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McCartney filme Oasis à Pasadena : une bénédiction en un mot

Publié le 10 septembre 2025 par John Lenmac @yellowsubnet

Le 6 septembre 2025, Paul McCartney assiste au concert d’Oasis au Rose Bowl de Pasadena. Capté en train de filmer « Little by Little » et qualifiant la soirée de « Fabulous », il offre une reconnaissance symbolique au groupe, renouant avec l’héritage britpop dans une séquence émotive relayée massivement.


À Pasadena, le Rose Bowl vibrait déjà au son des hymnes britpop quand une silhouette familière a attiré les regards. Paul McCartney, 83 ans, a assisté le samedi 6 septembre 2025 au concert d’Oasis dans le cadre de la tournée nord-américaine Live ’25, accompagné de son épouse Nancy Shevell. À la sortie, interrogé sur son ressenti, l’ex-Beatle a livré un verdict en un mot, presque un clin d’œil : « Fabulous ». Une appréciation concise, mais lourde de sens, pour un groupe dont l’ADN est pétri de références aux Beatles, et qui n’a jamais caché à quel point leur musique lui doit. Les images de McCartney dans les travées du stade ont circulé massivement, participent au récit d’une rencontre de générations et, surtout, d’une forme d’adoubement public.

Dans les gradins, les témoins l’ont vu se prêter au jeu avec simplicité. En repartant, il a salué les fans, mais le moment qui a prospéré sur les réseaux tient en une scène ordinaire et, pour cette raison, touchante : McCartney debout, téléphone en main, filmant Noel Gallagher en train d’interpréter « Little by Little ». L’extrait, relayé sur plusieurs comptes, a rapidement fait le tour des plateformes et a servi de preuve concrète de l’intérêt attentif que le musicien portait à la prestation. Le symbole est limpide : un architecte de la pop moderne se laisse happer par un successeur qui, lui aussi, a influencé une génération entière.

Sommaire

Ce que McCartney est venu voir : le retour d’Oasis aux États-Unis

Le passage d’Oasis en Californie s’inscrit dans une séquence nord-américaine brève mais spectaculaire : Chicago le 28 août (Soldier Field), East Rutherford les 31 août et 1er septembre (MetLife Stadium), puis deux soirées à Pasadena les 6 et 7 septembre (Rose Bowl). Les dates, espacées et concentrées sur de très grands stades, ont fait figure d’événements dans chaque ville, tant le groupe n’avait plus joué aux États-Unis depuis 2008. Le Soldier Field a marqué le premier concert américain du tandem Liam/Noel en dix-sept ans, confirmant l’ampleur d’un retour que l’on disait autrefois improbable.

Le Rose Bowl a déroulé un show calibré pour la communion de masse, piochant largement dans « Definitely Maybe » et « (What’s the Story) Morning Glory? », le cœur canonique du répertoire d’Oasis. La presse locale a souligné le contraste entre la ferveur quasi footballistique observée au Royaume-Uni cet été et l’enthousiasme, plus mesuré mais réel, du public californien, qui a savouré une succession de classiques joués avec une efficacité sans faille. Dans ce décor, la présence d’invités de marque – parmi lesquels Paul McCartney – a renforcé l’impression d’assister à un morceau d’histoire pop remis sur pied sans nostalgie pesante.

Une foule de célébrités, mais un téléphone qui capte l’instant

La liste des personnalités repérées dans les tribunes parle d’elle-même : Leonardo DiCaprio, Billie Eilish, James Hetfield et d’autres figures du cinéma ou du rock étaient là. Or le cliché le plus partagé n’est pas celui d’un carré VIP figé ; c’est ce court plan où l’on voit McCartney se comporter comme n’importe quel spectateur, enregistrant un passage de la chanson « Little by Little ». La dimension presque domestique de la scène, ramenée à hauteur d’homme, a séduit les réseaux et probablement les principaux intéressés : Liam et Noel, qui ont grandi dans l’ombre tutélaire des Beatles, savent ce que vaut l’attention d’un pair aussi éminent.

La présence de « Little by Little » dans la setlist n’est pas anecdotique. Morceau de 2002, chanté par Noel, il représente l’une des rares respirations post-2000 dans un canevas majoritairement centré sur les années 1994-1996. Le voir pointé par McCartney au bout de son téléphone dit aussi quelque chose de la densité mélodique que Noel Gallagher a su maintenir au-delà de l’explosion britpop.

« Fabulous » : un mot pour solder un vieux bras de fer ?

Le choix d’Oasis de toujours assumer son héritage beatlien a, dans les années 1990, nourri longs hommages et piques ironiques. George Harrison et Paul McCartney eux-mêmes n’ont pas toujours regardé les frères Gallagher avec bienveillance, tandis que ceux-ci cultivaient un art consommé de la petite phrase. Le temps, la musique et la distance ont fini par lisser les angles. Depuis plusieurs années, Noel et Paul affichent une cordialité amicale qui a culminé lors d’un épisode resté fameux : l’anniversaire des 50 ans de Stella McCartney en 2021, vu comme une réunion informelle de musiciens où Noel Gallagher est monté sur scène aux côtés de McCartney pour jouer « Birthday » et « I Saw Her Standing There ». Dès lors, entendre Paul résumer une soirée d’Oasis par « Fabulous » résonne moins comme un verdict critique que comme une bénédiction amicale, presque un geste d’égalité entre générations de mélodistes.

