tournées aux États‑Unis et au Royaume‑Uni, enjeux d’image quand on sort de l’ombre d’un mythe.

Ce regard pourrait inclure des contre‑récits : l’intensité parfois sous‑estimée de titres comme « Beware My Love », « Soily » ou « Arrow Through Me » ; l’audace rythmique de « Spin It On » ; la finesse d’arrangements de « Love in Song » ou « Don’t Let It Bring You Down » ; la portée live de Wings Over America ; la densité des faces B (jusqu’à « Daytime Nighttime Suffering »), qui disent un atelier plus expérimental qu’on ne le croit.

Une « décennie McCartney » relue par le présent

Dans l’histoire des Beatles, les années 1970 de McCartney ont souvent été résumées. Man on the Run s’inscrit dans ce mouvement plus récent qui les reconnaît pour ce qu’elles furent : un chantier d’ampleur, habité par une énergie populaire qui n’exclut ni l’exigence, ni l’autodérision. C’est aussi une histoire de couple et de familleLinda n’est pas un ornement : elle est présence, oreille, moteur —, et la preuve qu’un artiste peut vivre l’immensité d’un mythe tout en revendiquant un format humain, modulable, parfois fragile.

Revoir cette décennie par les yeux de Neville, c’est accepter une vulnérabilité : celle d’un homme au travail, qui cherche à chaque album la bonne combinaison de sons, de personnes, de tempo ; celle d’un groupe qui se refait à vue, qui échoue parfois, réussit souvent, et apprend des deux. Cette vulnérabilité est la condition de la grâce : c’est ce qui, dans un documentaire, peut passer l’écran et toucher autant les fans aguerris que les spectateurs qui n’ont pas grandi avec Wings.

Pourquoi cela compte pour Yellow‑Sub.net

Pour un site dédié à la vie et à l’œuvre des Beatles, Man on the Run n’est pas un simple contenu de plus. C’est une clé supplémentaire pour lire l’après. Il est tentant, encore aujourd’hui, d’organiser la mémoire autour de 1962–1970. Or la postérité des Beatles s’écrit autant après qu’avant. Le livre Wings donnera une matière précieuse ; les rééditions ravivent les oreilles ; le film mettra des visages, des espaces, des gestes sur ce que nous racontons ici depuis des années. À charge pour nous — et pour vous — d’écouter ce que ce récit ajoute, de discuter ce qu’il éclaire ou bouscule.

En attendant l’écran : quelques jalons pour la mémoire

À la veille de Telluride, il n’est pas inutile de se refaire une oreille. Band on the Run demeure l’épicentre sentimental : de « Jet » à « Bluebird », tout y respire l’élan retrouvé. Venus and Mars épouse une ambition américaine, dialogue avec la FM et ose des enchaînements scéniques qui feront le sel de Wings Over the World. At the Speed of Sound inscrit Wings dans une esthétique collective, où les voix se partagent et où émergent des grooves qu’on a tort de croire lisses. London Town et Back to the Egg annoncent des curiosités qui ferment la décennie sans la refermer. Si Man on the Run tient sa promesse, ces jalons sonneront neufs parce qu’on les verra autrement.

Dernier mot avant la projection

Amazon MGM Studios engage de larges moyens pour un documentaire qui, s’il parvient à marier intimité et histoire, pourrait s’imposer comme l’un des grands films musicaux de la saison. Morgan Neville a prouvé qu’il savait faire parler les archives sans les fétichiser, écouter les musiciens sans les béatifier. La première à Telluride jouera le rôle de test grandeur nature, avant la sortie en cinéma et l’ouverture mondiale sur Prime Video le 25 février 2026.

D’ici là, le livre Wings fixera une voix et des images ; la tournée Got Back 2025 rappellera, sur scène, la puissance d’un répertoire qui traverse trois viesBeatles, Wings, solo — sans se dissoudre. Si Man on the Run réussit son pari, il donnera à cette troisième vie une forme que le grand public n’a pas encore vue : celle d’un artiste au travail, humain, courageux dans ses choix, qui a préféré inventer au présent plutôt que rejouer le passé.

À suivre

Nous reviendrons, après Telluride, sur les premières impressions, les images marquantes et ce que le film apporte à la compréhension de la période Wings. En attendant, notez la date : 25 février 2026 pour le lancement mondial sur Prime Video, et 4 novembre 2025 pour la parution de Wings: The Story of a Band on the Run. La conversation ne fait que commencer.


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