Les chiffres qui tordent le cou aux idées reçues

L’un des marronniers sur Oasis tient à leur trajectoire américaine. Le groupe n’a jamais décroché de n° 1 au Billboard Hot 100 ; leur meilleur classement demeure « Wonderwall », monté jusqu’au n° 8 au printemps 1996. L’Amérique s’est souvent montrée plus frileuse que l’Europe vis-à-vis de la britpop, mais l’histoire n’est pas figée : en 2025, Oasis joue des stades pleins aux États-Unis. À MetLife Stadium, la jauge est de l’ordre de 82 500 places ; la presse professionnelle évoque environ 60 000 spectateurs pour l’une des soirées, un ordre de grandeur cohérent avec l’occupation réelle de tels équipements et très éloigné des chiffres fantaisistes circulant parfois sur les réseaux. Au total, les deux dates new-yorkaises ont réuni un public à six chiffres, ce qui replace le groupe dans une dimension qu’il revendiquait au mitan des années 1990.

Ce retour américain prend d’autant plus de relief que le dernier concert d’Oasis aux États-Unis avant la scission remontait au 20 décembre 2008, à Fairfax (Virginie), dans une salle d’environ 7 000 places. Le contraste entre Fairfax 2008 et Chicago 2025 mesure non seulement le temps écoulé mais la persistance d’une base de fans capable de se mobiliser pour une reformation longtemps jugée utopique. L’écart de gabarit entre les venues d’hier et d’aujourd’hui témoigne d’un capital de désir resté intact.

Le Rose Bowl sous le signe des classiques

Sur le terrain strictement musical, la soirée californienne a affiché un classicisme assumé. Les piliers « Supersonic », « Live Forever », « Morning Glory », « Some Might Say », « Champagne Supernova », « Don’t Look Back in Anger » ont servi d’ossature à un spectacle généreux, habillé de visuels nourris de textures nineties et de collages, où l’on croyait revoir des extraits de télévisions cathodiques. Liam Gallagher, lunettes sombres et chant frontal, a tenu son rôle de galvaniseur, tandis que Noel incarnait la stabilité harmonique et la charpente de la soirée, prenant le micro sur quelques titres dont « The Masterplan ». Dans ce cadre, l’apparition d’un Beatle parmi les spectateurs est venue ajouter une forme de légitimité symbolique à une performance déjà donnée gagnante.

Une séquence nord-américaine courte, un retentissement maximal

La tournée Live ’25 aux États-Unis s’est jouée sur un modèle « few but huge » : trois métropoles, cinq stades au total, et l’assurance de créer l’événement à chaque halte. Chicago a servi d’ouverture américaine, New York a validé l’attraction littéralement colossale du groupe dans la région, Los Angeles a scellé un chapitre sous le signe des retrouvailles et des regards croisés – ceux du public et ceux des artistes qui, comme Paul McCartney, sont venus constater cette reconquête. La suite immédiate du périple menait Oasis à Mexico City pour deux soirs à l’Estadio GNP Seguros, avant le retour au Royaume-Uni pour Wembley, puis un long voyage vers l’Asie et l’Océanie. Pour un groupe que l’on disait fâché à jamais, la fluidité de l’organisation et la constance des setlists ont impressionné les observateurs.

Ce que dit l’instant capté : un dialogue d’esthétiques

Si l’on veut décrypter l’image de McCartney filmant « Little by Little », on peut y lire un dialogue de compositeurs. Noel Gallagher, artisan d’une pop à la fois carrée et lyrique, place sa voix sur un mid-tempo dont la progression harmonique ménage une montée émotionnelle sans emphase. McCartney, mélodiste suprême de la génération précédente, pointe à sa manière ce qui a fait la singularité d’Oasis : une science du refrain et de la ligne vocale qui s’inscrivent dans le droit fil d’une tradition britannique où la mélodie prime sans jamais trop appuyer l’arrangement. Rien d’ostentatoire ici, simplement une manière d’écouter et de reconnaître.

Cette image contredit aussi une lecture trop binaire de la relation Beatles/Oasis. Oui, les Gallagher ont cultivé la référence ; oui, ils ont parfois fait de la rivalité un sport d’estrade. Mais la passe qu’offre McCartney au Rose Bowl — une présence discrète, un mot qui vaut signature — résume un autre fil : la continuité stylistique, sur trois décennies, d’une pop britannique soucieuse de mélodies fortes, d’accords simples au service d’une émotion directe, et d’un sens du chœur qui rallie des stades entiers.

Une iconographie pop partagée

Le concert de Pasadena n’a pas seulement rejoué des chansons ; il a aussi convoqué tout un imaginaire visuel où chacun des deux univers — Beatles et Oasis — a laissé des traces. Des guitares à la tenue nette des rythmiques, de la déclamation de Liam aux contre-chants calibrés par Noel, la scénographie a fait remonter à la surface une grammaire pop que l’on pourrait résumer à trois ingrédients : simplicité apparente, densité harmonique et puissance collective du chant repris par la foule. Voir McCartney au milieu de ce dispositif a rejoué un vieux motif : celui d’un passeur qui n’impose rien, mais qui signale par sa seule présence que la transmission opère.

L’angle américain : du symbole au réel

Le phénomène Oasis aux États-Unis a longtemps été raconté par contraste : succès relatif dans les charts, immense renommée en Europe et au Japon, histoire faite de salles plus que de stades outre-Atlantique. L’été 2025 rebat partiellement les cartes. Le choix d’une offre rare — peu de dates mais d’énormes capacités — a créé un désir d’événement. Il faut rappeler que la réapparition d’Oasis dans des enceintes comme MetLife Stadium suppose, logistique à l’appui, un niveau de demande très élevé et une confiance des promoteurs qui ne s’achète pas. Le récit médiatique, parfois prompt à forcer le trait, s’appuie cette fois sur des marqueurs concrets : stades complets, billetteries saturées, publics intergénérationnels. Et, dans cet écrin, le « Fabulous » de McCartney ressemble à un sceau apposé au bas d’une page qui manquait encore à l’histoire américaine du groupe.

De Stella à Pasadena : l’amitié Noel/Paul sur la durée

L’épisode de l’anniversaire des 50 ans de Stella McCartney en 2021 fait désormais figure de prologue. Ce soir-là, dans un cadre privé, Noel Gallagher rejoint Paul McCartney pour deux standards des Beatles : « Birthday » et « I Saw Her Standing There ». La scène était chargée de symboles — la fille styliste, le père légendaire, le guitariste d’Oasis — et elle avait scellé un rapport détendu, débarrassé des crispations des années 1990. En 2025, la boucle se prolonge : Noel n’est plus l’invité de Paul, Paul n’est plus l’hôte de Noel ; l’un vient voir l’autre, comme on va à un concert dont on a envie, sans protocole. La simplicité de cette logique — aller écouter de la musique — explique peut-être mieux que tout les images du Rose Bowl. (

Ce que retient la communauté beatlienne

Du point de vue des fans des Beatles, la présence de McCartney met surtout en lumière la porosité naturelle entre l’héritage de Liverpool et la vague britpop. Les débats d’hier — pastiche, hommage, imitation — ont cédé la place à une cohabitation tranquille : Oasis a rejoint, bon an mal an, le panthéon des formations qui écrivent des refrains que l’on chante à tue-tête, un art auquel McCartney a voué sa vie. Dans cette perspective, le reportage spontané de son téléphone, braqué sur Noel, n’est pas une anecdote ; c’est un hommage de praticien à praticien. Et l’« opinion » en un mot, « Fabulous », sonne comme l’expression la plus économe et la plus indiscutable qui soit.

Le regard des médias américains : entre nostalgie et efficacité

La presse américaine a globalement salué la tenue du show au Rose Bowl : set carré, énergie contrôlée, visuels soignés et répertoire taillé pour l’émotion collective. Certains observateurs ont noté que le public californien, par nature, monte rarement à des niveaux d’hystérie comparables à ceux enregistrés en Europe cet été, sans que cela n’entame l’impact émotionnel de la soirée. À l’inverse, d’autres ont insisté sur le retour en grâce du groupe auprès d’un public plus jeune, preuve que des titres comme « Wonderwall » ou « Don’t Look Back in Anger » ont cessé d’appartenir à une seule génération. Au milieu de ces lectures, la séquence McCartney a servi de fil rouge : elle a permis de raconter la soirée en une image simple.

Un mot, une histoire

Il est tentant d’ériger ce « Fabulous » en étendard. On peut aussi l’entendre comme une politesse pleine de chaleur, un remerciement d’artiste à d’autres artistes pour la qualité d’un spectacle. Mais ramené au destin d’Oasis en Amérique, à l’histoire de la britpop et à l’ombre portée des Beatles, ce mot prend un relief particulier. Il suggère qu’au-delà des petites querelles médiatiques, au-delà des chiffres et des classements, la musique demeure une conversation continue. Et qu’un soir de septembre 2025, dans un stade californien, Paul McCartney a choisi d’y prendre part, incognito ou presque, en souriant, en filmant un titre de Noel Gallagher, puis en lançant ce « Fabulous » qui ressemble à un ponctuation amicale au bas d’une page bien écrite.


Repères utiles

Le premier show américain d’Oasis depuis la reformation a eu lieu à Chicago (Soldier Field) le 28 août 2025, avant deux dates à MetLife Stadium et deux au Rose Bowl. Le groupe n’avait plus joué aux États-Unis depuis Fairfax (Virginie), le 20 décembre 2008. La fréquentation à MetLife s’établissait autour de 60 000 spectateurs pour l’une des soirées, loin des chiffres exagérés parfois répétés en ligne. « Wonderwall » demeure le plus haut classement du groupe au Billboard Hot 100 (n° 8), ce qui n’a pas empêché Oasis de remplir des stades en 2025.


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